CD Superfishreality de Thorunn

Soupe aux navets

d'Lëtzebuerger Land du 14.08.2008

Chanteuse, présentatrice télé, personnage people, Thorunn, qu’on ne présente plus, revient à la charge avec un deuxième album intitulé Superfishreality. Après une première plaque, The moment inbetween, axée pop r’n’b et eurodance un peu toc au succès fort mitigé par rapport aux attentes et aux sommes investies, elle verse cette fois-ci dans une autoproduction aux accents plus folk-rock. Pour l’occasion, elle s’est fait produire ce deuxième essai par un certain Erik Berholm, Suédois de son état, qui a co-écrit les morceaux avec Thorunn. En outre, il a convié des requins de studio locaux, les Woggie­bears (leur pendant scénique incombe à des musiciens luxembourgeois) qui donnent à l’ensemble un aspect très professionnel. Tellement professionnel que tout semble lisse et gommé comme ces disques de folk pop générique, dont même MTV ne sait plus quoi faire. En trois mots : pro, prévisible et inoffensif ! Tout comme cette voix, certes sucrée et techniquement irréprochable, dont les pics de conviction sont pourtant aussi plats que l’encépha­logramme d’un mort ! Textuellement, ça évolue au ras des pâquerettes, ça récite un chapelet de clichés plus éculés les uns que les autres aux rimes « riches » en espérant que ça passe pour une lucide ironie. De plus, on n’hésite pas à se lover dans les travers censés être fustigés thématiquement (comme la superficialité des relations actuelles, les bimbos, les belles mères,…), ces thèmes étant, pour la plupart, traitées avec peu d’à propos. Un comble pour quelqu’un qui prétend « assumer com­plètement ses choix, tant musicaux que du côté de l’écriture ». Une saine autodérision distanciée de la part de cette licenciée en lettres aurait été peut-être plus propice, comme par exemple se moquer gentiment de son image de bimbo malgré elle ! ? !Seule embellie dans cette harassante traversée de clichés rances mille fois entendus, The next 50 years, qui dans le registre d’une pop sucrée et calibrée dégage une belle fraîcheur et auquel on peut prédire une belle carrière radiophonique, grâce à un refrain fédérateur.Certes, le plat mitonné reste comestible, mais en ces temps, où de plus en plus de monde mitonne ses homesongs dans son arrière-cuisine ; où, par un simple clic de souris, on peut accéder à la nouvelle sensation en provenance du Japon ; où les hypes se font et se défont ; où les buzz vifs comme l’éclair dictent leur loi ; où la nouveauté est traquée, portée au pinacle, puis déchue de ses droits, en moins de temps qu’il n’en faut pour prononcer Superfishreality, ça sent quand même fort le navet, légume réputé pour son insipidité ! Mais, il y aura toujours des badauds pour croire au très factice starsystem made in luxemburg et acheter, le cas échéant, cet album bien pâlichon qui devrait ravir les amateurs de l’émission Dok-Show et autres temples du consensualisme mou et bien pensant. Thorunn et ses Woggiebears ont, en effet, réuni tous les ingrédients nécessaires pour que la soupe prenne !

 

David André
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