Le ministre des Affaires étrangères, Xavier Bettel (DP), a livré un cri de désespoir samedi en guise de discours à l’Assemblée générale des Nations unies. « Nous prétendons ne vouloir abandonner personne (Leave no one behind est un des slogans de l’organisation), mais nous sommes un chien sans dents qui aboie », a regretté le numéro deux du gouverment. En cause bien sûr la gouvernance de l’Onu dont Xavier Bettel espère une réforme du conseil de sécurité, son instance suprême. Mais aussi et surtout la multiplication des conflits (il en recense soixante) sur le globe et l’impuissance du multilatéralisme pour les contenir.
L’extension de la guerre au Proche-Orient et plus particulièrement le conflit israélo-palestinien ont figuré parmi les principales préoccupations (Israël bombardait lourdement Beyrouth au moment où Xavier Bettel s’exprimait). Le ministre a prévenu de la radicalisation des parties, mais surtout côté arabe, en taisant la responsabilité israélienne : « Comment voulez-vous expliquer à un Israélien que la Palestine est un pays ami alors que son frère ou sa sœur est retenu(e) en otage par le Hamas. Comment voulez-vous expliquer à un Palestinien qu’Israël est un pays ami alors qu’on (sic) a enterré ses parents la veille ? Nous sommes en train de détruire les espérances. Nous formons les futurs adhérents du Hamas ou du Hezbollah », a-t-il clamé, insistant sur la responsabilité collective. Le terme « complices » est même tombé quand il s’est agi de laisser Israël considérer l’Unrwa comme une organisation terroriste ou criminelle. Xavier Bettel a ainsi plaidé la cause de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens.
« Mon pays fait partie des quelques pays qui n’ont pas encore reconnu la Palestine », a-t-il poursuivi. La reconnaissance ne devrait pas être « qu’un petit acte symbolique », a dit Bettel. Il s’est ainsi adressé « à tous ceux qui ne l’ont pas encore fait » : « Entendons-nous pour avoir un impact sur le terrain. » Si tel n’était pas possible alors le Luxembourg envisagera l’ouverture de représentations diplomatiques en Israël (ambassade) et en Palestine : « Pour montrer la symbolique, de deux États que l’on reconnaît ». Dans Tageblatt lundi, le même Xavier Bettel considère qu’ouvrir un bureau de représentation à Ramallah « est une reconnaissance ipso facto ». Face au Land, l’internationaliste Michel Erpelding considère comme de « l’enfumage » l’ouverture d’un tel bureau (« dont les Palestiniens se féliciteront sans doute ») si elle n’est pas associée à une « déclaration formelle ». Comme l’a relevé l’expert François Dubuisson à la Chambre, en acceptant la Palestine comme membre observateur des Nations unies ou comme membre de la Cour pénale internationale, le Luxembourg a déjà reconnu de facto l’État palestinien. La péréquation « représentation=reconnaissance » se révèle aussi contestable. Par exemple, la France et l’Allemagne opéraient ensemble (de 1998 à 2010) une représentation diplomatique à Banja Luka, chef-lieu de la République serbe de Bosnie-Herzégovine alors même que les deux puissances européennes s’opposent ardemment à l’autonomie de ladite entité.