Nouvelles technologies pour les portables

Liberté promise - mobilité due !

d'Lëtzebuerger Land vom 29.06.2000

Nombreuses sont les promesses de l'industrie du portable : transmission de la voix et des données, accès à Internet, gestion des données personnelles, le tout dans un seul boîtier au design à la mode du moment. Le portable, GSM - « G » pour les branchés - est passé du stade d'outil au stade d'objet de culte. 

Malgré les énormes progrès réalisés et les fonctionnalités ajoutées nous ne sommes qu'au début de la révolution mobile. Au niveau de la transmission de la voix, le GSM a entamé une évolution remarquable. Sur un portable moderne, une communication hors mouvement, profitant d'une bonne couverture réseau, ne peut point être distinguée d'une communication liée au câble. Néanmoins le GSM n'est pas tout à fait prêt pour la convergence IP - l'intégration d'Internet dans la vie au quotidien - qui s'annonce. La transmission de données est limitée à 9 600 caractères par seconde, loin des vitesses de transmission possibles en communication fixe, plus loin encore de celles demandées par des applications gourmandes à l'exemple de la transmission d'images.

En théorie un certain nombre de développements existent déjà ; HSCSD, GPRS ou encore EDGE ont pu être admirés lors du rendez-vous multimédiatique à la CeBIT à Hanovre. 

Premier disponible, HSCSD (High Speed Circuit Switched Data) traduit en pratique l'espoir de porter la vitesse de communication à des débits près de l'ISDN1. Au Luxembourg, sur le plan pratique et côté opérateurs, seul Tango offre actuellement cette nouvelle fonctionnalité à ses clients. Moyennant un ajout à l'abonnement le client porte le débit de données à près de 40 000 caractères par seconde. Le concurrent LuxGSM a fait le choix stratégique de ne pas investir en HSCSD.

Côté clients il est néanmoins très difficile de trouver les terminaux (portables) qui supportent cette autoroute mobile de la communication. Seul Nokia offre dans sa gamme une carte PC au format PCMCIA. Un deuxième téléphone HSCSD initialement annoncé pour juin ne sera finalement pas disponible avant octobre. Ericsson pour sa part s'était jusqu'ici contenté de livrer la technologie pour les opérateurs, c'est-à-dire la fonctionnalité côté réseau. Changement de stratégie soudain, alors que lors de la CeBIT les responsables Ericsson soulignaient encore que HSCSD ne serait pas disponible sur leurs terminaux, les Suédois ont annoncé en juin l'entrée sur le marché de deux portables HSCSD pour la fin de l'année. Siemens essaye pour sa part de tirer profit de l'acquisition du département mobile de Bosch et annonce un appareil pour fin septembre.

Plus incertain encore est le futur de GPRS (General Packet Radio Service). Cette technologie promet - dans sa dernière phase de développement - de porter les débits jusqu'à 384 000 caractères par seconde. Actuellement la pratique se résume encore à des projets pilotes aux vitesses de promenade, en clair 9 600 caractères par seconde. GPRS ne se limite toutefois pas à la vitesse pure ; des fonctionnalités supplémentaires permettront par exemple d'offrir une qualité de service (QoS). Ainsi un utilisateur au profil donné pourra toujours avoir à sa disposition une bande passante prédéterminée - à condition de capter le réseau. D'autres fonctionnalités liées à l'architecture du GPRS font que cette technologie est davantage optimisée pour l'accès à Internet. 

Finalement il y a EDGE (Enhanced Data for GSM evolution). Cette technologie semble la plus prometteuse. Non seulement pourra-t-elle être utilisée dans les réseaux GSM mais encore dans ce qui est déclaré les réseaux du futur : l'UMTS, qui fait dès lors son entrée sur l'aire de jeux des télécommunications mobiles.

Alors qu'actuellement plus de 90 pour cent du trafic sur les réseaux GSM sont du type voix, les utilisateurs recherchent de plus en plus la mobilité du côté des services data. SMS et Wap ne sont certainement que les précurseurs d'une génération de téléphones mobiles qui vont libéraliser d'avantage Internet en le libérant du fil.

L'UMTS (Universal Mobile Telecommunication Services) est la réponse européenne à la demande issue de l'International Telecommunication Union (ITU) visant un standard mondial assurant un maximum de mobilité et de compatibilité. UMTS promet des débits allant jusqu'à 2 Mb/s, c'est-à-dire l'équivalent d'une ligne louée performante à l'heure actuelle. Même si ce débit maximal n'est atteint que si le terminal UMTS se trouve au repos, le minimum a lui été fixé à 144 Kb/s, donc au delà des capacités cumulées de deux canaux ISDN (128kB/s).

Quelles belles promesse, que l'accès à Internet plus rapide qu'à la maison et ceci en toute liberté de mouvement !

Même si le désir exprimé du gouvernement luxembourgeois est de diffuser dès 2002 les premières ondes UMTS, il est peu probable que cette date pourra être respectée. D'abord, le laps de temps prévu pour la construction du réseau est très bref. Ensuite le nombre d'opérateurs (quatre) prévu est très élevé et risque de compliquer les planifications.

Du côté des opérateurs existants l'on perçoit une certaine position critique envers la décision du gouvernement. Des études ont établi que pour garantir une couverture UMTS complète du Grand-Duché, plusieurs milliers de stations de bases devraient-être érigés. Si le désir du gouvernement, de voir les sites partagés, pourra réduire le nombre de problèmes au niveau des emplacements disponibles, il en risque d'en soulever d'autres. En effet la complexité d'un réseau de télécommunication moderne nécessite une planification préliminaire.

À partir de là il faudra encore lancer des terminaux sur le marché. À l'heure actuelle aucun terminal UMTS n'est disponible. (Du moins pas de taille à mériter le label « portable »). À voir les problèmes ou retards que les producteurs ont déjà à fournir les appareils à la pointe de la technologie existante, tels Wap ou encore HSCSD, sachant de plus que GPRS n'est même pas encore envisagé pour la commercialisation2, il est plus qu'improbable qu'en 2002 les premières stations UMTS soient opérationnelles. 

Au-delà des problèmes techniques que la mise en oeuvre suscitera, il y a également lieu de réfléchir aux questions de rentabilités. Y a-t-il un marché assez grand au Luxembourg pour amortir des investissements de l'ordre de grandeur de plusieurs milliards de francs ? L'utilisateur va-t-il accepter une nouvelle technologie ? Pour répondre à cette dernière question, il faudrait d'abord savoir si l'UMTS engendre des nouvelles applications, disponibles dès le départ. En effet, avec le GSM les utilisateurs savent déjà téléphoner, sur ce plan là l'UMTS n'offre pas d'avantages. L'exemple du DAB3 montre bien que l'absence de contenu nouveau rend très peu attractif une technologie qui tend à remplacer une existante. 

 

L'auteur est journaliste à la Radio socioculturelle 100,7

Spécialisé sur les sujets IT, il anime les émissions « Multimedia », tous les mercredis vers 11.10 heures, et « Tëscht Nullen an Eenten », un vendredi sur deux de 9.05 à 9.30 heures.

 

1  ISDN (Integrated Services Digital Network), norme de télécommunication digitale permettant des communications réseau à 64 000 Bit/s. Un raccord ISDN permet de lier deux connexions simultanément portant ainsi la vitesse à 128 000 Bit/s

2  Les producteurs projettent de commercialiser le GPRS mais ils n'ont pas encore de terminaux à offrir aux clients.

3  Digital Audio Broadcasting, radio numérique

 

Pascal Tesch
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