Ticker du 13 octobre 2023

d'Lëtzebuerger Land vom 13.10.2023

Appel d’air

Après le blocage de l’aéroport opéré par le personnel de Luxair Cargo fin septembre et le rendez-vous entre les syndicats et la direction de la compagnie aérienne lundi, cette dernière a décidé d’éclaircir les zones d’ombres sur l’avenir des 1 200 salariés de sa filiale déchargeant les avions de fret au Findel. Dans un courrier envoyé ce jeudi aux salariés, le directeur général Gilles Feith informe que Luxair a postulé à l’appel d’offres ouvert par Lux-Airport au début de l’année pour fournir des services d’assistance en escale aux passagers des compagnies aériennes tierces atterrissant à Luxembourg. La décision sera rendue en janvier de l’année prochaine. En mai, Luxair n’a en revanche pas postulé à l’appel à candidatures pour le ground handling Cargo, un service qu’elle preste pourtant avec sa filiale cargo et qui emploie quasiment la moitié de ses équipes. Cargolux s’est, elle, aligné dans l’appel d’offres. L’attribution du marché est prévue pour le 31 octobre. « En cas de sélection de Luxcargo Handling (la société ad hoc mise en place par Cargolux, ndlr), Luxair fera le nécessaire pour mener à bien le transfert de la branche d’activité Luxair Cargo en application des dispositions légales », écrit le directeur général. Le transfert devrait intervenir entre mars et juillet 2024. Tous les salariés de Luxair Cargo sont concernés. Les conventions collectives de travail de Luxair arrivent à échéance au 31 décembre, mais sont reconduites. « La Direction de Luxair n’a pas l’intention de dénoncer ces conventions et les syndicats ont fait une demande de pourparlers pour le renouvellement des dites conventions », fait savoir Gilles Feith dans un exercice de transparence qui a tardé, on comprend, pour ne pas laisser croire à la Commission européenne que le marché est vicié. pso

Banque en deuil

A paru dans le Wort samedi dernier l’annonce du décès, le 28 septembre à 87 ans, de Bob Reckinger, grand nom de la banque au Luxembourg et de la Banque de Luxembourg. « Il a marqué notre banque par son leadership engagé et visionnaire, ainsi que ses valeurs humanistes. Sous son impulsion la banque a connu un développement déterminant tant en termes de notoriété que de croissance », lit-on dans l’hommage rendu par l’emblématique établissement sur le Boulevard Royal.

Bob Reckinger (photo : BDL) est l’un des trois dirigeants que la banque a connus depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Il avait pris la direction du Crédit industriel d’Alsace et de Lorraine (Cial) en 1967 au décès de son père Marcel, lui-même directeur de l’établissement créé en 1920 (en tant que filiale de la Banque d’Alsace et de Lorraine) pour soutenir le développement industriel du Grand-Duché et de la Grande-Région. Avec le rachat de Banque Mathieu Frères en 1969, l’établissement a élargi son offre vers la banque privée. Rebaptisé Banque de Luxembourg en 1977, cette filiale de gestion patrimoniale (existant en parallèle du Cial avant la fusion intervenue en 1988) s’étoffe concomitamment au centre financier dans les années 1980. Puis l’entité fusionnée se développe dans l’activité fonds d’investissement (avec Fund Market) dans les années 1990. Au départ de Bob Reckinger de la direction opérationnelle en 2000 (et la nomination de Pierre Ahlborn au poste d’administrateur délégué, toujours actif), Banque de Luxembourg est le sixième établissement bancaire du Luxembourg (qui en compte environ 200) en volume de dépôts. La banque (dont l’actionnaire est dorénavant Crédit Mutuel-CIC), précédemment logée Grand Rue, trône alors dans son écrin résolument moderne sur le boulevard Royal (inauguré en 1994), un vœu de Bob Reckinger, féru d’architecture. Bob Reckinger occupait en outre des fonctions au sein d’associations professionnelles du secteur financier et avait été l’une des chevilles ouvrières de la création en 1996 de European Fund Administration. L’intéressé, actif dans la philanthropie, rejoindra ensuite le conseil d’administration de la fondation du Lëtzebuerger Land (de 2004 à 2015). Siège aujourd’hui au conseil d’administration de Banque de Luxembourg le neveu de Bob Reckinger, Pit, bâtonnier et associé du cabinet Elvinger Hoss Prussen (aux côtés de Philippe Hoss, avocat, Georges Lentz Jr, brasseur, Carine Feipel, avocat ou encore Cosita Delvaux, notaire). pso

L’évadé débouté

L’ancien espion aujourd’hui en fuite, Frank Schneider, risque de ne pas réapparaitre de sitôt. Le recours déposé devant le Conseil d’État français par l’ancien numéro trois du Srel, accusé aux États-Unis d’avoir participé à l’escroquerie OneCoin, a été rejeté mardi. « M. Schneider n’est pas fondé à demander l’annulation pour excès de pouvoir du décret du 15 février 2023 accordant son extradition aux autorités américaines », lit-on dans la décision du 10 octobre. Selon les informations de 100,7, Frank Schneider, 53 ans, s’est débarrassé de son bracelet électronique et est recherché par les autorités françaises depuis le 16 mai. Contacté le mois dernier par le Land, le parquet de Nancy confirmait que le résident luxembourgeois de Joudreville (à la frontière luxembourgeoise) était toujours en fuite. Frank Schneider a quitté le Srel en 2008 pour fonder Sandstone, société de renseignement privé. La justice américaine soupçonne Frank Scheider d’avoir été, entre 2014 et 2019, l’un des cerveaux d’une arnaque à la cryptomonnaie. Entre cinq et quinze milliards de dollars auraient été détournés. Il a été arrêté par la police française en avril 2021, emprisonné à Nancy puis placé sous résidence surveillée dans sa résidence française. Tous les recours contre son extradition aux États-Unis, où il risque jusqu’à quarante ans de prison, ont été épuisés sauf un éventuel pourvoi devant la Cour européenne des droits de l’Homme. pso

FNCTTFELOGBL

Ce samedi, lors d’un congrès extraordinaire, le FNCTTFEL s’est dissout dans l’OGBL. Le vote était unanime. Au bout de 114 ans d’existence, le syndicat des cheminots cesse ainsi d’exister comme structure autonome. Le Landesverband devient le seizième syndicat au sein de l’OGBL (à côté de ceux du commerce, de l’industrie, de la sidérurgie, etc.), rassemblant toutes les entreprises sur rails (CFL, CFL-Cargo, Luxtram), tandis que les employés du TICE sont intégrés dans le « syndicat services publics ». En 1978, le comité exécutif du Landesverband avait lancé une première tentative d’intégrer l’OGBL nouvellement constitué ; mais ses membres s’y opposèrent à 87 pour cent sous le slogan « Mir wëlle bléiwe wat mir sinn ». En 2023, la fusion se fait par nécessité, faute d’alternatives. Face à une carence de cadres et une base vieillissante, les cheminots préfèrent se raccrocher à l’appareil et au savoir-faire de l’autoproclamé « syndicat n°1 » et de sa centaine de permanents.

Chapeautée par l’ex-président Nico Wennmacher, éminence grise du syndicat, l’intégration s’est faite « step by step » à partir de 2018. D’une « coopération intensifiée » on est passé à une intégration « provisoire » qui est donc devenue « définitive » ce week-end. La date de l’intégration a été avancée à cause des élections sociales de mars 2024, pour permettre aux votants de « savoir pour quel syndicat ils vont voter ». Alors que le Landesverband se dissout dans l’OGBL, l’autre syndicat (minoritaire) des cheminots Syprolux se repositionne sur une base strictement corporatiste, s’occupant des seuls « cheminots statutaires ». (Le syndicat a par contre réactivé son contrat de coopération avec le LCGB.)

Dans le paysage syndical luxembourgeois, le Landesverband était un phénomène atypique. Dans les années 1970 à 2000, le syndicat était un terrain plus ouvert à l’extrême-gauche que ne l’était alors l’OGBL, au fonctionnement très centralisé. L’ex-député Justin Turpel (Déi Lénk) et l’encore-ministre François Bausch (Déi Gréng) sont les deux exemples les plus connus de trotskistes issus du Landesverband. En 2005, le Landesverband était le seul syndicat luxembourgeois à appeler à voter « non » au référendum sur la Constitution européenne. Mais la présidence de Jean-Claude Thümmel en 2015 vira vite au psychodrame avec la vieille garde socialiste. Celle-ci finit par virer ce cheminot gauchiste (ainsi que son vice-président et son secrétaire général) au bout de deux ans, sur fond de querelles personnelles.

Le mariage entre le Landesverband et l’OGBL se fait sans la dot. La question du patrimoine immobilier (conséquent) du Landesverband reste irrésolue pour l’instant. Celui-ci continue à être bunkérisé au sein de la Coopérative Casino syndical Luxembourg, une structure distincte, contrôlée par les anciens cadres (tous des pensionnaires) du syndicat. Elle détient des grands immeubles à Bonnevoie et à Hamm (loués à Cactus et à Yoyo), ainsi que quelques appartements. Ce qui lui garantit une belle rente locative ; le chiffre d’affaires net s’est élevé à 1,15 million d’euros en 2022. La Coopérative détient également 17 pour cent des parts d’Editpress, un investissement moins lucratif. bt

Fortuna en liquidation

Des députés CSV s’étaient inquiétés à la Chambre de déposants de la banque Fortuna qui peinaient à récupérer leurs économies après l’annonce en août 2022 de la cessation d’activité de cette petite coopérative bancaire luxembourgeoise. La Commission de surveillance du secteur financier a annoncé ce jeudi que la banque a été placée en liquidation. « Aujourd’hui, les processus opérationnels mis en place par Fortuna Banque ne permettent plus d’assurer l’adéquation temporelle entre les rentrées de fonds – liées aux remboursements des quelques crédits restant à l’actif – et les sorties de flux – liés aux frais opérationnels et remboursements de dépôts », écrit le régulateur. Un liquidateur doit donc intervenir. pso

Pierre Sorlut, Bernard Thomas
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