La Kohlekommission, mise en place pour dégager un consensus de sortie du charbon en Allemagne, a adopté fin janvier une date bien trop éloignée – 2038 – pour fermer la dernière centrale outre-Moselle. En outre, elle a prévu pour leurs exploitants des compensations d’une générosité surprenante compte tenu des dégâts qu’ils ont déjà infligés à la planète. Les mouvements environnementaux se sont élevés contre ce compromis invraisemblablement favorable aux énergies fossiles et parfaitement incompatible avec les engagements climatiques de l’Allemagne. En autorisant le démarrage samedi dernier d’une nouvelle centrale au charbon, Datteln 4, au nord de Dortmund, le gouvernement allemand foule aux pieds non seulement ses engagements, mais les conclusions de la Kohlekommission elle-même, qui a expressément recommandé de ne pas mettre en service les centrales au charbon en construction.
Les militants engagés pour la sauvegarde du climat ont protesté, à Datteln et un peu partout en Allemagne, contre ce démarrage inepte, promettant de ne pas lâcher prise. Dirk Jansen, directeur pour la Rhénanie du Nord-Westphalie du BUND, a évoqué « une journée noire pour la protection du climat » et dénoncé une centrale qui va émettre 40 millions de tonnes de CO2 d’ici 2038. Son adjoint a fustigé la pollution atmosphérique locale qu’elle va causer et l’illégalité de l’octroi de son permis de construire.
Pratiquement à l’unisson, le gouvernement et Uniper, l’opérateur de cette installation d’un autre temps, ont déroulé leurs éléments de langage : moderne et efficace, la centrale émet moins que les usines équivalentes plus anciennes (un gain de l’ordre de treize pour cent), et quatre autres centrales au charbon vont être ou ont déjà été fermées grâce à elle, ont-ils insisté. Ce ne sont évidemment que des feuilles de vigne, et, de la part du gouvernement d’Angela Merkel, une capitulation en rase campagne face au chantage des énergéticiens.
Les activistes sont également sur les dents face à l’intention prêtée à Uniper de créer un terminal de gaz liquide sur le littoral allemand, à Wilhelmshaven ; de telles installations seraient aussi envisagées à l’embouchure de l’Elbe, à Stade et Brunsbüttel.
Une partition similaire pourrait être jouée pour tenter de tirer de l’ornière les constructeurs automobiles. Même si les sociaux-démocrates semblent aujourd’hui s’en détourner et que les citoyens semblent préférer de loin une prime à la mobilité, la coalition flirte depuis quelques semaines avec une prime à la casse (« Abwrackprämie ») qui favoriserait l’achat de voitures neuves dotées de moteurs à explosion, y compris par exemple les BMW série 5 et Mercedes classe E. Au lieu d’enfourcher la crise sanitaire pour agir résolument en faveur du climat, le gouvernement allemand s’enferre dans la surenchère fossile, préférant soutenir des projets et des dispositifs chers et aux antipodes de ce qu’impose l’urgence climatique. Décarboner, c’est autre chose.