Carmen et Palma Di Pinto

L’ancien et le nouveau

d'Lëtzebuerger Land vom 20.05.2010

Les sœurs Di Pinto ont plus d’un tour dans leur sac : elles allient la créativité de l’une (Carmen) au sens du commerce et du marketing de l’autre (Palma) pour créer une marque et un lieu tout à fait originaux : Retrovolver. Comme son nom l’indique, (rétro, bien sûr, mais aussi volver, qui veut dire revenir en espagnol, même si les deux sœurs sont Italiennes) il s’agit d’abord d’un voyage dans le temps, vers une époque où les tissus colorés et imprimés rivalisaient d’audace et d’inventivité. À partir de vêtements et accessoires vintage, Carmen Di Pinto recrée des fringues inédites. Ce parapluie rouge au motif naïf deviendra une jupe à godets une fois les baleines ôtées et la magie de la machine à coudre passée par là. Ces anciennes ceintures de sécurité vont renaître en vraies ceintures (même si la grosse boucle « GM » ne passe pas dans tous les jeans) et ces chemises d’homme vont changer de sexe en devenant des jupes dont les poches deviennent des manches.

Attirée par la mode et le stylisme depuis toujours, c’est vers le graphisme que Carmen s’est tournée et a étudié en Irlande. Elle y a travaillé quelques années avant de revenir au Luxembourg où elle est née. Les deux sœurs se retrouvent dans une grande multinationale de la place, mais ne se satisfont pas seulement d’un travail alimentaire. Le sens créatif, l’envie d’indépendance et les qualités de business des deux sœurs conjuguées font le reste. Le projet naît en octobre, la Chambre de commerce leur donne son aval, le lieu est trouvé en janvier. Installée dans la dynamique zone commerciale de Hollerich – où restaurant à la mode, architecte branché, boutiques pointues et agences de pub de tous poils se côtoient –, la boutique a ouvert il y a à peine un mois.

« Je suis ravie d’être installée ici. C’est abordable, il y a beaucoup de passage et plusieurs nouvelles boutiques avec lesquelles on a des affinités, » explique Carmen, qui voudrait organiser une journée de braderie pour l’ensemble du site. Dès la vitrine, on est plongé dans l’univers rétro grâce, déjà, à la typographie choisie pour l’enseigne : un rouge « qui pète » et un lettrage irrégulier comme différents caractères d’imprimerie. Mieux rangé que la caverne d’Ali Baba, le magasin regorge cependant de trésors de toutes espèces. Des fringues d’abord, en veux-tu, en voilà, avec une prédominance de couleurs et d’imprimés aux motifs fleuris et abstraits. Mais aussi des objets de décoration (lampes, horloges, petit mobilier), accessoires (sacs, ceintures, chaussures) et même quelques jouets en peluche.

L’idée de recycler de vieux vêtements et tissus date d’il y a longtemps. C’est en voyant leur mère travailler à la retouche et à la couture pour un fourreur que Carmen a voulu se lancer. Elle achète une première machine à coudre et s’amuse à faire des coussins, des housses de couette et récupérant des vieux tissus qu’elle choisit pour leurs couleurs et motifs. Elle démonte, découpe et recoud tout ce qui lui tombe sous la main en cherchant sur internet les trucs et astuces pour obtenir un résultat portable. Et quand le tissu ne vaut que pour son imprimé, ce sont des badges de toutes tailles que la créatrice propose. Coup de cœur pour ces badges dorés qui sont fabriqués à partir des couvercles de Nutella… Un recyclage en forme de clin d’œil pour les gourmands. « Ce qui m’amuse, c’est essayer, expérimenter et puis tester le résultat ».

Pour entretenir le stock et développer de nouvelles idées, Retrovolver fait appel aux dons et recherche tissus, nappes, anciens vêtements – « tout ce qui peut passer dans la machine à coudre » – pour les transformer. Des ateliers seront également bientôt proposés pour que chacun puisse apprendre à transformer et customiser ses vieux habits. La machine à coudre trône d’ailleurs dans la boutique où Carmen peut travailler au vu des clients et curieux.

Voilà pour l’ancien. Le nouveau a aussi sa place chez Retrovolver puisque l’idée est aussi de présenter des jeunes marques et designers qu’on ne trouve pas ailleurs. « J’aime l’esprit de ce qu’on trouve à Bruxelles ou à Cologne, c’est là que je vais chercher l’inspiration ». En tête, les vêtements confortables et légers de House of Intrika, créés à Bali par deux passionnées de voyages et de cirque, dont Frix, une Luxembourgeoise. Les robes, chemises et jupes très décalées, poétiques et fleuries de Blutsgeschwister jouent aussi la carte du rétro. Alors que Homestreethome, fabriqué en Inde et soutenant un projet éducatif pour les gens de la rue, met en avant les couleurs. D’autres marques sont aussi disponibles dans des prix plutôt abordables allant de 25 à 200 euros. Et pour couronner le tout, même la déco du magasin est à vendre… sauf la machine à coudre !

Jade Fairbanks
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