La tentative de faire capoter la confirmation par le Congrès de l’élection de Joe Biden à la présidence a fait long feu, elle n’en a pas moins démontré à quel point la société américaine est gangrenée et menacée par le fascisme. Ces tendances fascistes cohabitent avec les forces, minoritaires mais hyper-actives et généreusement subventionnées, qui nient la réalité de la crise climatique, quand elles ne se confondent pas avec elles.
Au moment où des hordes fanatisées par l’histrion occupant la Maison Blanche tentaient d’assassiner le vice-président et des parlementaires, l’administration Trump procédait à l’adjudication d’une partie du Refuge faunique national arctique (ANWR) sur la rive nord-est de l’Alaska à des fins de forages pétroliers. On pourra se consoler en constatant que cette opération a fait un flop, seule l’agence de développement de l’État s’étant portée acquéreuse de lots.
Il n’en reste pas moins que la coïncidence entre la mise à sac du Capitole et cette adjudication climaticide est révélatrice de la profonde convergence entre les courants ultra-réactionnaires et racistes, d’une part, et ceux qui cherchent par tous les moyens à empêcher l’action climatique et la transition vers les énergies renouvelables de l’autre. S’appuyant sur une ou plusieurs des innombrables thèses farfelues qui tentent de démonter le robuste corpus de la science climatique, cette quête, qui a beau sembler condamnée à disparaître, a déjà à son actif des décennies de retard dans la prise en compte du péril climatique.
Ainsi, du Capitole à l’Arctique, on voit poindre un risque sérieux de surenchère fasciste liée directement à la montée en puissance de la crise climatique. Sur Earther, dans un article intitulé « La crise climatique, des stéroïdes pour le fascisme », Brian Khan évoque un épisode survenu lors d’incendies de forêt qui ont frappé l’Oregon, dans des régions habitées majoritairement par des Blancs, durant l’été 2020. Des milices d’extrême-droite avaient diffusé des thèses conspirationnistes à leur sujet et en avaient profité pour prendre le contrôle de la région, installant des barrages et menaçant les journalistes, sans rencontrer de résistance sérieuse de la part des policiers locaux.
Lorsque des extrêmes climatiques s’abattent sur des régions habitées plutôt par des populations noires, de couleur ou indigènes, les miliciens sont là aussi, avançant des affirmations écofascistes éculées selon lesquelles les comportements de ces minorités seraient à l’origine de ces catastrophes. Le diagramme de Venn de ceux qui encouragent le refus des résultats électoraux et de ceux qui nient le changement climatique « coïncide presque parfaitement », relève Kahn. Et il cite Emily Atkin, autrice de la newsletter Heated, pour qui le tragique épisode du 6 janvier démontre que toute politique climatique sérieuse passe par un renforcement de la démocratie. Vaste programme, qui vaut pour les États-Unis mais tout autant pour le reste du monde.