La fondation de l’Arbed en livre
A paru la semaine passée le septième tome de Terres rouges, Histoire de la sidérurgie luxembourgeoise (aux Éditions des Archives nationales), un projet de recherche débuté en 2007 par l’historien spécialisé Charles Barthel. L’ambitieux travail de recherche a été poussé en 2007 par Joseph Kinsch, ancien président honoraire de l’Arbed puis d’ArcelorMittal, pour « mieux comprendre comment la sidérurgie et ses dirigeants successifs ont contribué à façonner l’économie, la culture, les relations sociales et l’identité de notre pays ». Jupp Kinsch, par ailleurs bienfaiteur du Land, est décédé le 20 octobre dernier et le livre lui rend hommage. L’ouvrage aux généreuses mensurations (402 pages pour 1,8 kg) se concentre cette fois sur l’émergence de l’Arbed, de 1904 à 1913, sur la genèse des Aciéries Réunies de Burbach-Eich-Dudelange, officialisée en octobre 2011. Sont narrées, avec un certain souci du détail, les valses hésitations des pères fondateurs qui vont finalement ancrer le Grand-Duché dans la mondialisation industrielle. Charles Barthel conclut l’ouvrage par l’aubaine qu’a représenté la Première Guerre mondiale pour le sidérurgiste. L’érection du siège, 19 avenue de la Liberté, dans les années 1920 (photo : Photothèque de la Ville de Luxembourg) en sera le fastueux symbole. pso
ArcelorMittal à la relance en live
Les grues reprennent du service avenue John F. Kennedy au Kirchberg où la construction du futur siège d’ArcelorMittal avait calé (photo : sb). Voilà cinq ans exactement que l’architecte de l’emblématique est connu. Le cabinet parisien Wilmotte & associés a dessiné un ensemble de bureaux faisant la part belle à l’acier dans une logique circulaire (cradle to cradle). Il devrait sortir de terre d’ici 2026, en même temps que le programme de logements devant densifier la zone entre le quartier européen Sud et Weimershof, explique la présidente du fonds d’urbanisation et d’aménagement du Kirchberg (Fuak), Félicie Weycker au Land. L’accord de principe conclu en mars 2016 entre le gouvernement (qui souhaite ardemment conserver le siège du sidérurgiste à Luxembourg) et ArcelorMittal sur l’exploitation d’un droit de superficie a été matérialisé (administrativement) trois ans plus tard. Selon les termes de l’accord, le Fuak cède l’exploitation du terrain entre les rues du Fort Thüngen et Galileo Galilei à des sociétés immobilières d’ArcelorMittal et sa spin off (de l’acier inoxydable) Aperam pour 92 millions d’euros, en vue de procéder à la construction d’un « siège emblématique » sur 55 000 m² de surface de plancher, soit 1 672 euros le mètre carré. Le fonds Kirchberg évoque l’accueil de 800 « employés ». Le bureau d’ingénierie, Bollinger + Grohmann, parle d’un bâtiment de seize étages doté d’un auditorium, de restaurants et d’un « jardin forestier ». Geprolux (Paul Wurth), qui assiste le maître d’œuvre envisage 346 places de parking. Le droit de superficie est concédé pour soixante pour cent à ArcelorMittal et Aperam. Les autres quarante pour cent vont à la société Kennedy 2020, propriété du groupe sidérurgique qui pourrait louer les espaces que ce dernier n’utilise pas. Contactée, la firme indique qu’elle communiquera à ce sujet « d’ici quelques semaines ». pso
SES mise deux milliards sur son avenir
L’opérateur luxembourgeois de satellites, SES, ouvre une nouvelle ère entrepreneuriale autour de la connectivité internet avec le lancement de deux satellites O3b mPower vendredi dernier (photo : SES). Ces deux satellites (lancés depuis Cape Canaveral sur une fusée Falcon9 de SpaceX) sont les premiers d’un programme à plus de deux milliards de dollars qui en compte onze. Il s’agit d’une « nouvelle génération de satellites aux performances imbattables », explique Ferdinand Kayser au Land ce jeudi. Le membre de la direction de SES et conseiller stratégique compare la connectivité offerte par la constellation multi-orbites de SES à « la fibre par l’espace ». Elle s’adresse principalement aux opérateurs des pays en voie de développement (par exemple Vodafone ou Orange), mais aussi aux acteurs du marché de la mobilité comme les croisiéristes et les compagnies aériennes. SES commercialise en business to business, a contrario de SpaceX qui, via Starlink, traite directement avec le consommateur. Quatre satellites supplémentaires O3bMpower seront lancés au deuxième semestre 2023. Ils permettront le début des opérations dans la foulée. pso
Un nouveau souffle pour Gold&Wood
La marque luxembourgeoise Gold&Wood renaît grâce à des capitaux français, remarque Paperjam cette semaine. La lunetterie Wood Optic Diffusion qui produisait des montures en bois (à Hosingen puis à Troisvierges) pour les vendre aux stars américaines avait fait faillite en octobre et procédé à la vente de son outillage en novembre (d’Land, 18.11.2022). L’entreprise fondée en 1995 (photo : Gold&Wood) par le Belge Maurice Léonard revit avec des fonds en provenance de Normandie où le groupe KNCO est basé. La société Gold & Wood Luxembourg, à la même adresse de la zone industrielle de Troisvierges, a été enregistré à cet effet le 13 décembre dernier. pso
Année fatidique
C’est à la quasi-unanimité (les deux députées Déi Lénk se sont abstenues) que le Parlement a voté ce mardi la prolongation (jusqu’à juin 2023) des aides en faveur des entreprises les plus exposées à la flambée des prix de l’énergie. Le Luxembourg épuise presque toute la marge de manœuvre laissée par la directive européenne. Une entreprise sera éligible si ses coûts d’énergie dépassent 1,5 pour cent de son chiffre d’affaires. L’aide est plafonnée à 75 millions d’euros par entreprise éligible. (Si elle dépasse le seuil des cinquante millions d’euros, l’entreprise doit présenter un plan de réduction de son empreinte carbone au ministère de l’Économie.)
Dans l’industrie luxembourgeoise, les situations varient, explique le directeur de la Fedil, René Winkin. Le producteur de verre plat Guardian a ainsi compté parmi les principaux consommateurs de gaz du pays ; au point que la fermeture du site de Dudelange et la rénovation de celui de Bascharage ont significativement fait baisser la consommation nationale. Chez ArcelorMittal, on tente de réduire la cadence des fours électriques aux heures de pointe. Chez DuPont de Nemours, les machines fabriquant le film Tyvek tournent en continu. La multinationale américaine peut se le permettre, elle est un price-setter pour ce produit. D’autres entreprises spécialisées dans le plastique (pour l’industrie automobile, les emballages, les capsules) cherchent à contourner les heures de pointe en reportant une partie de leur production sur les samedis, « mais il faut trouver un accord avec les salariés », précise Winkin.
Sans oublier le secteur de l’agroalimentaire, impactée tant par la hausse des prix des matières premières que par celle des énergies. Patrick Muller, le CEO de Panelux (qui produit notamment pour les filiales de boulangerie Fischer) explique au Land que les fours de la fabrique continuent à être chauffés au fioul. Dans le cadre du projet « Neistart », l’entreprise avait investi pour faire le switch vers le gaz, moins émetteur en CO2. Les tuyaux étaient installés, les brûleurs adaptés, puis est venue la guerre en Ukraine. Du coup, Panelux a préféré attendre. (Les prix du fioul augmentant moins vite que ceux du gaz.) Pendant ce temps, les factures d’électricité se sont multipliés par trois, sans parler des prix des matières premières. Alors qu’en temps normal, Panelux fait une hausse des prix par an, elle a dû en faire trois depuis novembre 2021.
René Winkin pointe les concurrents français et allemands, qui bénéficient de tarifs bas, assurés par l’État. Si personne ne respectait plus le level-playing field, estime-t-il, le Luxembourg n’aurait pas non plus à s’y tenir. Alors que de nombreux contrats de fourniture viendront à échéance, 2023 pourrait s’avérer une « année fatidique » (Schicksalsjoer) pour l’industrie. bt