Tandis qu’une nouvelle alerte rouge pour risque de fortes pluies a été déclenchée en Émilie-Romagne mercredi matin, les dernières inondations provoquées par les pluies continues du 1er au 4 mai, dans la même région, ont remis au premier plan la question du changement climatique. La cause de ces inondations est en partie liée à la grande sécheresse, dont souffre le nord de l’Italie depuis plus d’un an, ayant rendus les sols incapables d’absorber beaucoup d’eau. En effet, selon l’Aprae, l’Agence régionale pour la prévention, l’environnement et l’énergie, la cause principale des dernières inondations est due à la quasi-absence d’orages estivaux combinée aux précipitations persistantes, qui ont duré environ 48 heures. Il s’agit ici de l’événement pluvieux le plus intense sur l’ensemble de la région pendant deux jours consécutifs depuis 1997 et le plus intense de la saison printanière depuis 1961. Les précipitations cumulées de l’événement ont dépassé les 200 mm sur une très grande partie du territoire.
Les activistes et politiques écologistes implorent le gouvernement Meloni d’intervenir réellement et de ne pas seulement se limiter à un décret relatif aux catastrophes naturelles. Les subsides que reçoivent les régions grâce à ce décret, certes utiles et nécessaires, ne résolvent cependant pas le problème à la racine.
Ces inondations ont également été provoquées par d’autres facteurs, comme l’état matériel des cours d’eau ou par les terriers creusés par des animaux sauvages, tels que des hérissons ou ragondins, qui pourraient avoir affaibli la stabilité des digues et des berges. En effet, même si les pluies ont été continues et que la sécheresse a joué un rôle majeur, l’ampleur de la catastrophe ayant causé la mort de deux personnes aurait probablement pu être réduite grâce à un entretien plus important et plus régulier des cours d’eau.
Ces aspects sont d’ailleurs soulignés par les opposants aux écologistes qui parlent d’une instrumentalisation de la part des militants climatiques. Alors que différentes causes expliquent les inondations, ils utiliseraient la catastrophe comme tremplin pour attirer l’attention sur le combat environnemental. En effet les activistes pour le climat ne cessent de faire parler d’eux et ce de manière à la fois positive et négative.
Dernièrement les activistes « vandales » verts ont fait beaucoup de bruit partout en Europe. Leurs actions sont certainement très controversées, car la dégradation d’œuvres d’art est sûrement une manière efficace de faire parler de soi, mais cela n’attire indéniablement pas seulement de la sympathie mais également une horde de critiques.
L’une des actions qui a récemment fait la une des journaux en Italie était celle du 17 mars dernier avec de la peinture lavable lancée sur la façade du Palazzo Vecchio, la mairie de Florence. Deux activistes de « Ultima Generazione » (Dernière Génération) avaient barbouillé l’entrée du bâtiment médiéval avec de la peinture orange. La réaction un peu exagérée du maire de Florence, Dario Nardella, qui s’était jeté sur les activistes avait ensuite fait le tour du web. Son attitude et le fait qu’il se trouvait devant le Palazzo Vecchio au bon moment avait laissé croire qu’il s’agissait là d’une mise en scène de sa part. Quoi qu’il en soit, l’événement a fait couler beaucoup d’encre.
Il ne s’agit pas d’une action unique en son genre. Elle a notamment été précédée à Rome, au mois de janvier, par des activistes utilisant la même peinture orange, contre le Palazzo Madama, bâtiment historique du quinzième siècle, où siège le Sénat italien. Également à Rome, le premier avril, ils avaient renversé de la couleur noire dans la fontaine baroque Barcaccia, pour sensibiliser la population à la crise de l’eau qui frappe le pays.
Ces actions sont évidemment controversées, compte tenu des monuments historiques et artistiques ciblés, mais il faut souligner l’usage de peinture lavable dans les cas cités ci-dessus. Le maire de Florence avait cependant affirmé que 5 000 litres d’eau avaient été nécessaires pour nettoyer la peinture, lancée grâce à des extincteurs sur le Palazzo Vecchio. Il voulait sans doute ainsi ironiser sur le gaspillage d’eau qui va à l’encontre de l’idéologie écologique pour laquelle les militants se battent, critiquant ainsi leur manière de protester.
Dario Nardella n’est pas le seul à s’opposer à ce genre de manifestations. Ces initiatives ont été stigmatisées par Fratelli d’Italia, parti de la Première ministre italienne Giorgia Meloni. Au lieu d’être à l’écoute des militants et de prendre en considération leurs revendications, le gouvernement a approuvé au mois d’avril une nouvelle loi qui prévoit des sanctions pénales de réclusion allant de six mois à trois ans et des amendes qui varient de 20 à 60 000 euros pour quiconque dégrade ou détériore des biens culturels et met ainsi en péril la conservation de monuments historiques ou artistiques. À ceci s’ajoutent également des amendes administratives qui vont de 10 à 40 000 euros. Ces sanctions pécuniaires seront versées au ministère de la Culture et serviront à remettre en état les biens endommagés. Toute personne accusée ou condamnée pour de telles actions se voit également interdire l’accès aux biens culturels protégés.
Tandis qu’il est compréhensible que ce genre de geste scandalise et soit désapprouvé par une partie de la population et par le gouvernement, il serait peut-être souhaitable que les politiciens tentent de comprendre les motivations qui poussent les jeunes et moins jeunes activistes à entreprendre ces actes de vandalisme. Et en effet Ultima Generazione, après avoir versé le liquide noir dans la fontaine, a exprimé son incompréhension face aux réactions indignées de certaines personnes, soulignant que ce qui devrait offusquer est la situation dans laquelle nous nous trouvons. La sécheresse extrême qui frappe de nombreuses parties du pays, comme la Plaine du Pô, en alternance avec les inondations, telles que celles de la semaine dernière, met en péril l’agriculture et cause également une multitude de problèmes pour la production énergétique et les sources de revenu du pays.
Angelo Bonelli, dirigeant d’AVS, parti vert italien, réclame lui aussi de cesser de subventionner les énergies fossiles, requête qui va de pair avec la dernière campagne d’Ultima Generazione : « Non paghiamo il fossile » (Ne payons pas pour l’énergie fossile). La campagne pointe du doigt que non seulement le gouvernement italien investit davantage dans l’énergie fossile que dans les énergies renouvelables mais que les sommes investies ne cessent d’augmenter. En outre, la campagne relève que l’Italie se classe en sixième position et cela devant la Russie et l’Arabie Saoudite, parmi les pays qui ont subventionné avec des financements publics les énergies fossiles entre 2019 et 2021. Mettre fin aux subventions publiques en faveur des combustibles fossiles est la demande principale des militants. Angelo Bonelli voudrait également que la loi relative au projet de construction du pont reliant la Sicile à la Calabre, soit abrogée. Les quinze milliards d’euros nécessaires pour sa construction seraient mieux investis pour sécuriser et entretenir le territoire.
Les requêtes des écologistes peuvent paraître excessives et leurs actions ne sont pas toujours compréhensibles pour la vaste majorité de la population, comme le montre la réaction de nombreux citoyens. La discussion sur le fait que certaines catastrophes soient ou non partiellement ou entièrement causées par les actions humaines, ne devrait cependant pas empêcher d’investir dans la protection de la nature et la sensibilisation à l’environnement pour contrer son effet sur le climat. Ceci en espérant que les nombreuses turbulences qui frappent actuellement le monde n’aboutissent finalement pas à ce que nous soyons vraiment la dernière génération.