Dans leur nouvel ouvrage Le difficile chemin vers la grande ville, à paraître le 11 novembre aux éditions Guy Binsfeld (300 pages, 59 euros), l’historien Robert L. Philippart et le photographe Christian Aschman portent des regards complémentaires sur l’évolution de la ville de Luxembourg au cours des années 1950 à 1980. Épargnés par les destructions de guerre ou de grands incendies, les nouveaux ensembles bâtis autour de la Ville-Haute après 1867 sont la proie de démolitions volontaires durant cette période où la capitale est devenue siège d’institutions européennes et place financière internationale. L’architecte et urbaniste diplômé, Paul Retter, est souvent considéré comme l’initiateur de la disparition de ce patrimoine et du lancement de nouvelles échelles de construction en plein centre-ville. Cette hypothèse est due au fait que celui-ci a réalisé au moins 86 projets immobiliers dans les quartiers centraux de la ville. De ce fait, ce personnage s’est présenté comme véritable « échantillon d’étude » pour comprendre les enjeux et bouleversements qui ont donné à la ville de Luxembourg un tout nouveau visage. Le Land publie en exclusivité des extraits du livre :
Le personnage et sa vision
[page 10] Né à Bettembourg le 16 septembre 1928 et fils unique de Jean-Pierre Retter, artisan-boulanger, et de Georgette Desom, Paul Retter fréquente l’école primaire de sa ville natale.
[page 11-12] Le jeune Retter fait ses études secondaires en section mathématiques spéciales à l’Athénée de Luxembourg. (…) Le 28 janvier 1954, Paul Retter obtient son diplôme d’architecte auprès de l’École spéciale d’Architecture de Paris et, un an plus tard, le 24 juin 1955, l’Institut d’Urbanisme de l’Université de Paris lui décerne celui en Études spéciales d’Urbanisme. Paul Retter soutient sa thèse d’urbanisme de 1955 intitulée « Les types d’aménagement fonctionnel du territoire luxembourgeois », sous la présidence de Max Sorré, professeur à la Sorbonne.
[page 14] Les voyages entrepris à Rome et à Florence lui donneront pour toujours le goût du monde et il restera jusqu’à sa disparition un infatigable voyageur, allant jusqu’à faire un tour du monde en trois mois en 1961. À l’invitation des industries Chrysler, dont il est devenu le concessionnaire exclusif de la marque au Luxembourg, il fait deux voyages aux États-Unis (1962 et 1964). Un penchant pour l’automobile qui l’amène dans une autre de ses entreprises (le Grand Garage de Luxembourg). Ses voyages lui permettent aussi de réaliser son désir ardent de visiter le grand bureau d’architecture et les équipes de Ludwig Mies Van der Rohe.
[page 15] La carrière de Paul Retter débute avec la construction de plusieurs bungalows à Esch-sur-Alzette et à Bridel, traduisant le désir de vivre à proximité de la nature et de travailler ailleurs. Les origines de la future Société des grandes réalisations immobilières que Paul Retter lancera remontent à 1957 où, déjà sous sa signature, l’entreprise Anselmo Beltrame et Weiwers se met à construire des maisons de rapport « clé en main ».
[page 16] Cette société réalisera des projets immobiliers d’une valeur supérieure au milliard de francs luxembourgeois et offrant plus de mille appartements, surfaces commerciales et de bureaux avec au moins autant de garages.
[page 19] Ayant hérité du goût pour la gastronomie de ses ancêtres, Paul Retter lance également les relais gastronomiques et lieux d’affaires Restaurant Astoria, Restaurant-Bar de l’Empereur et Hôtel Réserve du Mullerthal.
[page 20] Le 17 mai 1980, Paul Retter s’éteint à l’âge de 51 ans (…). La fulgurance de son cancer ne lui permettra pas d’achever ses projets en cours. (…) Le 24 juillet 1980, les 48 associés de la RIL votent la dissolution volontaire de la société et sa liquidation.
[page 13] La vision exprimée par Paul Retter dans sa thèse en 1955 est la « création d’un métropolitain de Diekirch à Rodange aux liaisons ultra-rapides » dans le but de favoriser une première concentration urbaine. […] L’aménagement urbain linéaire (en satellites) confirmerait la puissance commerciale des villes centres. Les habitants des satellites ou « centre urbains ordinaires » ne trouveraient les commerces spécialisés et de luxe que dans la zone spécialisée de la capitale, « ce qui ferait ainsi, et enfin, de Luxembourg, une vraie métropole ».
[page 40] Dans sa thèse, Paul Retter regrettait particulièrement « l’extension de nos villes et villages le long des routes nationales ». […] Comme remède à l’étalement urbain, il prône le regroupement des extensions en des quartiers résidentiels organisés, la réduction de l’extension à une seule couche de quartiers satellites encerclant la ville et l’aménagement des espaces libres entre ces quartiers, dont chacun doit disposer de son propre centre commercial rassemblant les services de proximité pour les résidents. « Il y a lieu, avant tout, de limiter l’extension industrielle et commerciale ; en un mot, il faut préserver le pays d’une urbanisation totale exagérée et dangereuse », écrit Paul Retter dans sa thèse.
Le sacrifice du patrimoine
[page 43] Cette fascination pour détruire et reconstruire ce que la guerre a épargné embrase l’ensemble de la planète, et les villes comme Bruxelles, Luxembourg, Paris ou encore Bonn, appelées à de nouvelles fonctions politiques internationales, subissent encore plus fortement cette pression de s’équiper au mieux pour répondre aux nouveaux besoins. Le Conseil de l’Europe dresse un bilan épouvantable des destructions réalisées en Europe : plus de patrimoine historique aurait ainsi été détruit que pendant toute la Seconde Guerre mondiale, comme si les villes se trouvaient toujours en situation de guerre.
[page 45] À l’époque où travaillait Paul Retter, il y avait certes un éveil pour le patrimoine, mais les notions restaient floues, respectivement ancrées au niveau des « principes » partagés par certaines nations, mais non ratifiés. Les outils législatifs manquent sur le terrain. À Luxembourg, on opère toujours sur base de la loi du 12 août 1927 sur la protection des sites et monuments. […] La nouvelle loi concernant la conservation et la protection des sites et monuments nationaux ne sera votée qu’en juillet 1983, soit plus de trois ans après le décès de Paul Retter. Depuis 1983, la conception du patrimoine s’est fortement élargie incluant le patrimoine immatériel, matériel, naturel et mobilier. Longtemps était considérée comme patrimoine l’architecture religieuse ou féodale, bien antérieure à la Révolution française. Un patrimoine privé de moins de cent ans ne trouvait guère de considération. À une époque de crise sidérurgique on n’imaginait pas encore la notion de patrimoine industriel. L’ère est plutôt à la confiance dans l’avenir, dans le partage d’une architecture universelle.
Construire un monde nouveau
[page 48] Depuis l’apparition des nouveaux matériaux de construction tels que le fer, le verre et le béton, le Luxembourg est très ouvert aux prouesses techniques que procurent notamment ces produits largement issus de sa production sidérurgique.
[page 54] La pensée hygiéniste considère qu’un parc immobilier suranné, mal éclairé, mal aéré et manquant de rationalité est malsain. Cette vision explique les interventions profondes qui ont lieu dans la vieille ville (centre historique), et qui lui ôtent définitivement son authenticité : élargissement de la rue du Fossé en 1932, de la rue du Rost en 1937, suppression de l’îlot St Maximin (place Clairefontaine) en 1935.
[page 62] La Charte d’Athènes sur la planification et la construction des villes […] tient lieu d’autorité à plusieurs générations d’architectes qui doivent agir sous la pression de la reconstruction au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale et de la relance économique. De fait, elle a aussi son influence à Luxembourg et se traduit dans les projets commandés à ou initiés par Paul Retter. La Charte d’Athènes fait l’apologie de la table rase. Concevant la révolution industrielle comme une rupture sans précédent, elle prend acte de l’inadéquation définitive entre ville historique et exigences de la modernité. Elle nie ainsi l’historicité du phénomène urbain.
Les thèmes autour desquels s’organise la ville fonctionnelle de Le Corbusier – séparation des fonctions urbaines (vie, travail, loisirs, déplacements), multiplication des espaces verts, création de prototypes fonctionnels, rationalisation de l’habitat collectif – rassemblent les idées courantes et modernes de l’époque. La ville nouvelle signifie la fin de l’histoire traditionnelle en posant les bases d’une pensée et d’un mode d’aménagement, que l’on croyait définitif, de la ville.
[page 56] Bien que Paul Retter ait conçu au moins 86 projets de construction, ces années de transformation de la ville de Luxembourg sont aussi l’œuvre de plusieurs autres architectes qui ont donné à la capitale du Grand-Duché le visage d’une ville moderne.
[page 67] Les bâtiments de plus de 49 mètres de hauteur situés sur le boulevard Royal […], qui devient le Central Business District de l’agglomération, confirment le zoning urbain et l’embourgeoisement (gentrification) en cours. À la même époque, la pensée architecturale est marquée par la définition que Le Corbusier donne du logement ; il le considère comme « machine à habiter ». Son objectif est d’arriver « à la maison-outil (pratique et suffisamment émouvante) qui se revend ou se reloue ». Ces pensées se retrouvent traduites dans l’architecture de Paul Retter. Elles expriment la conviction de pouvoir réaliser la ville idéale. L’immeuble devient un objet de commerce, produit en série, dont le marketing autour des noms donnés aux résidences et centres administratifs vise à valoriser les propriétaires. Les noms que la Société des grandes réalisations immobilières à Luxembourg a donnés à ses projets rappellent les sites de la Renaissance à Rome ou à Florence, la place Vendôme, les châteaux de Versailles et de Fontainebleau, les noms des empereurs luxembourgeois sur le trône du Saint-Empire. Les noms de « palace » ou « centre » sont réservés aux projets administratifs ou commerciaux. […] L’immeuble est devenu un objet anonyme destiné aux échanges économiques.
[…] La seule liberté laissée à l’individu pour personnifier son lieu de vie est la décoration. La reproduction d’un même type de logement revient à contrôler le comportement humain et à promouvoir un conformisme basé sur le pouvoir d’achat. Cette architecture ne se sert plus des matériaux du terroir, mais des matériaux industriels.
Guerre froide et capitale européenne
[page 72] Luxembourg, se considérant comme le « cœur vert de l’Europe » (occidentale), se définit comme une ville exprimant les valeurs de démocratie et de libéralisme et considère sa situation géographique comme centrale, proche de Paris, Bruxelles, Bonn et Strasbourg. […] En 1955, Paul Retter réfléchit dans sa thèse sur l’exposition du Luxembourg au danger [de la Guerre Froide]. Il évoque l’importance des casemates comme protection contre une guerre atomique.
[page 73] La capitale du Grand-Duché devient, dès le début des travaux de la CECA (Communauté européenne du charbon et de l’acier) le 10 août 1952, le premier lieu de travail des institutions communautaires, et donc la première capitale de l’Europe. Une nouvelle population, habituée aux standards des grandes villes européennes, s’installe à Luxembourg qui ne comptait alors que 61 590 habitants.
[page 84] Si le gouvernement s’était opposé au Traité de fusion des exécutifs des trois Communautés (1965), il y avait fort à parier que Luxembourg allait perdre à terme son rôle de capitale européenne. Suite à d’âpres négociations, souvent périlleuses pour le Luxembourg, le Conseil des ministres du 2 mars 1965 fixe les lieux de travail provisoires des Communautés européennes. Luxembourg voit son statut de siège provisoire d’institutions européennes confirmé au même titre que Bruxelles et Strasbourg. Les réunions du Conseil des ministres se tiennent dorénavant pendant trois mois à Luxembourg. […] Le traité créant les Communautés européennes est signé le 8 avril 1965 à Bruxelles. Il entre en vigueur le 1er juillet 1967.
[page 73] Bien que l’État avait tout intérêt à accueillir les institutions européennes, il semble ne pas avoir été suffisamment préparé le moment venu. Avec la création de la société civile immobilière mixte public-prové Euroffice, Paul Retter cherchait à fournir une réponse rapide au défi. En 1969, quelque 1 750 parts de 100 000 francs chacune sont mises sur le marché pour réaliser le projet Euroffice appelé à loger des services des institutions européennes à Luxembourg. La société immobilière garantit un rendement minimum de 6,5 pour cent aux investisseurs. La prise de location du bâtiment à construire est garantie pour un terme de neuf ans.
[page 78] On se rappelle qu’en 1978, dans le cadre de la « bataille du siège pour accueillir le Parlement européen », mettant en concurrence Bruxelles, Strasbourg et Luxembourg, l’architecte français Roger Taillibert soumet son projet de construction du Centre 300 au Kirchberg.
[page 80] Si en 1950, la place financière avait recensé quatorze établissements financiers, leur nombre est passé en 1980 à 111. Le personnel des banques progresse de moins de 1 500 employés en 1950 à plus de 7 500 en 1980. Le centre économique se déplace du sud du pays vers la capitale : la demande en surfaces de bureaux est fulgurante.
Construire du logement
[page 80] Pendant la période d’activité de Paul Retter (1955-1980), le nombre d’habitants de la capitale augmente de 17 000, ce qui correspond à quelque 6 000 nouveaux ménages ou logements. Il est à noter que ces nouveaux résidents, fonctionnaires européens, agents diplomatiques et agents du monde de la finance sont hautement qualifiés et disposent de revenus suffisants pour s’offrir des logements répondant à leurs exigences. […] Dans la foulée, quelques grands ensembles résidentiels apparaissent, d’une échelle inconnue jusqu’alors au Luxembourg : le Parc de l’Europe à Dommeldange conçu par Peter Neufert, ou celui de Schoettermarial par Roland Baldauff, Fernand Bintner et Will Erpelding en 1969.
Le nombre important de résidences que construit Paul Retter dans la Ville-Haute et dans les quartiers résidentiels apporte, sur le marché privé, une contribution propre à répondre à cette demande et qui accompagne le développement de la ville.
Le plan d’aménagement de Pierre Vago
[page 84] Le projet d’aménagement de la ville de Luxembourg réalisé d’après les travaux préparatoires de Pierre Vago prévoit une capacité de croissance de la ville, sans extension de son périmètre jusqu’à 130 000 habitants. Au moment de la remise de son rapport au conseil communal en 1966, la ville comptait 77 055 âmes.
[page 87] Pierre Vago (1910-2002) n’est pas un inconnu dans les milieux d’affaires luxembourgeois, car il a été associé aux travaux de construction de la maison Mayrisch-de Saint-Hubert à Cabris en 1941-1943. Comme président de l’Union internationale des architectes, il a longtemps suivi les préceptes d’Auguste Perret et critiqué certains points des théories de Le Corbusier. Au lendemain de la guerre, il reconstruit et aménage les villes sinistrées d’Arles, de Tarascon, de Beaucaire et du Mans. Comme architecte, il travaille en Algérie et en Tunisie. Il réalise la bibliothèque universitaire à Bonn et le campus universitaire à Lille. […] Dans ses conceptions, il place les questions d’esthétique et de style au second plan, derrière la résolution des contraintes techniques et de programme.
[page 40] Vago détermine le périmètre d’urbanisation de la capitale avec le souci d’arrêter le développement tentaculaire de l’agglomération, de favoriser l’équipement des zones mortes entre les tentacules existants, de contenir la ville à l’intérieur des principales voies de contournement, dont le tracé définitif n’est pas encore arrêté à l’époque, et d’éviter la jonction avec les communes voisines.
[page 88] Les secteurs centraux du plan Vago représentent le Central business district où il faut concentrer l’emploi et, par-là, le pouvoir d’achat au plus grand profit du commerce y établi depuis longtemps.
[page 87] Toutefois, il ne faut pas considérer que Vago soit indifférent au patrimoine. Dans son plan d’aménagement, il prévoit sept zones spécifiques, dont les « secteurs et monuments protégés ». Représentant un « capital légué par le passé » et « à mettre en valeur », ces secteurs regroupent la vieille ville, le secteur du parc, le Grund, le plateau du Rham, Clausen, Pfaffenthal, Siechenhof, une partie du boulevard de la Pétrusse, la section de l’avenue M arie-Thérèse entre le boulevard Royal et le boulevard Prince Henri. C’est la première fois dans l’histoire urbaine de la ville que de tels périmètres sont fixés.
[page 101] Lorsqu’en 1976, Paul Retter soumet des plans pour remplacer l’ancien Hôtel de Paris sur la place de Paris, le Syndicat des intérêts locaux et les Scouts du Sacré-Cœur organisent une véritable levée de boucliers. 4 000 personnes signent la pétition qui veut empêcher la démolition de l’ensemble architectural que constitue l’avenue de la Liberté. En 1978, le ministre des Affaires culturelles inscrit la propriété à l’inventaire supplémentaire des sites et monuments nationaux protégés.
[page 105] En 1975, dans le cadre de l’Année européenne du patrimoine architectural et à l’initiative de l’éditeur François Mersch et de Paul Retter, un nouvel emplacement pour accueillir la statue de la patronne de la ville et du pays est désigné. En 1973, la statue de la Vierge est enlevée de son emplacement au carrefour rue des Bains/avenue de la Porte-Neuve dans le cadre de la démolition de l’ancien Hôtel Gaisser par Paul Retter. En 1975, ce même architecte va joindre, côté avenue de la Porte-Neuve, un portique au Forum Royal pour y installer la statue de la Vierge.
[page 92] Il ne faut pas perdre de vue quelques éléments qui, à l’époque, bloquent la disponibilité des terrains, […] à commencer par le plan Pierre Vago lui-même, dont le processus d’adoption exige le traitement des réclamations. Tant que le Conseil d’État ne donne pas son aval et que le plan d’aménagement n’est pas approuvé, les différentes zones de développement sont gérées suivant les anciennes normes. Par ailleurs, la Ville est également contrariée par le plan Setec de l’Administration des ponts et chaussées. La Société d’études techniques et économiques (Setec) est chargée des analyses et orientations futures de la voirie nationale sur l’ensemble du territoire de la ville. […] L’État, pour sa part, n’a pas à l’époque décidé de la façon d’urbaniser le Kirchberg.
[page 93] En 1986, la Ville de Luxembourg charge Robert Joly de l’établissement d’un nouveau plan d’aménagement et de la rédaction d’un nouveau règlement des bâtisses. Le plan Joly est adopté en 1991 et reste en vigueur jusqu’en 2017.
Art patrimoine et architecture
[page 110] Les architectes luxembourgeois cités associent des artistes du mouvement abstrait des Iconomaques à leurs projets de construction. Leurs œuvres servent à les embellir ponctuellement de mosaïques, de vitraux en verre de béton, de sculptures fixées sur un pan de mur ou placées sur un parvis. Paul Retter charge l’artiste François Gillen de la confection de plusieurs mosaïques destinées à décorer les édifices qu’il construit […].
[page 112] Il est à noter que Paul Retter dessine les lambris des halls d’entrée de ses résidences, conçoit les motifs et choisit les matériaux de décoration des façades et crée les motifs des balustrades des balcons. […] Le Bar de l’Empereur est décoré d’un papier peint panoramique représentant une gravure ancienne de la forteresse. Une douzaine de tableaux du peintre français expressionniste Michel-Marie Poulain (1906-1991) décorent les murs.
[page 117] L’étude de l’axe de vue est une autre caractéristique de l’architecture de Paul Retter. L’architecte et urbaniste ne se contente pas d’offrir à ses clients les meilleurs emplacements de l’espace central de la ville ; bon nombre de ses appartements et bureaux offrent des vues prestigieuses sur des lieux emblématiques de la ville, si bien que leur intérieur (du bâtiment) fusionne avec l’extérieur, l’espace public.
Des idées nouvelles
[page 162] En 1956, le projet du cinéma Le Paris à Bettembourg présente une conception nouvelle et jusque-là unique au Luxembourg. C’est la première fois qu’une salle de projection n’est plus présentée avec une référence à l’ancienne architecture des théâtres classiques, mais qu’elle fait partie d’un regroupement de plusieurs services au sein d’un même projet immobilier : galerie marchande, fournil industriel de boulangerie, appartements, cinéma.
[page 168] Le Centre Bourse, inauguré en octobre 1969, offre une cour commerciale, alors que, jusque-là, des passages commerciaux étroits et peu accueillants avaient été réalisés tant rue Philippe II que rue des Capucins. C’est un genre nouveau, jusque-là inexistant, réservé exclusivement aux piétons, alors qu’on est à dix ans de la décision de l’aménagement d’une zone piétonne.
[page 172] [Forum Royal :] Parallèlement, Paul Retter met à profit le recul imposé pour aménager une esplanade donnant de trois côtés sur des magasins et restaurants installés sur deux niveaux. […] Alors que naissent les projets de grandes surfaces à Strassen et à Bertrange, Retter agrandit l’offre commerciale de la Ville-Haute (…). Par rapport à 1966, la surface commerciale de la Ville-Haute a progressé de douze pour cent !
[page 181] Le projet de l’hôtel de la Réserve du Mullerthal est un des rares projets d’envergure que Retter construit à la campagne. […] Il s’agit d’un hôtel de luxe avec télévisions couleurs dans les chambres, trois bars, deux restaurants, dont un de cuisine diététique, piscine chauffée jour et nuit, sauna, cures Kneipp et récréation thérapeutique, jeux de quilles et salles de relaxation. […] Jusque dans les années 1990, la Réserve du Mullerthal est l’unique hôtel de campagne à offrir une piscine couverte et un espace sauna.
[page 186] Au niveau du résidentiel, il faut souligner la conception, en 1973, du Domaine de Beauregard, rue des Sports. […] La nouveauté est la conception, dans le cadre de cette résidence, d’un espace dédié à la santé […] Sauna, bains glacés, bassin de natation, gymnase, massage, solarium, salles de relaxation, cafétéria, physio-kinésithérapie, fangothérapie, hydrothérapie Kneipp, ergométrie, piscine de rééducation et bains hydroélectriques sont proposés tant aux résidents qu’aux visiteurs.