En 2014, le réalisateur Destin Daniel Cretton s’était fait remarquer pour son deuxième long-métrage Short term 12, suivant le travail d’éducateurs dans un centre pour jeunes en difficulté. Ayant reçu des nombreuses distinctions autour du globe, y compris une mention spéciale du jury jeune au Luxembourg City Film Festival, le film révéla à la fois un cinéaste pourvu d’une grande sensibilité pour ses personnages et une actrice à l’époque encore peu connue, Brie Larson. Depuis, cette dernière a joué dans de nombreuses productions et s’est vue décerner l’Oscar de la meilleure actrice pour Room (Lenny Abrahamson, 2015).
The glass castle fait rentrer Destin Daniel Cretton à son tour dans la cour des grands avec à ses côtés la compagnie de production et de distribution Lionsgate et son actrice fétiche Brie Larson. Elle n’est d’ailleurs pas la seule grosse pointure à l’affiche de ce drame familial, qui comprend également Naomi Watts et Woody Harrelson. Adapté des mémoires de l’ancienne chroniqueuse Jeanette Walls (Brie Larson), devenue autrice à plein temps, le film raconte à travers des flash-backs une enfance difficile marquée par un père alcoolique et une mère irresponsable, ayant tous les deux une idée très particulière de l’éducation de leurs enfants.
Bon narrateur, cultivé et inventif, Rex Walls (Harrelson) a également un côté colérique, intimidant et cruel, infligeant de nombreux traumatismes à son fils et ses trois filles dont l’une, Jeanette, tente tout, dans la mesure de son âge, pour le raisonner. Mais l’homme, qui promet à Jeanette de lui construire un château en verre un jour, n’arrive jamais à garder un travail, se cachant sans cesse derrière un discours anti-matérialiste qui l’arrange bien. Son épouse Rose Mary (Watts) se rend bien compte des abus quotidiens mais ne trouve pas la force de lui résister. En grandissant, les enfants, qui n’ont jamais été scolarisés et se sont formés à travers les livres que leur mère leur a donnés, se rendent compte qu’ils devront prendre leur destin dans leurs propres mains à la première occasion.
Avec davantage de moyens, l’adaptation d’un bestseller et une certaine obligation de rendement, la pression et les attentes pour le réalisateur n’étaient évidemment plus les mêmes. Le réalisme social de Short term 12 a fait place à un certain classicisme formel n’allant pas jusqu’au bout dans la laideur des choses. Pour ceux qui arrivent à outrepasser ces teintures de cheveux et ces fausses rides un peu surfaites, The glass castle réserve malgré tout une confrontation permanente avec des ambiguïtés morales. Combien de choses peut-on pardonner à ses parents anti-conformistes, dont les intentions et les actes sont souvent diamétralement opposés ? En tant que spectateur on n’adhère pas forcément à l’indulgence finale de Jeanette, qui est pourtant fidèle à la réalité. Mais The glass castle est loin de laisser indifférent, un fait largement dû également aux acteurs, qui réussissent à recréer ces allers-retours constants entre espoir et dépression, joie et frayeur, vécus au quotidien par quatre enfants. Et une fois de plus, Destin Daniel Cretton nous révèle une actrice extraordinaire, la jeune Ella Anderson, interprétant Jeanette à l’âge de douze ans.