Après Solas (1999), Habana Blues (2005), La voz dormida (2011) et Intemperie (2019), Benito Zambrano est de retour en salle avec Pan de limón con semillas de amapola, traduit pour le marché international en Lemon and Poppy Seed Cake. Un film coproduit au Luxembourg Deal Productions qui sort en salle le 1er juin. Le film suit Marina, une Espagnole dans la quarantaine, aussi brillante qu’anticonformiste. Une femme à la fois forte et froide qui traîne un bagage un peu plus lourd que la moyenne. Au point qu’elle n’a plus vu sa sœur, Anna, depuis quatorze ans et qu’elle repousse de manière régulière les propositions de mariage de son compagnon, Mathias. Installée au Sénégal, où elle est gynécologue dans un centre pour femmes sans ressource, elle doit se résoudre à rentrer chez elle, dans un petit bourg sur l’île de Majorque, pour une histoire de famille. Un héritage inattendu de la part d’une inconnue qui fait d’Anna et de Marina, les nouvelles propriétaires de la boulangerie du village.
Une fois sur place, c’est un jeu de pistes étonnant qui commence. Alors qu’Anna a besoin de l’argent pour rattraper la mauvaise passe financière son mari, Marina a surtout besoin de comprendre. Qui est donc cette femme qui leur a laissé cet héritage ? Qu’est-ce qui la lie à elles ? Ce retour à la maison est l’occasion de rebâtir des ponts, se rapprocher de sa sœur et de faire la connaissance de sa nièce adolescente et rebelle. Ce qui l’amène à prolonger le séjour. Seule ombre au tableau ; juste avant de rentrer, elle mis au monde une petite fille dont la mère est morte à la maternité. Marina s’est prise d’affection pour le bébé au point de décider de l’adopter. Pour cela, elle va devoir doit retourner au Sénégal et épouser Mathias au plus vite, selon les lois sénégalaises.
Commence alors un va-et-vient de sentiments contradictoires que Marina va devoir gérer au mieux, avec l’aide de ses anciens collègues et de la responsable de l’orphelinat au Sénégal et le soutien de sa sœur, de sa nièce et de sa pétulante logeuse. Ce n’est que grâce aux conseils de cette dernière que Marina arrivera peu à peu à se faire accepter par la taciturne et irascible Catalina, l’unique employée de la boulangerie et visiblement la seule à avoir les réponses aux questions des deux sœurs.
Un grain de sable qui vient perturber un destin tout tracé est un classique du cinéma et de la littérature. Pan de limón con semillas de amapola est d’ailleurs l’adaptation ciné du best-seller de Cristina Campos. Que les changements apportés par ce grain de sable, améliorent finalement la vie est tout aussi classique. Et les récits qui prônent un retour aux sources, à des valeurs simples – comme celle de la fabrication du pain – sont légions. Le film n’a donc pas grand-chose de révolutionnaire ou d’innovant. On est dans un cinéma, on ne peut plus académique. Mais tout est bien fait ! Du casting – très majoritairement féminin – au mixage en passant par la photographie, le cadre, le rythme et, bien sûr, le récit, le film accroche le spectateur et ne le lâche pas une seconde. Le réalisateur distille avec pertinence de petites gouttelettes d’information qui font avancer le récit vers sa fin au goût doux-amer. À la fois incroyablement tire-larmes et terriblement feel-good !
Tourné en Espagne avec une équipe principalement espagnole, le film a été coproduit par le Luxembourg. « L’histoire nous a beaucoup plu », explique la coproductrice grand-ducale Alexandra Hoesdorff. Elle poursuit : « On a aimé que ce soit basé sur un best-seller, que ça se déroule en Espagne, un pays avec lequel nous n’avions jamais travaillé et puis que ce soit une histoire de famille et une histoire de femmes. Les histoires de femmes, et surtout les histoires de femmes de cet âge sont assez rares », insiste-t-elle.
Ce film colle à merveille à cette définition. Le Luxembourg a ainsi apporté au film ses compétence au niveau du maquillage (Jasmine Schmit), des costumes (Magdalena Marczynska), des effets spéciaux (Raoul Nadalet) et de la post-production en général (Espera et Philophon) ; mais le public pourra également y entendre quelques mots dans la langue de Dicks. Le personnage de Mathias – qui s’exprime principalement en anglais – est en effet interprété par le comédien luxembourgeois Tommy Schlesser. « Mathias était dès le départ prévu comme un personnage étranger, reprend Alexandra Hoesdorff. Le réalisateur cherchait un personnage qui change du type espagnol habituel. Il voulait quelqu’un de grand, blond. On a proposé quelques comédiens et il a été rapidement clair que Tommy était fait pour le rôle ». Un rôle secondaire, certes, mais en même temps central dans ce film à l’histoire aussi belle que l’amour que se portent Marina et Mathias. Un amour fort et enveloppant, mais qui n’évite pas quelques soubresauts de la vie.