« De Pitt, d’Josette oder de Jhemp »

d'Lëtzebuerger Land vom 22.08.2025

 

En 1977, l’ancien (et futur passé) Premier ministre, Pierre Werner (CSV), craignait un renforcement des « tendances à un capitalisme d’État » : Il ne faudrait « laisser s’accumuler au fil des années l’immense main morte de participations de l’État dans l’économie ». En 2000, la Chambre de commerce recommandait encore un « désengagement progressif » de l’État. Depuis le sauvetage des banques et le « socialisme pandémique », de telles revendications sont devenues plus rares. Dans une réponse à une question parlementaire, le ministre des Finances, Gilles Roth (CSV), liste ce mercredi les participations étatiques (qu’on peut également consulter sur le site de la Trésorerie de l’État). On y retrouve notamment des mastodontes internationaux comme BNP Paribas (1,12%) et Arcelor-Mittal (1,52% ; photo : juin 2023, lors de la pose de la première pierre du futur siège), les banques systémiques BGL (34%) et BIL (10%), ou les champions nationaux SES et Cargolux. Ces participations, rappelle Gilles Roth, auraient été prises « pour des raisons stratégiques et non pas à titre d’investissement », souvent dans un contexte de crise, parfois pour « stimuler » le développement de nouvelles niches. À moins que ce ne soit simplement pour gérer des infrastructures et services publics.

Ces dernières années, le débat a surtout porté sur les nombreux mandats dans les conseils d’administration, occupés par des fonctionnaires méritants qui arrondissent ainsi leurs fins de mois. (Quelques happy few réussissent même à doubler leur traitement.) Ces mandats sont très convoités. En 2023, l’ancien opening manager du Freeport, David Arendt, appelait à libérer les hauts fonctionnaires de leurs conflits d’intérêts qui ne seraient « pas sains », en les remplaçant par des « personnes qualifiées recrutées directement par l’entité ». Même son de cloche chez Marc Niederkorn, directeur éphémère de la SNCI (octobre 2022 à juillet 2023), qui plaidait dans le Land pour des administrateurs capables de discuter « op Anhéicht » avec les CEO et les CFO. Et de raconter que lorsqu’il demandait pourquoi l’État était toujours actionnaire de telle ou telle société, on lui aurait parfois répondu : « Ah, ça c’est politique... » Ce que Niederkorn traduisait par : « Well de Pitt, d’Josette oder de Jhemp do am Conseil sëtzt an Tantieme kasséiert. » 

Bernard Thomas
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