Rockhal

Puissance 2

d'Lëtzebuerger Land vom 13.02.2003

La famille grand-ducale a cinq enfants, et pourtant, on a échappé à un de leurs noms dans la dénomination officielle de la Rockhal, deuxième mouture. Son nom officiel n'est plus Centre de musique pour jeunes comme s'appelait le projet Bodry de 1999, avorté avec le changement de majorité gouvernementale. Non, on a constaté que dix pour cent au moins du public des concerts de musiques actuelles sont des «vieux» de plus de trente ans, la salle s'appellera donc désormais officiellement Centre de musique amplifiée, CMA. Comme le CNA, Centre national de l'audiovisuel, à Dudelange, mais avec un M au milieu. Malgré tout, l'association de musiciens backline ! semble estimer qu'en anglais - car le marché est avant tout international - cela fait moyennement cool de dire «Yo man, did you know that in june, we'll be playing at the CMA in Luxembourg!?», et a lancé un référendum électronique. Sur le site web www.rockhal.net, tout le monde peut soumettre un nom ou attribuer des votes pour un des quelque 90 noms déjà sur la liste, cela va de Steel-ex en passant par Indus jusqu'à Tremolo.

En présentant, mardi dernier, le concept du bâtiment du CMA, pour lequel elle a déposé un projet de loi le 21 novembre dernier, la ministre de la Culture et des Travaux publics, Erna Hennicot-Schoepges (PCS), a enfin attribué une plus grande visibilité à un projet d'investissement culturel qui a été repoussé bien trop souvent. On aimerait tellement croire que cette fois sera la bonne. Car dans son avis du 20 décembre 2002, même le Conseil d'État « espère que le projet sous examen (...) ne sera pas victime, à l'instar d'autres projets, de la révision du programme pluriannuel des investissements publics. En effet, le projet complète l'offre culturelle nationale, surtout pour les jeunes qui ont le droit de manifester leur propre identité culturelle». Avec un devis de quelque trente millions d'euros, le bâtiment sera nettement plus cher que le projet de 1999 (sept millions d'euros), mais ne constitue qu'un pourcentage minime des 447 millions d'euros que le gouvernement investit en infrastructures culturelles, selon la ministre. Ainsi, pour que le CMA ne souffre pas des coupes budgétaires pour cause de récession, son financement passera par l'établissement public Fonds Belval.

Ce qui, au regard de l'expérience du Musée national d'histoire et d'art - dont le nouveau bâtiment a été construit en un temps record sous l'égide du Fonds Vieille Ville, dirigé lui aussi par Fernand Pesch -, laisse au moins présager le respect du calendrier très serré. Le début des travaux est prévu pour juillet de cette année, la fin est escomptée deux ans plus tard, soit en été 2005. La commission des Travaux publics de la Chambre des députés a discuté le projet de loi et préparé un rapport, qu'elle doit encore adopter avant que le parlement ne le mette à l'ordre du jour pour le vote. Comme le projet de loi pour l'exploitation du CMA manque encore, le député des Verts Robert Garcia a ressorti sa proposition de loi Janis Joplin. La ministre a toutefois annoncé que le projet de loi afférent était en train d'être finalisé, les réflexions vont actuellement dans le sens d'un établissement public, «afin de donner une chance à ce projet».

Car au-delà des deux salles de concerts - une de 4000 et une deuxième de 500 places -, le CMA tel que dessiné par les bureaux d'architectes et d'ingénieurs luxembourgeois Beng,  Sit-Lux et IC-Lux, prévoit aussi et avant tout huit salles de répétition et un centre de ressources ­ documentation, information et soutien des musiciens. Ce qui constitue un véritable progrès par rapport à l'ancien projet, qui n'était qu'un volume d'accueil. Implanté à Belval-Ouest, classé priorité des priorités en matière de réaménagement des friches industrielles par le gouvernement, le projet pourrait lui aussi tirer profit de cet emplacement. Car de tous les investissements annoncés sur place, qu'ils soient privés ou publics, celui-ci pourrait donner le coup d'envoi, peut-être en parallèle avec le bâtiment de Dexia-Bil. Erna Hennicot ne laisse pas de doute à sa détermination à faire avancer ce projet : « nous nous attendons aussi à des retombées à moyen ou à long terme, le développement de Belval-Ouest est un projet d'avenir.». En 1999 déjà, peu avant les élections, le projet Bodry semblait urgent ­ et avait été adopté par le parlement! Donc cette fois-ci, les plus sceptiques attendront de voir les pelleteuses commencer leur boulot avant d'être rassurés.

 

Pour plus d'informations: voir notre dossier Rockhal

 

josée hansen
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