Mister Freeze
Mister Gafi devient Mister Freeze. A paru mardi au Mémorial la nomination du substitut détaché au ministère de la Justice et responsable de la direction de la lutte contre le blanchiment, Michel Turk (photo : sb), au poste de directeur du bureau de gestion des avoirs (BGA), pour une durée de sept ans. Cette instance a été créée par la loi du 22 juin 2022 encadrant la saisie et la confiscation des actifs financiers. Le BGA opère dans le cadre de procédures pénales nationales ou étrangères. Il ne gère pas les avoirs gelés dans le cadre de sanctions internationales, précise Michel Turk depuis Paris où il participe cette semaine à la plénière du Gafi (Groupe d’action financière). pso
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La Ville de Luxembourg réfléchit à « flexibiliser » les règles qui fixent la surface moyenne des unités dans les résidences. C’est ce qu’on apprend dans la version provisoire du Plan d’action local « logement » (PAL) actuellement en préparation (lire page 6). Jusqu’ici, la taille moyenne des appartements pris dans leur ensemble ne devait tomber en-dessous du seuil de 52 mètres carrés. De facto, la Ville interdisait ainsi la construction de résidences composées exclusivement des minuscules studios. Dans la version provisoire du PAL, la Ville écrit que ce règlement traduisait « la volonté de réduire un nombre important de petits logements insalubres qui peuvent être mis sur le marché à des prix proportionnellement élevés ». Or la moyenne de 52 mètres carrés « ne s’avère pas être en concordance avec les règlements de l’État », lit-on dans le même document. La commune songe donc à « une flexibilité de la taille des logements », sans donner plus de précisions. Dans les communes limitrophes, les seuils sont souvent plus élevés. À Sandweiler par exemple, la taille moyenne est ainsi fixée à 80 mètres carrés. En parallèle, la commune de Kehlen veut obliger les promoteurs à prévoir au moins un appartement avec trois chambres à coucher dans leurs futures résidences, ceci afin de créer une alternative pour les familles monoparentales qui ne peuvent plus se payer de maison. bt
De l’État-Arbed à l’État-larbin
Le ministre des Classes moyennes, Lex Delles (DP), a déposé le 15 février dernier pour le compte de la ministre des Finances, Yuriko Backes (DP), un projet de loi budgétant le rachat de cinquante pour cent des parts du futur siège d’ArcelorMittal, un dossier géré par le ministère d’État de Xavier Bettel (DP) depuis 2016. ArcelorMittal avait alors payé 92 millions d’euros pour exercer pendant 75 ans un droit de superficie sur une parcelle du Kirchberg entre la rue du Fort Thüngen et la rue Galileo Galilei. Le géant de l’acier, qui menaçait de déménager son siège, prévoyait d’occuper, avec sa spin off Aperam, soixante pour cent des 36 250 m2 de bureau (selon les plans de l’architecte Wilmotte dévoilés en 2017). Les quarante pour cent restants devaient être loués à des tiers.
En cinq ans, le chantier de cet « emblématique siège » n’a quasiment pas bougé (il devait s’achever en 2021 selon le calendrier initial). Seuls des travaux d’excavation et de terrassement ont été entrepris. Le projet de loi relatif « à l’acquisition de parts dans la copropriété de l’immeuble K22 » estime que les travaux ont été « entamés de manière substantielle » et informe surtout qu’ArcelorMittal avait mandaté l’une de ses filiales pour « rechercher un investisseur », mais « aussi proposé à l’État une option d’achat » pour la moitié des parts. Aucune indication de temps n’est couchée sur papier. Le gouvernement n’avait pas annoncé une quelconque volonté d’investir dans le siège du sidérurgiste y consent dans une année électorale.
Le projet de loi valorise le bâtiment à plus d’un demi-milliard d’euros : 547 millions d’euros exactement. 273,5 millions sont budgétés de la part de l’État, « aux coûts de construction réels à livre ouvert ». Sur base de ce montant, le mètre carré de bureau est valorisé 15 084 euros. Un expert du secteur immobilier nous informe qu’aujourd’hui les loyers mensuels les plus élevés au Kirchberg s’établissent autour de 42 euros le mètre carré, soit 504 à l’année. Un tel prix de marché rapporté au prix du mètre carré de bureau construit selon le budget génèrerait un rendement de 3,34 pour cent… des pourcentages acceptés en 2021, mais pas dans un contexte de crise associée à une augmentation des taux d’intérêt où l’on attendrait presque cinq pour cent pour un immeuble en copropriété (qui entraîne une décote). Si ce rendement avait été pris pour base de départ, le mètre carré de bureau aurait été valorisé un peu au-dessus de 10 000 euros. Le projet de loi prévoit un montant des dépenses autorisées de dix pour cent supérieur au prix d’exercice de l’option d’achat (le droit de superficie est aussi inclus). On y découvre la répartition de la propriété dans l’immeuble. Le sidérurgiste laisse à l’État l’étage au sommet avec sa terrasse privative, mais récupère les cinq étages en dessous dont le quatorzième dotée lui aussi d’un extérieur avec vue. L’auditorium et la cafétéria sont partagés.
Dans un commentaire titré Dem Lakshmi Mittal seng Bréifboîte, publié ce mercredi sur RTL.lu, la journaliste Michèle Sinner fustige la volonté du gouvernement de retenir le sidérurgiste au Grand-Duché avec des valises de billets pour maintenir l’illusion d’un Luxembourg industriel… « Säit der grousser Stolkris marchandéieren Regierung, Staat a Gewerkschaften an der reegelméisseger Geiselnam, déi ee Stoltripartite nennt, Bäihëllefen an Investitioune géint Aarbechtsplazen, fir datt net all Wierker zougemaach ginn », écrit l’éditorialiste. pso
Rolling rolling rolling
Le ministère des Finances a annoncé ce jeudi avoir souscrit un nouvel emprunt de trois milliards d’euros pour « pour étoffer le coussin de liquidités de l’État, en anticipation de l’évolution future des marchés et notamment des taux d’intérêts », informe un communiqué. L’obligation se divise en deux tranches : l’une de 1,25 milliard d’euros d’une maturité de dix ans associée à un coupon annuel de trois pour cent, l’autre de 1,75 milliard sur vingt ans à 3,25 pour cent. Le montant reçu servira d’abord à refinancer la dette nationale avec un remboursement de deux milliards prévu en juillet de cet année. Le milliard en surplus constitue un filet de sécurité. La souscription a rencontré un franc succès avec une mise sur le marché à 9 heures mercredi. À midi, les banques d’affaires avaient reçu plus de dix milliards d’euros de demande, soulignant la confiance du marché en la stabilité des finances nationales. Le dernier emprunt obligataire remonte à mai 2022 : 2,5 milliards d’euros à des taux de 1,375 et 1,75 pour cent. pso
Un forum pour un monde qui change
La Banque européenne d’investissement organise les 27 et 28 février au European Convention Centre Luxembourg sa première conférence « Adapting to a changing world ». Une ribambelle d’éminences d’institutions internationales (comme la vice-présidente de la Commission Margrethe Vestager), d’entrepreneurs (comme un patron de cimenterie) et de personnalités politiques (comme Klaus Iohannis, président de la Roumanie) se succèderont dans une série de panels pour évoquer l’investissement durable et le financement de la transition énergétique. Xavier Bettel et Yuriko Backes seront les principaux représentants de la politique nationale. pso
Delhixembourg
Cette année, on célèbre le 75e anniversaire de l’établissement des relations bilatérales entre l’Inde et le Luxembourg. Jean Asselborn, ministre des Affaires étrangères (LSAP) s’était rendu dans la Péninsule pour un voyage de travail en avril dernier et la « bonne relation » entre Xavier Bettel et Narendra Modi a été soulignée en marge du World Economic Forum de Davos en janvier (d’Land 27.01.2023). En dix ans, la population indienne au Luxembourg a d’ailleurs été multipliée par plus de cinq, passant de 688 personnes en 2012 à 3 777 au 1er janvier 2022. Les ressortissants indiens sont aussi les premiers bénéficiaires de titres de séjour (de plus de trois mois) parmi les pays tiers. C’est ce qu’on peut constater à la lecture des chiffres de la Direction de l’immigration présentés par le ministre cette semaine. Un total de 18 861 de ces titres de séjours ont été émis en 2022. C’est une nette progression, non seulement par rapport aux années passées, mais aussi par rapport à la période pre-Covid, avec 13 242 titres émis en 2019. Avec 2 578 titres, les Indiens sont les plus nombreux, suivis par les Chinois (1 355). La catégorie principale des titres délivrés est celle des « travailleurs salariés » qui, avec 5 605 personnes concernées, n’a jamais été aussi importante puisqu’elle ne concernait que 3 698 titres l’année précédente. Il faut ajouter à ce chiffre les 1 392 bénéficiaires de la « carte bleue européenne », dont 914 nouveaux, qui s’adresse aux « personnes hautement qualifiées », principalement dans des professions pour lesquelles un besoin particulier de travailleurs est constaté par le gouvernement. Un tiers des nouvelles « blue cards » (310) ont été délivrées à des ressortissants indiens, suivis de loin par des Russes (74) et des Américains (66). Les métiers les plus représentés parmi les travailleurs salariés extra-européens nouvellement arrivées sont les spécialistes en administration d’entreprises (1 671 personnes), les spécialistes des technologies de l’information et des communications (742), les spécialistes en sciences techniques (181), ainsi que les métiers qualifiés du bâtiment (125). fc
2035
La Chambre de commerce a publié la semaine dernière son avis sur la réforme de l’impôt foncier ainsi que sur l’introduction de l’impôt à la mobilisation des terrains et de l’impôt national sur la non-occupation des logements (Ifon, Imob et Inol pour les initiés). Bien que globalement positif, l’avis pointe le déphasage entre le temps long de la réforme et l’urgence de la crise du logement. Si le projet était voté le 2 septembre 2023 (hypothèse extrêmement improbable), la loi n’entrera en vigueur qu’en septembre 2026. (La future loi prévoit une entrée en vigueur au 1er du mois de septembre suivant l’accomplissement de 24 mois à compter de sa publication.) L’Imob ne sera perçus qu’à partir du 1er janvier qui suivra. C’est-à-dire, pour en rester à notre cas très hypothétique, en janvier 2027. Sachant que le taux reste coincé à zéro pour cent durant les huit premières années, la première taxe vraie Imob ne sera perçue qu’en 2035… au plus tôt. Ce décalage temporel fait apparaître le projet de loi comme un roman d’anticipation, un essai de science-fiction. La Chambre de commerce espère pourtant un « effet d’annonce psychologique ».
Et pourtant, le projet de loi marque une césure. La Chambre de commerce a raison d’analyser la réforme comme « un transfert de compétences du niveau communal vers l’échelon national ». On pourrait même y voir un début de centralisation en matière urbanistique. Les fonctionnaires patronaux notent, eux, de manière très pudique, « une certaine réticence des communes dans l’usage de ces instruments (optionnels) ». En fait, seules deux communes avaient effectivement levé la taxe d’inoccupation que le Pacte Logement avait mis à disposition de toutes les communes en 2008 (huit l’avaient introduite). Beckerich la fixa à 500 euros par an et par logement, Esch-sur-Sûre à mille euros. L’impôt national sur la non-occupation des logements s’élèvera à 3 000 euros la première année, puis montera en fonction d’un facteur « nombre d’années consécutives de non-occupation » pour atteindre son plafond maximal au bout de la cinquième année.
À la veille des Assises du ministre Kox (lire page 5 ; photo : sb), la chambre patronale a profité de son avis pour y réchauffer le catalogue de revendications des promoteurs. À la fin de ce hors-sujet d’une page et demie, elle introduit une nouvelle mesure fiscale dans le débat : une prime « mobilité-logement » destinée à attirer des « jeunes talents » au pays. Cette prime devrait « permettre l’exonération fiscale des salaires et/ou des primes versés par les employeurs aux jeunes travailleurs afin de couvrir une partie des frais de mobilité durable et des frais de logement à proximité du lieu de travail ». bt