« Allons bouffons de la patrie,
Le jour de foire d’empoigne est arrivé !
Contre nous, avec vilenie,
Le pillard Macron s’est levé
Entendez-vous, après campagne,
Mugir ces féroces malfrats ?
Ils viennent jusque dans vos bras
Engranger vos voix et votre gagne !
Aux armes, citoyens !
Bataillons !
Luttons ! Oui, luttons !
Contre l’sang impur
De Mélenchon
Et de Macron ! »
Voilà le chant national qu’entonna, en guise d’Internationale, la gauche au bal populaire du 14 juillet. Ce soir-là, dans sa villégiature de Gordes, Yvan se mêla à la foule qui dansa à l’ombre de l’imposant château dont la silhouette singe celle de la Bastille. Le peuple était en proie au soulagement plus qu’à la liesse, et votre serviteur se dandina aux rythmes, non pas de la carmagnole, mais d’une valse-hésitation à quatre, voire cinq temps et plus, où la gauche unissait sa toute nouvelle force pour entamer sa lutte, qu’on n’espère pas finale, contre elle-même et transformer ainsi son succès électoral en victoire à la Pyrrhus. Eh oui, l’ivresse du grand soir a engendré la gueule de bois du petit matin. Fini l’anathème contre les extrêmes chère au centre et à la droite, voilà la gauche qui s’acharne sur son ultragauche, un terme que votre serviteur verrait bien remplacer celui d’extrême-gauche pour bien signifier que, décidément, RN et LFI n’ont rien à voir, et que l’antisémitisme « résiduel » du père Mélenchon est aux antipodes de l’antisémitisme constitutionnel du père fouettard Le Pen et de ses épigones. Contrairement au FN qui continue à progresser, LFI régresse et Mélenchon, bientôt, ne sera plus qu’une ambulance sur laquelle on n’ose pas tirer et qui feint toujours de se prendre pour une Ferrari rouge. Beaucoup de premier ministrables, à peine sortis du chapeau, se sont fait zigouiller, laissant la place … à qui ? Pourquoi pas à François Ruffin, dissident LFI (ce qui est aujourd’hui un utile avantage) qui a eu le mérite, dès l’annonce de la dissolution, de proposer la création du Nouveau Front populaire ? Bien plus que cela, il en a choisi le nom. Depuis la Bible, où Dieu enjoint à Adam de nommer choses, animaux et compagne, on sait que nomination vaut création… et domination. N’a-t-on pas appelé Linné, le grand scientifique, classificateur de la nature, le nouvel Adam ? La désignation de Ruffin, le nouvel Adam de la gauche, mettrait ainsi un peu d’ordre dans la chose publique, exactement comme Linné l’a fait pour la chose naturelle.
Face à l’ambulance Mélenchon, le corbillard Macron est conduit par le croquemort Attal, le bébé Macron qui enterre le pépé Macron. Ce cortège funèbre se fait doubler par le bus Le Pen qui avance, lentement mais sûrement, d’arrêt en arrêt, vers son terminus qui risque fort d’être aussi celui de la république. Dans ce bal macabre, le bestiaire que nous avons esquissé il y deux semaines fait allègrement des petits : À droite on se traite de cloportes, à gauche on rigole de Hollande qui revient, dit-on, en scooter au Palais Bourbon, tout en ressemblant à des punaises de lit dont on n’arrive jamais à se défaire. Ambiance ! Les Allemands ont une locution pour décrire cette progression en adversité : Feind, Todfeind, Parteifreund. Traiter le rival, fût-il de son propre camp, d’insecte, de nuisible et de vermine rappelle le sinistre vocabulaire d’un autre temps et fait de l’adversaire à combattre un ennemi à éliminer, à écraser comme un ver de terre. La dissolution de l’Assemblée a dissous le vivre-ensemble et désinhibé un langage qui se lâche, devenant ainsi le symptôme d’une société malade, en plein délitement. Ceterum censeo : Pim Knaff doit démissionner !