Les coalitions entre chrétiens-démocrates et Verts hantent les conversations politiques en République fédérale depuis des années. Le résultat des élections régionales dans le Land de Rhénanie-du-Nord-Westphalie fait que cette configuration, inédite à Düsseldorf, est désormais en voie d’y être testée pour de vrai. Forts de leur participation au gouvernement fédéral, les Verts abordent les pourparlers exploratoires avec la CDU régionale en position quelque peu plus avantageuse que ne le suggèrent les scores obtenus par les deux partis lors du scrutin du mois dernier (39 sièges à la Diète du Land pour les premiers, 76 pour les seconds). Pour autant, le mariage s’annonce difficile, car loin d’avoir pris conscience de l’urgence climatique et des transformations sociétales qu’elle impose, le parti chrétien a réagi à son écartement du pouvoir à Berlin en se droitisant fortement. Quant aux Verts, même si leur gosier s’est déjà considérablement élargi pour accommoder les couleuvres que leur font avaler leurs partenaires fédéraux sociaux-démocrates et libéraux, ils se préparent à des compromis, notamment sur les charbonnages, qui font d’ores et déjà d’eux les nouvelles têtes de Turc des militants allemands pour le climat.
Annonçant la couleur des renoncements à venir, Felix Banaszak, membre du Bundestag et président des Verts rhénans, a déclaré dans une interview au quotidien Rheinische Post que « la limite du 1,5 degré ne passe pas par Lützerath ». « Ähm, doch », a réagi du tac au tac Fridays for Future Germany.
En cause, un hameau au sud de Mönchengladbach censé céder la place à une extension de la mine de charbon à ciel ouvert de Garzweiler. Or, les mouvements écologistes ont explicitement relié la préservation de Lützerath au respect de la limite du réchauffement planétaire de 1,5 degré entérinée par pratiquement tous les pays du monde dans l’Accord de Paris. Ils ont, faut-il le dire, la science pour eux. Continuer de creuser des terres arables pour en extraire du lignite est rigoureusement incompatible avec la préservation d’un climat terrestre viable.
Banaszak explique que la limite de 1,5 degré est un « symbole fort », mais qu’« atteindre nos objectifs climatiques se fera moins par les symboles que par de la politique réelle et par des modifications de structures ». La concession obtenue de la CDU ? Mille éoliennes au cours des cinq prochaines années, des panneaux photovoltaïques partout où c’est possible, une offensive sur les pompes à chaleur. Quant au hameau qu’il se prépare à abandonner aux bulldozers, il explique que tous les recours ont été épuisés.
C’est un scandale en soi : qu’un leader vert ose qualifier de « symbole » l’objectif de limite du réchauffement ancré dans l’Accord de Paris montre que ni à Düsseldorf, ni à Berlin, les alarmes climatiques ne sonnent assez fort.