Grèce

Kalorisiko Europe

d'Lëtzebuerger Land vom 15.06.2012

Nous les suivons quotidiennement, la crise européenne et, dans ce contexte, plus tout à fait au rang des faits divers, le drame grec.

Nul besoin d’énumérer les interviews, commentaires et documentaires qui informent tant bien que mal les divers sauvetages, adaptations, garanties et parapluies.

Nulle intention de minimiser les efforts et les engagements, notamment politiques, qui nous permettent de « sauver » les membres de l’Union européenne et probablement aussi l’euro tout court.

Certains y comprendront une injustice majeure qui consiste à pomper l’argent du contribuable dans des banques qui serviront des dividendes aux profiteurs de la débâcle financière en cours.

D’autres loueront les possibilités du marché intérieur européen et le comportement de solidarité dans ce contexte.

Nous tous attendons avec quelques appréhensions les résultats du deuxième essai grec de constituer un parlement et un gouvernement. On nous fait comprendre, ici à l’Ouest, qu’on espère qu’une grande coalition comprenant les deux partis politiques traditionnels arrivera finalement au gouvernement. Ces deux grands partis, ou doit-on dire dynasties, qui sont essentiellement responsables, et ce à plusieurs niveaux, de ce qui se passe aujourd’hui en Grèce. Ces deux partis qui règnent depuis des décennies, bien qu’en alternance, et qui se sont comportés, également en alternance, de manière irresponsable. Irresponsables en favorisant les privilèges, en promouvant des comportements qui rappellent ceux de la corruption. Ces deux partis qui ont finalement décisivement fait perdre toute confiance aux institutions politiques, et ce pas uniquement en Grèce.

Or, la Grèce n’est pas un nouveau membre émergeant, comparable à la Bulgarie ou la Roumanie. De fortes relations à plusieurs niveaux d’intérêts lient la Grèce aux autres pays membres, le peuple grec aux autres peuples. Comment imaginer la compatibilité de ces relations avec une indifférence certaine aux comportements de survie du peuple grec ? Certains trouveront insoutenable que 30 000 ménages se sont vus couper l’électricité cet hiver. Insoutenable que des médicaments vitaux manquent de la pharmacie aux hôpitaux. Insoutenable que des parents déposent leurs enfants dans des villages d’enfants, faute de pouvoir les nourrir. Insoutenable que les élèves n’ont pas reçu de livres scolaires. La dimension humaine de ce drame financier grec est énorme, insoutenable.

Il est évident que l’actuel plan d’austérité ôte le souffle de vie au peuple grec. Il ne suffit pas d’espérer la victoire des deux partis responsables de cette misère. Quid des autres partis tels les écologistes ou le parti centre gauche Dimar, mais certainement aussi les radicaux de gauche Siriza ? Pour sûr qu’ils ne feront pas pire que leurs prédécesseurs, et ils trouveront des alliés, notamment en France et au sein de l’opposition allemande pour renégocier ce plan d’austérité et faire valoir une stratégie de croissance.

Comment accepter le plan B d’ores et déjà finalisé supposant la sortie de la Grèce au moins de la zone euro ? On nous dit que les deux pour cent du produit intérieur brut européen que représente la Grèce ne valent pas la peine de prendre des risques supplémentaires.

À côté des thèmes touchant le volet financier, le monde politique omet un volet des plus importants afin de soutenir durablement la pérennité du rêve européen.

La génération de jeunes adultes croyait au rêve européen ; ils ont pu s’exercer en tant que citoyens européens. Des jeunes qui ont découvert d’autres cultures, qui ont échangé des coutumes, fait des connaissances, ont voyagé et habité dans différents pays.

Pour cette génération tout fut possible ; non pas au niveau financier, mais au niveau humain. Vivre en communauté à l’échelle européenne, voilà ce qu’était le rêve européen. Ne plus jamais revivre le déchirement qu’ont dû subir leurs grands-parents.

Le danger de ne guère considérer l’aspect humain dans ce que nous appelons « la solidarité » dans le contexte de « sauvetage financier » est gravement négligé.

On le regrettera …

L’auteure est députée de déi Gréng
Viviane Loschetter
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