Wolser, série noire
L’annonce du ministre de l’Économie, Franz Fayot (LSAP), que Guardian investira plusieurs dizaines de millions à Bascharage pour y « consolider l’ensemble de ses activités de production » dans un « centre d’excellence» a fait des malheureux à Dudelange. Car la nouvelle confirmait qu’après le four à fusion (photo : Misch Pautsch), le laminoir du producteur de verre allait à son tour fermer. Le député-maire socialiste, Dan Biancalana, s’est donc fendu d’un passage dans la matinale de RTL-Radio pour prier son camarade de parti, Franz Fayot, de « ne pas oublier le Wirtschaftsstanduert de Dudelange » lors de ses futures missions économiques. Après le micmac interministériel autour de Fage et la fermeture définitive de Guardian, la zone industrielle « Wolser » connaît actuellement une série noire. Le pronostic vital de Liberty Steel, la voisine de Guardian, reste engagé, suite à l’écroulement du château de cartes qui avait permis à financer son rachat. bt
Prime éco pour Koch Industries
Le producteur de verre plat Guardian maintient une production industrielle au Grand-Duché. C’est ce qu’a annoncé ce lundi le ministre de l’Économie, Franz Fayot (LSAP), heureux de pouvoir enfin partager une bonne nouvelle. Le groupe américain a promis d’investir dans un nouveau four à verre « à la pointe du progrès technologique et environnemental » qui devrait être bâti en 2022 sur le site de Bascharage et être opérationnel dès 2023. Le montant de cet investissement n’a pas été précisé, mais devrait avoisiner les cent millions d’euros. Le four sera en partie financé par l’État luxembourgeois (via « une aide à l’investissement en faveur de la protection de l’environnement »), mais, de nouveau, aucun chiffre concret n’a été nommé. Invité sur Radio 100,7, le directeur de la fabrique, Bernard Gheysen, a évoqué ce mercredi « une bonne participation » de l’État, mais dont le montant serait « du domaine de la confidentialité ».
Après le refroidissement du four de Dudelange en juin dernier, qui avait entraîné 120 départs « volontaires », soixante départs à la retraite anticipée et vingt non-renouvellements de CDD, les syndicats craignaient pour la survie du dernier site de Guardian à Bascharage. Car le four atteint, là aussi, sa fin de vie. L’investissement assurera un avenir au site pour les quinze à vingt prochaines années. Un four de fusion, qui transforme du sable en verre et dont les dimensions correspondent à peu près à celles d’une piscine olympique, tourne 24 heures sur 24 et 365 jours par an. Il produit 600 tonnes de verre flottant par jour. L’ancien four de Dudelange engloutissait 4 500 mètres cubes de gaz par heure. Un « footprint » énorme. Le nouveau four, « à la pointe de la technologie », émettrait 19 pour cent moins de CO2 que l’ancien modèle.
Dans un rapport publié en 2014, l’Agence européenne pour l’environnement avait classé Guardian au premier rang des entreprises les plus polluantes du Luxembourg. Entre 2008 et 2012, les usines de Dudelange et de Bascharage auraient causé entre 140 et 380 millions d’euros (selon la méthode de calcul que l’on retient) en dommages sanitaires et environnementaux. En 2017, suite aux pressions du ministère de l’Environnement, Guardian avait fini par installer de nouveaux filtres à Dudelange, évidemment subventionnés par l’État. Guardian fait partie de la galaxie « Koch Industries », dont les propriétaires, Charles Koch et son frère David (décédé en 2019), comptent depuis le début des années 1990 parmi les principaux financiers du négationnisme climatique. bt
Recitificatif
Les candidats à la direction de la Bibliothèque nationale ont seulement passé un entretien psychologique, et non également un test psychologique (annulé à cause du Covid), comme nous l’écrivions dans la précédente édition (« Verwicklert »). bt
L’Iran, combattant de la souveraineté luxembourgeoise
Le tribunal de commerce a accédé le 30 avril à la demande de la Banque centrale iranienne pour que restent bloqués chez Clearstream les milliards de dollars qui lui appartiennent et que revendiquent les victimes américaines d’attentats (au Liban en 1983 et à New York en 2001) depuis 2012 au titre de réparations d’une prétendue implication de l’Iran. Avec le National Defense Authorization Act for fiscal year 2020, le Sénat américain a voté un texte qui confèrerait en principe le droit pour ces victimes de piocher leur dû dans les comptes d’entités étrangères sans exequatur des jugements américains. Ce que Clearstream n’empêcherait guère pour préserver ses bonnes relations avec l’Oncle Sam. Dans le dernier épisode de ce feuilleton judiciaire joué pour partie au Grand-Duché, la justice luxembourgeoise a donc rappelé la nécessité d’obtenir localement la reconnaissance des décisions de justice américaines. En mars 2019, la chambre civile du tribunal avait rejeté une première demande d’exequatur. Par voie de communiqué, BSP, le cabinet représentant les intérêts de la Banque centrale de la République islamique d’Iran souligne cette semaine que son client offre l’opportunité aux cours luxembourgeoises de « réaffirmer leur souveraineté nationale ». pso
Barreau endeuillé
Olivier Poelmans, avocat chez Clifford Chance, est décédé cette semaine des suites d’un accident de la route. Le quotidien L’Avenir rapporte qu’il a été percuté par une voiture alors qu’il circulait en trottinette électrique à Arlon. Contactée, la bâtonnière dit le barreau, « sous le choc ». Valérie Dupong rappelle qu’Olivier Poelmans a été membre du Conseil de l’Ordre sous les bâtonnats de René Diederich, Rosario Grasso et François Prüm de 2013 à 1018. Il venait d’être nommé à la présidence de la toute nouvelle commission « droit civil » du barreau. Il enseignait à l’Université du Luxembourg et avait écrit un ouvrage de référence sur le droit des obligations, « une vraie bible », commente Valérie Dupong. « Il laissera un grand vide », conclut-elle. pso
Prisme financier
D’éminents chercheurs d’universités américaines brisent le prisme des paradis fiscaux dans les flux financiers internationaux. Dans The Global Capital Allocation Project, Antonio Coppola (Harvard), Matteo Maggiori (Stanford), Brent Neiman (Chicago Booth School of Business) et Jesse Schreger (Columbia) exposent à quelles économies les paradis fiscaux tels que les Pays-Bas, le Luxembourg ou l’Irlande (pour ne citer que les trois principaux) sont le plus liés en termes de financements. Les maison-mères utilisent régulièrement les tax havens pour lever des fonds, qu’il s’agisse d’obligations ou d’actions, relève le quatuor. Sur le site interactif mis en ligne par les universitaires, l’on peut ainsi découvrir que le Luxembourg est le deuxième pays émetteur d’obligations en volume avec 535 milliards de dollars levés en 2017. Les entités à l’origine des émissions sont principalement originaires des États-Unis (74,3 milliards), d’Allemagne (69,9), d’Italie (56,9), de Suisse (50,7), du Royaume-Uni (47,6) et de Russie (45,3). À noter que 45,9 milliards des 46 milliards des émissions supranationales sont cotées au Grand-Duché. Le Luxembourg n’apparaît pas dans la matrice des equities où les Îles Caïmans se paient la part du lion grâce au placement des capitaux chinois. pso
« Place de Strasbourg numéro 2 »
Le magnat de l’immobilier Flavio Becca, promoteur du quartier Cloche d’Or, évoque dans le Wort cette semaine sa volonté d’installer un « un boucher et un boulanger » au pied de ses tours en construction le long du boulevard Raiffeisen. Face au Land, l’entrepreneur souhaite une « place de Strasbourg numéro 2 » avec des commerces de proximité et de bouche type « Thym&Citron ». Interrogé, sur l’éventuelle installation d’une boucherie Emo, distributeur des abattoirs Cobolux dont il est actionnaire, Flavio Becca pense que « ce serait une bonne idée ». pso
Un déficit normal
Les comptes 2020 de la Commission de surveillance du secteur financier (photo : sb) parus cette semaine au mémorial révèlent une perte significative pour le régulateur : treize millions d’euros. Elle tient notamment à une explosion de ses frais de personnel, à 113 millions d’euros, soit quinze pour cent de plus qu’en 2019 (99 millions d’euros) … un coût qui grimpe pour faire appliquer les réglementations qui vont croissant également. À revenu constant (autour de 124 millions d’euros), la CSSF avait signé un déficit de cinq millions d’euros. Elle dégageait encore des profits en 2018 (quinze millions), 2017 (cinq millions) et 2016 (3 millions), ces deux dernières années ayant été maigrelettes en termes de chiffre d’affaires, principalement composé des taxes perçues sur les entités surveillées… alors que 2017 a été un excellent millésime en matière de sanctions avec 18 millions d’euros collectés.
Contacté par le Land, le porte-parole de la CSSF explique que le résultat négatif tient du fait que l’institution travaille « sur la base de cycles budgétaires pluriannuels dans une optique de couverture de ses dépenses sur plusieurs années ». « Il n’y a pas péril en la demeure et le mouvement observé est le même à chaque fin de cycle », répond-on route d’Arlon. La CSSF souligne en outre qu’elle investit dans des technologies de type intelligence artificielle pour accéder à des gains de productivité. pso