Les communales 2011

La fête des maires

d'Lëtzebuerger Land vom 07.10.2011

Une semaine après la fête des pères, c’est des maires qu’il nous est demandé de nous occuper. Dimanche dernier, les papas ont reçu des bricolages préparés à l’école. Dimanche prochain, ce sera leur tour de faire des gribouillis dans des petits ronds, pour distribuer leurs voix.

À la capitale plus qu’ailleurs peut-être, le vote des étrangers risque d’être déterminant. Comment choisir quand on ne connaît pas spécialement les personnes figurant sur les listes et qu’on n’a prêté qu’une attention distraite à l’austère analytischer Bericht déposé tous les trois mois dans sa boîte aux lettres ? Deux options : se fier à la tête des candidats ou lire leur programme.

Question physique, soyons honnêtes, la politique locale manque de Bunga bunga, de Carla et de DSK. On imagine que les visages et les noms placardés au bord des routes servent à créer la proximité, la confiance. Mais à moins de se dire « ça alors, c’est ma boulangère ! », ils inspirent surtout l’indifférence. Dommage, quand on s’aperçoit que, plus que voter pour un programme, on nous demande de partager nos suffrages entre des individus, à qui l’on peut choisir d’attribuer deux voix (j’en aurais bien donné 27 à ma boulangère, mais ce n’est pas possible).

Question programme, malheureusement, les différences sont assez subtiles, si on fait abstraction des folkloriques communistes – qui n’arrivent même pas à présenter 27 candidats dans la capitale – et de l’ADR – dont le programme pour tout le pays semble se limiter, en plus de la défense de l’idéal luxembourgeois, à la promotion d’un métro, curieusement rebaptisé City Tunnel. D’ailleurs, à la place de l’ADR, quitte à renvoyer les mendiants, les étrangers et les importuns chez eux, je proposerais plutôt une catapulte pour éjecter directement les problèmes de l’autre côté de la frontière.

À ces curiosités près, donc, le pays semble condamné à une éternelle tiédeur. Grosso modo, tout le monde est d’accord pour que les priorités des communes se portent sur les enfants, les familles et les personnes âgées. L’unanimité se fait autour d’une ville qui inclurait les handicapés, pour une politique sociale, un soutien à la création artistique, un environnement sain, la mobilité pour tous. Halte à la spéculation immobilière, aux grandes surfaces de bureau et de commerce et priorité à la construction de nouvelles habitations abordables. Plus de places dans les crèches et les foyers. Il faut une démocratie renforcée au niveau local.

Dans la vie de tous les jours, comment se traduiraient ces grands principes ? L’affectation des rotondes permet d’affirmer quelque peu son orientation. Le tarif du wifi municipal, le prix des taxis et la composition des menus des cantines scolaires semblent les ultimes questions dignes du débat public.

Et quand on se plaît à découvrir de réelles différences de projets de société entre un programme qui souhaite la création d’une police municipale alors qu’un autre remet en cause la généralisation de la vidéo-surveillance... c’est pour s’apercevoir que les deux partis en question ont formé la coalition qui a dirigé ensemble la ville ces six dernières années !

Enfin, l’hypocrisie est bien partagée : d’une part, la proposition qui vise à « décentraliser les structures sociales », autrement dit, installer des lieux pour mendiants et toxicomanes dans d’autres villes (il faudrait vérifier dans quelles communes des candidats se proposent de les accueillir). D’autre part, les écologistes vantent le projet « ban de Gasperich » comme le futur plus grand parc de la ville, oubliant au passage que ce sera également le plus grand centre commercial et, l’avenir le dira, peut-être une nouvelle source d’embouteillages.

Du coup, on relativise le crédit porté aux questions d’urbanisme, qui sont les dernières à pouvoir éveiller un intérêt émoussé. L’ajout d’un nouvel ascenseur public, la création d’une piscine découverte à Kockelscheuer, d’une piste de skate dans la Pétrusse ou l’extension d’un P+R.

Reste une dernière proposition, surprenante, mais qui répond certainement à une aspiration locale : le cimetière boisé.

Car voilà le projet d’avenir que nous proposent de partager plusieurs partis : avoir l’opportunité de finir nos jours dans les sous-bois plutôt que six pieds sous terre. Dans une caisse en sapin sous les futaies de hêtres plutôt qu’à manger les pissenlits par la racine. Ambiance Blair Witch. Beau programme !

Cyril B.
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