EP Dee mat der Kaz danzt de De Läb

Sproochmates mat Groove

d'Lëtzebuerger Land vom 05.02.2009

De Läb avait fait forte impression et pris par surprise pas mal d’observateurs, il y presque deux ans, en débarquant tel un ovni dans le paysage musical grand-ducal. En effet, on avait affaire à une formation qui proposait un hip hop en luxembourgeois. Entreprise hautement casse-gueule, mais couronnée de succès, De Läb s’imposait, avec un énorme capital fraîcheur, comme unique représentant crédible et pertinent de musique actuelle en luxembourgeois, reléguant pas mal de prétendants au rang de gaudrioles avariées. Dee mat der Kaz danzt est le retour du roi sous la forme d’un nouvel EP distribué en catimini à leurs concerts.

S’il l’on peut compter presque deux ans entre D’Wourecht EP et cette nouvelle livraison, on ne peut pas dire que De Läb se soit reposé sur ses lauriers. Le flow des mc’s Corbi et Fluit a encore gagné en aisance et versatilité tandis que le choix des beats et des samples s’est affiné. La bonhomie permanente, qui irradiait leur première production, se teinte maintenant parfois de gravité, voire même d’une certaine mélancolie tant dans les textes que dans les samples, agrandissant par la même occasion le champ de possibles de De Läb. L’usage des samples est malin et les plus pointus des auditeurs reconnaîtront parmi les échantillons utilisés l’archi-samplé Lujon d’Henri Mancini (ce morceau souvent utilisé par Hollywood comme bande sonore des scènes de cocktails lounge) ou encore le jazzman éthiopien culte Mulatu Astatke.

Après une introduction bon enfant, on entre dans le vif du sujet avec Gedanken Tanken um Montmell sur fond de vieux funk millésimé et instrumental qu’instaure cet aspect un peu introspectif qui perdure sur l’EP. Ensuite, Den Dag dono retrace avec sourires les déboires d’une soirée trop arrosée et les fins de week-end en queue de poisson sur un beat débonnaire aux limites du burlesque avec un banjo très slapstick. Le très réussi Latzebeurk invite le groupe Opposition à la prise de micro dans un constat fustigeant les dérives consuméristes et dépensières du Luxembourg, qui se love dans une insouciante indifférence et un esprit de clocher hypocrite. La barre est mise à belle hauteur, mais Sich d’Pärel tëscht de Sai la passe avec une facilité déconcertante, toujours avec cette mélancolie qui sied à merveille le thème du morceau, à savoir le retour à certaines vraies valeurs devant la perte de repères et le bling bling actuel. De Jeng an de Jang enfonce le clou avec une certaine énergie et clôt l’EP avec conviction sur une déclaration d’amour à leur passion : un hip hop débarrassé de ses pénibles clichés qui plombent trop souvent le genre.

Les pieds sur terre, De Läb démontre facilement, avec cet introspectif Dee mat der Kaz danzt, que le sceptre n’est pas encore prêt de changer de main. Le hip hop, voire même le rock, op Lëtzebuergesch, devient une réalité tangible avec De Läb, une réappropriation inédite et ludique de la langue luxembourgeoise et non plus seulement un calembour faisandé et éthylique ! 

Pour plus d’informations : www.myspace.com/delabsound 

David André
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