CD Do the Evolution par Schalltot

Progressons

d'Lëtzebuerger Land vom 31.03.2005

Il y a d'abord ceux qui s'attristent sur leur sort et qui se lamentent. Il y a ensuite ceux qui préfèrent l'action et la création. En faire un maximum avec un minimum de moyens. Le collectif Schalltot a certainement pris à coeur cet état d'esprit. Cette jeune asbl, dont les origines remontent à 1998, a eu comme idée de départ d'éditer un fanzine. Assez rapidement, cela s'étant avéré trop difficile à réaliser, le collectif s'est donné comme mission principale d'organiser des concerts. En près de trois ans, plus de cent (!) concerts ont ainsi pu avoir lieu. Marc Nickts, membre fondateur très motivé (militant presque) de Schalltot, explique que la recherche de structures d'accueil a été une fonction principale. Le nombre de formations musicales au Grand-Duché devrait tourner autour des deux à trois cents et tous les genres, que se soit le métal, le rock ou la pop. Mais ce sont les structures d'encadrement qui font défaut. Les salles de concerts n'en sont qu'un exemple. Cependant, l'association ne veut pas se limiter à l'organisation de ces concerts. Dernière mission qu'elle s'est sont donnée: créer une plate-forme officielle d'expression pour les formations luxembourgeoises. Selon Marc Nickts, les problèmes auxquels les groupes sont confrontés au quotidien ne sont pas réellement pris en considération. Le collectif a voulu faire le bilan de la situation en publiant un livret qui rassemble un grand nombre d'opinions. Nombre d'interviews ont été menées avec non seulement des formations, mais aussi avec des acteurs influents du monde de la musique nationale. On y retrouve ainsi des formations comme Defdump, Tvesla ou Pronoian Made, tout comme des acteurs culturels comme ceux de l'association backline!, de Burhuc ou encore de la Kulturfabrik. Plus de 50 pages d'extraits d'interviews, d'opinions, des cris d'encouragement, de désespoir et de protestation en sont le résultat. Quatre thèmes clés ont été abordés lors de ces interviews dont, en premier lieu, l'état de la scène luxembourgeoise. Il semble être largement admis que la scène locale est très intéressante et «fleurit sainement». Elle a évolué drastiquement ces dernières années et le Grand-Duché n'a pas à avoir de complexes par rapport aux régions limitrophes. Mais si de plus en plus de gens et d'associations s'engagent, il reste néanmoins difficile de «réussir» à cause du petit marché que représente le Luxembourg. Les membres de Spyglass suggèrent ainsi que les groupes doivent s'exporter afin de connaître un succès. L'éternelle problématique des sallsalles de répétitions est alors abordée. Ce sujet a déjà fait couler beaucoup d'encre, mais il semble persister. À travers ce livret, certains musiciens appellent les organisations à travailler ensemble afin d'éveiller la conscience publique, car nombreuses sont les formations qui se retrouvent à la rue. D'autres groupes sont soit plus débrouillards en ayant réussi à trouver une cave ou un garage quelconque, soit plus chanceux. Ces derniers ont pu dégotter un endroit pour répéter tant convoité comme ceux de la Kulturfabrik par exemple. Les responsables de telles structures ont du mal à faire une sélection des groupes, tant les demandes sont nombreuses. Les dirigeants de la future Rockhal auront d'ailleurs certainement le même problème avec les six salles prévues. Les infrastructures font l'objet d'un troisième débat. Malheureusement, cette discussion se limite presque exclusivement à la Rockhal, alors qu'il y a bien d'autres difficultés à ce niveau. En plus, force est de constater que la majorité des musiciens au Luxembourg ont une approche assez pessimiste par rapport à cette structure, qui n'ouvrira ses portes qu'en juin. Certains groupes jugent ce projet, tout comme celui de la Coque, comme mégalomane. Ils se posent la question à quelle mesure la culture alternative et les formations underground tirent profit de tels projets. Il y a cependant des voix plus encourageantes qui pensent que le CMA aura un effet positif, surtout avec les salles de répétitions et un studio d'enregistrement. Josée Hansen, présidente du Conseil d'administration du CMA, fait justement allusion au centre de ressources dont le CMA sera doté : un centre de documentation, d'archivage et d'enregistrement au service des formations locales. En dernier lieu, il est question de l'organisation concrète de concerts. Quels conseils donner à une formation luxembourgeoise qui souhaite se retrouver à l'affiche de concert? Il est vrai qu'il y a toujours plus d'organisations et de personnes qui remplissent la fonction booking : Winged Skull, Schalltot, Burhuc, GUM et autres associations se mobilisent et prennent en charge cette organisation. Mais des formations comme Do Androïds dream of electric sheep ou encore Defdump prônent le Do It Yourself booking, notamment si la formation essaie de se faire un nom à l'étranger. Chose nécessaire, surtout si l'on tient compte de la réflexion d'un des responsables de backline! qui remarque que le public luxembourgeois, de par sa taille, est finalement assez restreint et qu'un phénomène de fatigue peut surgir. Le titre de la publication de Schalltot, Do the evolution, lance un appel à l'évolution et au développement des structures. La scène luxembourgeoise, en effervescence avec l'inauguration proche de la Rockhal et les associations enthousiastes, se construit et s'organise peu à peu, grâce aux dialogues et discussions engagées notamment par de telles initiatives. Avis aux amateurs et aux professionnels.

Do the evolution est disponible chez les disquaires, les centres culturels et lors des concerts organisés par Schalltot ; www.schalltot.lu.

 

Michel Welter
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