« Un jugement historique », entend-on dans le Journal de RTL Télé vendredi. Dans la matinée, la Cour internationale de justice a reçu la plainte sud-africaine contre Israël pour génocide. Dans une ordonnance intermédiaire avant de statuer sur le fond, le principal organe judiciaire des Nations unies enjoint Israël de prendre toutes les mesures nécessaires pour ne pas commettre, et prévenir tout risque, de génocide dans son action militaire sur la bande de Gaza. Est aussi demandé à l’État hébreu de favoriser l’aide humanitaire. La CIJ publie un décompte morbide de 25 700 Palestiniens tués, 63 000 autres blessés, 360 000 logements touchés et environ 1,7 million de personnes déplacées à l’intérieur du territoire de Gaza, lequel compte 2,3 millions d’habitants. « 93 pour cent de la population de Gaza — proportion sans précédent — atteint des taux de famine critiques, car la nourriture est insuffisante et les niveaux de malnutrition sont élevés », écrivent encore les juges.
Le reportage de RTL dure trente secondes. Celui consacré à l’incendie de la mairie de Junglinster, 3 minutes 30. Dans le Wort, une dépêche DPA de quelques lignes est placée au bas d’une page internationale, une colonne associée à une photo de décombres à Gaza. En filet juste à côté, une dizaine de lignes relevant la possible implication de « plusieurs » salariés de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, UNRWA, dans les attaques du Hamas sur le territoire israélien le 7 octobre. 1 200 personnes ont été tuées ce jour-là et 240 prises en otages. Le principal quotidien du pays est résolument tourné vers Junglinster où, heureusement, aucun blessé n’est à déplorer.
Dans un communiqué diffusé dans les minutes qui ont suivi le jugement de la CIJ, le parti Déi Lénk a pris la mesure de l’événement : « Il y a un risque de génocide dans la bande de Gaza. Même le juge israélien ad hoc a confirmé ce risque. » Le parti de la gauche invite le gouvernement à respecter son obligation de prévenir tout génocide et à « enquêter pour savoir si des résidents ou des citoyens luxembourgeois participent à d’éventuels crimes de génocide dans la bande de Gaza ». Pour Déi Lénk le terme « génocide ne doit plus être tabou » lorsque la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza est évoquée, y compris « dans les prises de parole de nos responsables politiques ».
Ce lundi, le Comité pour une paix juste au Proche-Orient (CPJPO) a diffusé une lettre envoyée à la Fédération luxembourgeoise de Handball. Au cours des matches opposant le Grand-Duché à Israël les 17 et 18 janvier, des personnes voulant sensibiliser au drame humanitaire à Gaza se sont fait confisquer leurs drapeaux palestiniens et leur banderole « Boycott Israël ». Le CPJPO s’étonne que la Fédération de Handball (FLH) ait donné instruction d’interdire les autres drapeaux que ceux des nations jouant sur le terrain. « Les risques d’émeutes n’ont pas leur place dans le handball ou le sport en général. Ils ont été minimisés et toute déclaration politique a été interdite. Cela s’appliquait également à la délégation israélienne », répond la FLH aux questions du Land. Pas de politique dans les stades ? Le CPJPO rétorque que les fédérations sportives européennes ont interdit dès 2022 à la Russie de participer à leurs compétitions. Selon des témoignages collectés par le CPJPO, des gardes israéliens armés ont intimidé des spectateurs-militants. « Nous n’avons pas connaissance d’hommes armés dans les tribunes ! », répond le porte-parole et vice-président de la FLH, Eric Ewald.
Cette semaine, les États-Unis, l’Allemagne, l’Autriche et le Japon, quelques-uns des principaux donateurs de l’UNRWA ont annoncé suspendre leur financement à cette organisation employant 13 000 personnes à Gaza, majoritairement palestiniennes (30 000 dans la région). Douze d’entre elles auraient participé aux attaques du 7 octobre, selon les renseignements israéliens. Le Luxembourg maintient ses engagements envers l’UNRWA, au-moins dans l’attente des résultats de l’enquête, comme l’a soutenu le ministre des Affaires étrangères à la Chambre mardi : « On ne peut pas condamner tout l’organisation. Croyez-moi, sans eux, le désastre serait plus grand encore », a martelé Xavier Bettel. En ce début de semaine, un éditorialiste de Haaretz réagit à la participation de membres du gouvernement israélien à une conférence sur la colonisation de Gaza et à leurs prises de position : « the right is demanding the ethnic cleansing of the Gaza Strip, the expulsion of its Palestinian population and the establishment of Jewish settlements in place of the Palestinian cities and villages that the military has destroyed ».