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éditorial
« Spaass »
Bernard Thomas
La radicalisation de l’AMMD n’est pas sans rappeler celle de l’UEL sous Michel Reckinger. L’effet pourrait être le même, à savoir contreproductif. Les revendications maximalistes du lobby médical lui ont d’ores et déjà coûté beaucoup de capital politique et ne facilitent pas la tâche de ses alliés au DP et au CSV. À la Quadripartite d’octobre, le président de l’AMMD a évoqué « e staarkt Mandat » qu’il aurait reçu de la part des membres pour résilier la convention : « Just fënnef vun 300 hunn dogéint gestëmmt. » (L’AMMD revendique « plus de 1 350 membres » sur un total de quelque 3 000 médecins.) Mais le vote à main levé un soir d’automne au Parc Hotel Alvisse soulève quelques questions. Ce mandat couvre-t-il une revendication comme l’« autonomie tarifaire » censée inciter, comme l’écrit l’AMMD, les assureurs privés « à prendre leurs responsabilités pour compléter les prises en charge des patients » ? Et qu’en est-il du revirement sur la présence d’investisseurs tiers dans les sociétés de médecins (l’AMMD y est désormais favorable) qui bute sur l’opposition des médecins généralistes. Le cours ultra-libéral des dirigeants de l’AMMD ressemble de plus en plus à un coup de force. Et les fissures au sein du corps médical deviennent de plus en plus béantes.
Les Conseils médicaux de quatre hôpitaux sont passés à la contre-offensive samedi dernier, en publiant une tribune dans le Wort. D’entrée, ils soulignent représenter « plus de mille médecins hospitaliers ». Puis de rappeler quelques principes comme « un prix des soins identique pour tous, une couverture uniforme et une égalité de traitement entre patients. » Les hôpitaux craignent être saignés par la logique de l’outsourcing poussée par l’AMMD et le gouvernement : « Nous observons avec inquiétude la tendance, dans plusieurs pays européens, à externaliser vers le secteur privé les activités dites ‘low risk’ et à forte rentabilité, tout en laissant aux hôpitaux les prises en charge lourdes, complexes et coûteuses ».
Après un long mutisme, l’Union des syndicats a également pris la parole cette semaine. Le secteur hospitalier et ses 10 000 salariés, couverts par « une des conventions collectives les plus importantes et les plus fortes au Luxembourg », constituent le nouveau bastion de l’OGBL. Dans une lettre envoyée au Premier ministre, le duo Dury-Back accuse la ministre de la Santé, Martine Deprez (CSV), de préparer la voie à une « privatisation du domaine de la santé », en voulant ouvrir « coûte que coûte » les soins ambulatoires au secteur libéral. La ministre néophyte n’est pas à envier. Le CEO Frieden l’a chargée de réaliser une promesse centrale de l’accord de coalition, celle « d’accroître considérablement » les soins ambulatoires. Il a rappelé la consigne sur RTL-Radio : Davantage d’antennes « ausserhalb vun de Spideeler, lassgeléist vun de Spideeler », et ceci asap. La ministre assure maintenir le cap. Mais dans la pratique, elle temporise et freine. Au point d’apparaître comme une alliée objective des hôpitaux et des syndicats. Elle trace deux lignes rouges : maintien de la médecine conventionnée et pas d’investisseurs tiers des sociétés de médecins. Pour le reste, la ministre se garde de déclarations politiques. Ce lundi, devant la commission parlementaire, elle a timidement esquissé plusieurs pistes : De telles structures « plus légères » pourraient être créées « par un hôpital ou par des médecins hospitaliers qui gardent un pied dans l’hôpital ». Elle dit miser sur des discussions qu’elle veut « vertrauensvoll ». Il faudrait encore « élaborer les conditons » et « fixer le cadre », explique-t-elle ce mercredi sur Radio 100,7. Le journaliste veut savoir si la politique lui plaît toujours. « Et mécht ëmmer méi Spaass », répond la ministre.
Le projet Findel Clinic cristallise, de manière presque caricaturale, la confluence d’intérêts entre anciens responsables de l’AMMD et milieux financiers et immobiliers. L’opposition s’en donne à cœur-joie. Ce jeudi sur RTL-Radio, le député Déi Lénk Marc Baum dénonce une vision « dystopique » de l’AMMD. À la commission parlementaire le socialiste Mars Di Bartolomeo pointe les « liaisons dangereuses » : « Est-ce que c’est un projet médical dans lequel il y a des investisseurs, ou un projet d’investissement immobilier dans lequel il y a des médecins ? Ech muss soen, datt mir déi zwou Saachen net schmaachen. » Les députés de la majorité restaient largement silencieux. Le chef de fraction CSV, Marc Spautz, a laissé transparaître qu’il n’était pas un grand fan du projet, rappelant que le terme de « clinique » était protégé par la loi. La ministre s’est de nouveau cachée derrière une argumentation formaliste. D’après les statuts déposés, il s’agirait d’une société immobilière (ou de facility management) plutôt que médicale. Bref, il faudrait voir. En cas de souci déontologique, on pourrait toujours s’adresser au Collège médical, a-t-elle expliqué ce lundi aux députés. Deux jours plus tard sur Radio 100,7, elle a glissé avoir rencontré une première fois le Dr Philippe Wilmes lors des négociations de coalition (où celui-ci représentait le DP)
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