La performance art consiste en une création artistique réalisée à travers des actions menées par un artiste ou d’autres participants. Ces actions peuvent être spontanées, planifiées, exécutées en direct ou consignées, et elles sont destinées à être présentées à un public dans un contexte artistique. Souvent ce genre d’expression fait fusionner l’identité de l’artiste avec son œuvre, remettant en question la distinction conventionnelle entre l’artiste et son travail, ainsi que la nature marchande des formes artistiques traditionnelles. Parfois appelée « action artistique », elle a évolué en tant que genre autonome au sein de l’art, jouant un rôle central dans les mouvements avant-gardistes du vingtième siècle.
Dans une performance, on distingue des éléments fondamentaux tels que le temps, l’espace, la présence physique du corps de l’artiste. On distingue aussi la dynamique entre la créatrice ou le créateur et le public. Les actions peuvent se dérouler n’importe où, une galerie d’art, un musée, dans la rue ou tout autre environnement. Elles ont pour but de susciter une réaction, souvent par le biais de l’improvisation et de la mise en scène artistique. Les thèmes abordés sont généralement liés à la vie de l’artiste, à une critique sociale, politique ou à la transformation. Les performances peuvent être uniques ou répétées, structurées ou laissées à l’imprévu, et elles peuvent être le fruit de préparations minutieuses avec des protocoles ou d’actes spontanés.
Le terme « performance » tire son origine de l’expression « performance art », qui évoque l’idée d’un art en direct. Bien que les termes « performance » et « art de la performance » aient été adoptés dans ces années 1970, l’histoire de la performance dans les arts visuels remonte aux productions futuristes et aux cabarets dès les années 1910. On peut remonter les sources à divers mouvements artistiques tels que le dadaïsme et l’Internationale Situationniste ainsi qu’à des artistes comme Antonin Artaud ou Valeska Gert, au début du vingtième siècle, même si leur travail artistique respectif part de la danse et du théâtre, l’expressionnisme allemand dans lequel s’est inscrite Gert, par exemple, esquisse déjà cette forme qui peut s’apparenter à la performance art d’aujourd’hui.
Cependant ce « performance art » a été progressivement défini comme un genre distinct dans les années 1970, surtout aux États-Unis, avec entre autres, Allan Kaprow. Inspiré par ses maîtres (John Cage et Marcel Duchamp) et par les diverses tendances de l’école de New York, Kaprow rejette toute idée reçue en lien avec l’art, il efface ainsi les frontières entre art et non-art et crée le « happening », une œuvre d’art en devenir, qu’on qualifiera de performance art, plus tard.
Auprès de ses représentants, il s’agit d’échapper à la répétition et à la structure d’une œuvre traditionnelle. Des artistes pionnières et pionniers tels que Carolee Schneemann, Laurie Anderson, Marina Abramovic, Ana Mendieta, Tehching « Sam » Hsieh, Marta Minujín, Chris Burden pour ne citez qu’eux, ont jeté les bases de cette forme d’art. Aujourd’hui, des artistes comme Tania Bruguera, Orlan ou Abel Azcona continuent de repousser les limites de la performance.
L’art performance se caractérise par sa nature éphémère, ne laissant généralement que des images ou des souvenirs comme traces. Tino Sehgal, par exemple, artiste contemporain, préfère que ses œuvres soient éphémères, ne vivant que dans la mémoire des spectateurs.
Même si certaines performances s’inspirent du théâtre, elles sont souvent axées sur le devenir plutôt que sur une narration linéaire. C’est le processus qui compte ici. La performance art exploite le temps et l’espace, contrairement au théâtre qui offre un temps fictionnel. Pour la performance art, les éléments théâtraux sont réutilisés dans un contexte différent, rappelant la distanciation de Bertolt Brecht.
La performance art englobe diverses disciplines artistiques, brouillant les lignes entre celles-ci. Il peut également s’inspirer de domaines variés tels que la cuisine, le sexe, la technologie ou même des activités économiques, comme le montrent par exemple les œuvres d’Orlan et de Cosey Fanni Tutti, membre entre autre de Throbbing Gristle.
La performance est souvent une expression artistique risquée et en direct, impliquant le public et la sphère privée. Elle est vue comme une interaction immédiate avec les spectateurs. Elle découle parfois d’une composition préétablie, d’un protocole précis, mais sa nature éphémère remet en question la commercialisation traditionnelle de l’art. Beaucoup d’oeuvres féministes et néo-féministes existent ou ont existé sous la forme de la performance art.
Des artistes femmes contemporaines comme comme Marina Abramovic, Sigalit Landau, Esther Ferrer, Amal Kenawy ou encore Pippa Bacca ont toutes travaillé avec leur propre corps, pour toucher l’intellect et déconstruire des mythes patriarcaux, mais aussi les symboles les aliénants, telle que la robe de mariée.
Ainsi, l’artiste italienne Pippa Bacca, lors de son ultime performance, Sposa in viaggio, voyageait en robe de mariée pour « rejouer » le voyage vers Jérusalem dans une autre optique, celle de la paix. Une partie de son protocole a été de faire le voyage en auto-stop. Elle a été violée et assassinée en 2008 en Turquie après être montée dans la voiture du dernier chauffeur.
Mais qu’en est-il au Luxembourg ? Une brève recherche sur Internet permet de constater qu’il y a un problème de notion. Dans les annonces de spectacles des arts de la scène, pour un plus large public, l’art performance signifie aussi bien le théâtre, l’opéra que la danse, parfois même un concert, surtout dans sa traduction anglaise. Il est vrai que les formes d’art s’associent ou se télescopent au Luxembourg comme ailleurs, mais les performances art engagent certains codes ou repères (protocole pré-établi, interaction avec le public, sujets personnels, intimes, mais aussi sociétaux et politiques) ainsi qu’un certain degré de risque ou de métamodernisme. Il paraît en tous cas nécessaire que cette forme d’art particulière fasse ici aussi l’objet d’un certain état des lieux et d’une précision de définition.
Le constat est simple : Il y a un amalgame au niveau de la notion mais, une fois définie, il y a de plus en plus de performances, le Mudam en programme et en produit de manière régulière désormais, avec un programme spécifique organisé par Joel Valabraga. La dernière performance art en date fut présentée à l’Hémicycle, intitulée Forecast (LX23) de Ari Benjamin Meyers avec la brillante performeuse, Laura Eichten. Une performance art sur les dérives du monde en somme, empruntée d’une puissance apparentée à celle des textes et mises en scène de Sarah Kane, mais dans une nouvelle liberté, celle de la performance art, justement.
Le Casino d’art contemporain propose des performances depuis des années, faisant un peu l’histoire, le Casino Display présente des artistes émergents qui incluent à leurs recherches, la performance art. Il y an encore d’autres lieux culturels ici qui offrent parfois de l’espace et les moyens pour la performance art, mais actuellement c’est le cas aussi de la Konschthal et le Bridderhaus. Christian Mosar et son équipe proposent également des d’artistes pour lesquels la performance art fait partie de leur corps de travail.
Refléter cet état de lieux et continuer à réfléchir à ce qu’est la performance art et dans quels courants de pensées elle s’inscrit aussi au Luxembourg et puis observer certaines et certains de ses représentants ou initiatrices et initiateurs sera l’objet d’un article suivant, ici mêmes.