Ticker du 18 novembre 2022

d'Lëtzebuerger Land vom 18.11.2022

Photosolaire

Le Premier ministre Xavier Bettel (DP) et le ministre de l’Énergie Claude Turmes (Déi Gréng) ont inauguré lundi le plus grand car-port solaire du Luxembourg sur le site de Ceratizit à Mamer, une installation qui couvre la consommation électrique de 415 ménages, informe le fabriquant de carbure et d’outils de coupe (photo centrale : sb). Selon le groupe centenaire employant 8 000 personnes, cet assemblage de 3 500 panneaux photovoltaïques d’une surface de 6 200 m2 doit lui permettre de réduire ses émissions de CO2 de 35 pour cent d’ici 2025. pso

De la Wirtschaft aux Annonces

« Von Hosingen nach Hollywood », titrait le Wort dans sa rubrique éco en 2017. Le quotidien alors basé à Gasperich y présentait le lunettier du nord du pays qui vendait, outre-Atlantique et avec un certain succès, ses montures en bois (sous la marque Gold & Wood) aux célébrités comme le rappeur Snoop Dogg, les acteurs Samuel L. Jackson et Sylvester Stallone ou encore l’entrepreneur Tim Cook. Cette semaine, l’actualité de l’entreprise échoue dans les pages annonces du Wort avec la vente aux enchères sur faillite d’outillage pour la fabrication de lunettes, des montures et des pièces détachées. Le patron de la société, Maurice Léonard, confiait en juin au quotidien avoir souffert économiquement de la pandémie de Covid-19 et de la guerre en Ukraine. Il cherchait de nouveaux investisseurs. « On sait qu’avec une injection dans notre capital, on pourra relancer l’entreprise et la rendre à nouveau saine et pérenne. On est passé au travers de toutes les crises. » Wood Optic Diffusion, déclarée en faillite le 17 octobre, employait quinze personnes et exportait 95 pour cent de sa production. pso

An Inconvenient Truth

« Le secteur financier est très exposé aux risques liés à la transition », écrivent les économistes de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) dans leur étude de 190 pages présentée jeudi après-midi à Luxembourg. Le rapport exposé au ministère de l’Énergie de Claude Turmes (Déi Gréng) fait la part belle à la question climatique (photo : sb). Un chapitre de 70 pages y est consacré. Dans sa dernière Étude économique, présentée en juillet 2019, l’organisation (travaillant à la convergence des politiques publiques des pays riches) envisageait le centre financier luxembourgeois comme un outil idoine pour financer la transition vers une économie bas carbone. La Bourse de Luxembourg, son Green Exchange ainsi que l’agence de labellisation LuxFlag étaient perçus par les experts comme des atouts maîtres de la transition énergétique internationale. Dans le rapport publié cette semaine, le secteur financier, directement pourvoyeur d’un tiers des richesses nationales (bien plus indirectement), est dit « confronté à des risques d’instabilité du fait des bouleversements économiques liés à la transition verte ». Plusieurs canaux de transmission sont détaillés. La capacité des clients à rembourser les prêts, la valeur des garanties et les variations éventuelles de la valorisation des actifs en sont les principaux. Ils ont été modélisés par la CSSF (Commission de surveillance du secteur financier).

La valeur des actifs enregistrée dans les livres comptables doit refléter leur risque climatique inhérent et doit être adaptée au fil du temps. « L’impact est d’autant plus important si l’ajustement est soudain ou si la diversification des portefeuilles est remise en question par la transition », relèvent les experts qui s’appuient notamment sur des travaux réalisés par la Banque centrale de Luxembourg. « Aider le secteur bancaire à relever les défis opérationnels de la prise en compte des risques climatiques exige d’accroître la transparence et d’effectuer un suivi régulier des données », écrivent les auteurs de l’étude. Des problématiques de coût et, par extension, de rentabilité se posent aux différentes entreprises du secteur financier. Une couche de dépenses réglementaires en matière environnementale s’ajoute à celles ayant trait aux impératifs de solvabilité et de lutte contre le blanchiment d’argent qui ont été imposées après la crise des subprimes. Une vague de consolidations (ou de défauts) pourrait s’ensuivre.

L’OCDE souligne en outre que quarante pour cent des prêts bancaires sont exposés à des risques physiques (comme des inondations ou des incendies). C’est le quatrième ratio le plus élevé parmi les pays membres de l’organisation, derrière la Grèce, le Portugal et l’Espagne. Les efforts de labellisation des produits et des activités de la finance entrepris ces dernière années doivent être renforcés pour permettre une diversification plus poussée de l’investissement sous l’angle climatique. « Les écarts entre les données disponibles, les labels et les attentes des investisseurs sont susceptibles d’engendrer des risques de communication et de réputation, ainsi que des risques juridiques », préviennent les économistes.

Au-delà des risques portés par le secteur financier et des bons points accordés au maintien d’un endettement luxembourgeois raisonnable malgré la crise du Covid-19 et celle de l’énergie, l’OCDE critique le financement du recours à l’énergie fossile décidé lors des dernières réunions tripartites. L’organisation, d’idéologie libérale, doute aussi de la pertinence de l’indexation dans un contexte très inflationniste : « Les mesures destinées à amortir le choc de l’inflation sur les revenus devraient être mieux ciblées, limitées dans le temps et ne pas compromettre les incitations à faire des économies d’énergie ». Il eut été préférable de réduire la consommation énergétique. Est-ce possible au paradis de l’automobile ? L’organisation basée à Paris fustige l’étalement urbain du Luxembourg (l’une des plus fortes croissances en la matière parmi les membres de l’OCDE) et la part belle accordée à la voiture individuelle. « Les abattements fiscaux applicables au kilométrage entre le domicile et le travail, ainsi qu’aux véhicules de société, devraient être supprimés et remplacés progressivement par des péages routiers et des restrictions de stationnement pour inciter davantage de personnes à utiliser les services de transports en commun gratuits et en expansion », lit-on dans l’étude où est aussi proposé d’accélérer la taxation carbone et de favoriser la densification des espaces existants (par des aides). pso

Sur les cendres de House 17

Déjà présent aux Rives de Clausen avec le Knokke Out (rebaptisé River House), le groupe belge Tero dirigé par les frères Nicolas et Arthus Lhoist ont repris les activités du club privé House 17 (d’Land, 03.12.2021). « Notre premier établissement est dédié à l’événementiel, il nous manquait un cadre plus business. Quand on a vu que House 17 battait de l’aile, on a sauté sur l’occasion », détaille Nicolas Lhoist vis-à-vis du Land. Une opération qui a nécessité de lourdes tractations avec les quelque 400 actionnaires du club. House 17 SCA ayant accumulé les pertes (autour de deux millions d’euros à la fin de 2021), une réduction du capital social de la société de 2,56 millions à 30 780 euros, par voie d’absorption de pertes, a été actée en septembre dernier lors de l’assemblée générale. Dans la foulée, une augmentation du capital social à 380 820 euros est intervenue, permettant au groupe belge de devenir actionnaire à 99 pour cent de la nouvelle société anonyme. Avant cela, une centaine des anciens actionnaires ont (re)mis la main au portefeuille pour apporter les 300 000 euros d’arriérés de loyer pour « rassurer le bailleur quant à la viabilité du projet », selon les mots de Lhoist. (Le propriétaire des lieux est l’État, le bâtiment a longtemps été occupé par la Justice de Paix). Le groupe a consenti à d’importants investissements (le chiffre de 700 000 euros a été avancé mais n’a pas été confirmé) pour la continuité de l’exploitation et le développement de House 17 à travers un fonds de roulement supplémentaire et un rafraîchissement des lieux. Désormais nommé Tero, House17, le lieu comprend un restaurant ouvert à tous (lire en page 20), cinq salles de séminaire, et une salle d’événements. Le restaurant devrait devenir le moteur tant public que financier et représenter 75 pour cent du chiffre d’affaires de la nouvelle entité. La location de salle atteindrait quinze pour cent et les événements, dix.

Le volet club privé est confié au cercle d’affaires B17 Luxembourg, fusion de B19 (franchise du club belge qui compte 1 500 membres) et de House17. À la tête de cette nouvelle entité, on trouve Nicolas Lhoist, Damien Chasseur (Founder Partner de CBTW Group) et Arnaud Leballeur (actif dans l’événementiel), rejoints par de nouveaux actionnaires, dont John-Alexander Bogaerts (CEO B19 Group), Pierre Thomas (CEO Groupe Eurocom Networks SA), Baptiste Hugon (directeur associé H2A) et Patrick Sermaize (head of wealth management NS Partners Europe). Comptant quelque 120 membres actuellement, B17 espère atteindre les 800 unités dans trois ans, compte tenu de l’absorption des anciens membres de House17. La cotisation annuelle de 750 euros (plus élevée que la belge à 600 euros) donne accès à un programme de conférences, séminaires et événements « dans le domaine du business, du sport et de la culture », à des avantages sur l’utilisation des espaces de réunion et à l’accès aux clubs en Belgique. fc

CQFD

Publié la semaine dernière, l’audit masqué de Greenpeace sur les « produits durables » a rendu très nerveux la place bancaire. À commencer par la Spuerkeess épinglé par l’ONG pour avoir proposé un fonds ordinaire (« Lux Portfolio Growth ») à un des testeurs anonymes qui avait pourtant explicitement demandé à investir dans du durable. La banque d’État se fend d’un mea culpa : Elle serait « very grateful » envers Greenpeace de lui avoir permis de détecter cet « unfortunate error » commise par un de ses employés. Et d’annoncer que son « entire staff » participera à des workshops pour y être formé aux « ESG goals » (critères environnementaux, sociaux et de gouvernance). L’ABBL a répliqué par un communiqué beaucoup moins conciliant. Greenpeace sèmerait « la confusion » et ébranlerait « la confiance du public », accuse le lobby bancaire. C’est que l’ONG se concentrerait uniquement sur la mise en œuvre des Accords de Paris. Or, la règlementation européenne serait un « sujet très vaste », « complexe », « en évolution ». L’ABBL finit par indirectement confirmer le verdict de Greenpeace en admettant que « les produits financiers spécifiquement alignés sur les Accords de Paris ne représentent qu’une proportion très limitée de l’univers des investissements durables ». Les données dont les banques auraient besoin pour développer des produits climato-conformes « ne sont actuellement pas ou peu disponibles ». Dans ce contexte, l’exercice de Greenpeace « ne pouvait rapidement aboutir qu’à une impasse », estime l’ABBL. bt

Vite, un groupe de travail !

L’édito du Land de la semaine passée a fait réagir rue de la Congrégation. Nous écrivions que le ministère des Finances avait « oublié » d’intégrer dans sa loi budgétaire la motion votée en juillet par la majorité parlementaire. Celle-ci appelait à exclure le gaz et le nucléaire des fonds d’investissement bénéficiant d’une réduction de la taxe d’abonnement. Le ministère réplique que « la motion ne propose pas de mesure concrète, mais se limite à inviter le gouvernement à étudier des pistes. Ces travaux d’analyse sont en cours. Un groupe de travail est chargé d’élaborer des propositions concrètes en vue d’une telle révision. Il n’y a donc pas eu d’oubli au niveau du budget. » Un groupe de travail… Nous voici rassurés. En mars déjà, la ministre des Finances, Yuriko Backes (DP), promit de « surveiller de près » le dossier de la taxonomie et d’aviser « le moment venu ». En juin, la question lui parut « de nature hypothétique à ce stade ». En juillet, le ministère communiqua que « plusieurs options sont actuellement à l’étude ». Trois mois plus tard, elles sont toujours à l’étude. (photo : sb) bt

Pierre Sorlut, Bernard Thomas
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