« J’ai une grosse barbe et une poêle dans le dos » : avec une description pareille, vous vous dites qu’il n’est pas difficile de repérer quelqu’un dans une foule. Mais quand cette foule est composée de soldats de l’Empire galactique, d’un Orque, de quelques Mandaloriens et d’une multitude de magiciennes aux atours chamarrés, c’est une autre affaire. Mais à la Luxcon, convention dédiée aux cultures de l’imaginaire, qui a attiré 4 000 visiteurs cette année au Forum Geesseknäppchen, Panda est connu comme le loup blanc. Figure du monde du cosplay au Grand-Duché, le jeune trentenaire est l’un des juges du concours de déguisement en personnages de fiction. En attendant, il serre des mains et pose pour des photos à tout va. Même une petite fille déguisée en Charlie le cherche partout, c’est dire...
Lorsque l’on finit par le dénicher, il est aux côtés de sa compagne Margot. Ils aiment assortir leurs costumes et reproduire des duos issus de leurs univers préférés. Ce jour-là, il est déguisé en Senshi, le cuisinier des monstres, elle incarne l’elfe Marcille, tous deux sortis du manga Gloutons & Dragons. Panda (qui n’a pas volé son surnom : c’est un costaud) aime les héros « fun » et joue de son physique pour mieux les incarner. Il a commencé à six ans, avec un costume confectionné par sa mère, retoucheuse de métier. Entre-temps, il a appris lui-même la couture (« ça me détend ») et passe ses nuits à confectionner des vêtements et des « props », ces accessoires indispensables pour être encore plus fidèle à son personnage. « Mon costume d’aujourd’hui a nécessité plus de cent heures de travail, indique-t-il. Mais il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de faire du cosplay : tu peux être très ressemblant ou pas, créer toi-même ou tout acheter, reproduire une attitude ou être complètement en décalage... L’essentiel est de s’amuser ». Petite astuce offerte par nos experts : les magasins de tissus ou de matériel auto peuvent receler moult trouvailles, comme ces tapis de sol parfaits pour modeler casques et armures.
Panda et Margot se sont connus lors d’une convention aux Pays-Bas. Ensemble, ils arpentent les conventions en Belgique, en France, en Allemagne ou en Angleterre. Ils apprécient la Luxcon pour son côté convivial et intimiste : « on peut y retrouver des amis de toute l’Europe, qu’on a rencontré en convention » explique le couple. Des événements qui restent cependant trop rares pour vivre sa passion au quotidien, socialiser, poser pour les photographes ou échanger des conseils. Pour pallier cela, Internet joue un grand rôle, en particulier Instagram. Ceux de Panda (@the_epical_panda) et de Margot (@margot_hime) forment un catalogue réjouissant de personnages colorés ; ces deux-là ont effectivement l’air de beaucoup s’amuser. Mais ils nous préviennent : le monde merveilleux du cosplay n’est pas imperméable à certaines problématique sociétale, comme la fast-fashion avec ses costumes à usage unique, la hausse du prix des matériaux, les inévitables influenceurs qui surfent sur les tendances... Le harcèlement en ligne, avec son lot de trolls et d’individus aux commentaires déplacés est un autre enjeu. « J’aime les héroïnes sexy et dénudées. Certaines personnes me disent que j’ai un problème pour me déguiser comme ça, raconte Margot. Mais le vrai problème est dans le regard de l’autre ». Dans les travées de la Luxcon, on ne peut ignorer les grandes affiches au message clair : « Cosplay is not consent » illustrées d’une BD mettant en scène une cosplayeuse victime de propos grossiers et de mains baladeuses. « Les gens n’hésitent pas à te toucher sans te demander la permission, ou, surtout quand tu es une femme, à prendre des photos à la dérobée... il faut qu’ils comprennent qu’on n’est pas des poupées mais des êtres humains ! » souligne le duo.
Les cosplayeurs présents à la Luxcon font beaucoup pour donner du charme à l’événement. Au milieu des stands, l’atmosphère est amicale, les groupes se forment, chacun prend plaisir à montrer son plus beau costume. « C’est une fierté » assure Panda. « Si dans la vie tu n’as pas confiance en toi, tu peux devenir beau et fascinant le temps d’une journée, oublier qui tu es et tes soucis, explique Margot. C’est comme des vacances ! ».