Papier – Linien – Raum

La patte des architectes

d'Lëtzebuerger Land vom 22.07.2016

La passion d’Alain Linster pour les dessins d’architecture a trouvé un havre temporaire – l’exposition est à voir que jusqu’au 29 juillet – à la galerie Nei Liicht à Dudelange. Danielle Igniti donne là l’occasion à ce collectionneur passionné et à sa complice du Lëtzebuerger Architektur Musée (LAM), Anne Stauder, de curater une toute petite part de quelque mille documents, selon l’estimation de Linster.

Certains architectes sont bien connus de la profession, comme Constant Gillardin, auteur du moderniste siège des CFL. Entré au service de l’État et de la Cour grand-ducale, Gillardin signa par ailleurs des bâtiments beaucoup plus traditionnels. Mais ce qui est intéressant dans l’exposition, c’est de voir un dessin au crayon de l’étudiant, à l’ETH de Zürich : il est évident que le jeune homme (Gillardin, né en 1924 fit ses études au Polytechnikum de 1945 à 1950), imaginait déjà en germe la façade des CFL.

C’est un des intérêts de l’exposition Papier – Linien – Raum de présenter des travaux soit des étudiants (avec sur certains documents, dans le coin inférieur droit, le nom révélé de l’auteur après, on l’imagine, les débats de jury menés par les professeurs) et des projets des jeunes professionnels, travaillant dans des cabinets réputés à l’époque : ainsi de Edouard Reuter (1928-1997) à l’agence Perret-Remondet-Herbé. Solitaire, celui-ci ne connut néanmoins pas de carrière importante chez nous, quand Laurent Schmit (1924-2002), élève de l’atelier Gomort-Arretche à l’ENSBA de Paris, allait devenir une des figures majeures du modernisme à Luxembourg.

L’intérêt de l’exposition, comme l’expliquent Alain Linster et Anne Stauder, est pour beaucoup dans le mode de représentation à l’époque des plans dessinés à l’ordinateur (qui en ont la froideur) et aux représentations 3D hyperréalistes. La patte, pour un projet d’hôpital de Léonard Knaff (1927-2013), également étudiant à l’ENSBA, présente les codes typiques des années 1950. Nicolas Schmit-Noesen (1899-1964), se montre à l’aise dans la représentation régionaliste avec un projet pour l’hôtel de Ville de Dudelange de 1928 quand les dessins de façade de l’immeuble Méta-Brahms de 1932, sont plus proches du style moderniste classique de l’auteur (Kreditbank à Luxembourg, Musée de la Résistance à Esch).

La palme des dessins ayant « de la chair », quoi qu’il aie un style rigoriste, revient à Christian Scholl (1901-1957) avec un projet d’entrée pour le terrain de la Jeunesse d’Esch, une habitation particulière également à Esch et une autre à Pétange, trois projets des années 1930 de ce Wiltzois d’origine. Des dessins pour l’aménagement intérieur de l’hôtel Kohn (années 1940), se dégage une réelle atmosphère. Le LAM ayant désormais trouvé un lieu d’entreposage aux Archives nationales (cf. au sujet du « musée SDF » l’article de Josée Hansen dans le Land du 15.01.2015), on espère qu’il bénéficiera d’une section sur leur nouveau site et que l’on pourra voir ensuite, d’autres volets de la mémoire des constructeurs luxembourgeois.

L’exposition Papier – Linien – Raum est à voir jusqu’au 29 juillet 2016, à la galerie Nei Liicht, rue Dominique Lang à Dudelange. Ouvert du mercredi au dimanche de 15.00 à 19.00 heures. www.centredart-dudelange.lu et www.lam.lu
Marianne Brausch
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