Manifestation à Luxembourg. Plan de paix à Washington. Arrestation d’une ressortissante luxembourgeoise en Méditerranée

Sursaut ou effondrement

Une partie du cortège dimanche à Luxembourg-Ville
Photo: Gilles Kayser
d'Lëtzebuerger Land du 03.10.2025

« Regardez-vous. Vous êtes merveilleux, » flatte le professeur et activiste palestinien Abdelfattah Abusrour dimanche en fin d’après-midi sur la place Clairefontaine où a la manifestation contre le génocide de Gaza a fini son parcours. « Qui est musulman ? Qui est chrétien ? Qui est juif ? Qui est bouddhiste ? Qui est hindou ? Qui est athée ? Nous sommes tous des êtres humains à part égale. On défend ces valeurs qu'on appelle liberté, fraternité, égalité, justice et paix », a poursuivi l’orateur. Abusrour a fondé en 1998 un centre culturel dans le camp de réfugiés d’Aïda près de Bethléem en Cisjordanie après qu’un enfant de huit ans lui a dit vouloir mourir « parce que le monde était indifférent à son sort ». « Ces enfants méritent mieux que le désespoir qu’on leur laisse », a-t-il confié dimanche. Et le nombre de manifestants dans les rues de la capitale pour faire cesser la guerre dans la bande de Gaza a, semble-t-il, redonné espoir à l’orateur, l’espoir que les gouvernements européens agiront. Ils étaient plus de 5 000 à défiler du pied des tours des institutions européennes jusqu’au bureau du Premier ministre. Avec ferveur mais sans incident.

En ce dimanche ensoleillé, l’affluence a dépassé les attentes de la cinquantaine d’ONG participantes à la plateforme Letz Act for Palestine. Les associations espéraient entre 2 et 3 000 personnes. Une vue aérienne de RTL révèle le pont rouge recouvert d’un cortège de la même couleur sur tout son long (et sur une voie). Des partis de l’opposition ont soutenu l’appel. Ont été aperçus Marc Baum, David Wagner et André Hoffmann (déi Lénk), Dan Biancalana, Marc Angel et Maxime Miltgen (LSAP) ou encore Tilly Metz, Sam Tanson et Djuna Bernard (déi Gréng). L’Union des syndicats OGBL-LCGB avait également apporté son soutien, mais on a vu peu de blousons rouges siglés et encore moins de blouses vertes du syndicat chrétien. À l’OGBL et au LCGB on assure que nombre de membres étaient bien là, pas forcément sous leurs couleurs. Mais pas Nora Back, ni Patrick Dury, leurs représentants en chef.

Les manifestants ont notamment demandé que le Luxembourg et l’UE sanctionnent économiquement Israël. L’objectif ? Ostraciser le gouvernement Netanyahu et le contraindre à cesser les hostilités dans la bande de Gaza. Il s’agirait aussi de stopper la colonisation de la Cisjordanie, pour notamment permettre la mise en place d’un État palestinien qu’une dizaine d’États supplémentaires, dont le Grand-Duché, ont reconnu la semaine passée. Pour redonner vie à la solution à deux États, a expliqué le Premier ministre Luc Frieden (CSV) à la tribune des Nations unies. Mais le président américain a lui soumis lundi au Premier ministre israélien un plan de paix qui relègue la perspective d’un État palestinien à l’arrière-plan. Benyamin Netanyahu l’a accepté à Washington, mais son gouvernement à Jérusalem ne valide qu’une partie de ses vingt alinéas. Ce jeudi, la réponse du Hamas était encore attendu sur un projet qui s’apparente à sa reddition. En cas d’accord, un cessez-le-feu et la libération immédiate des otages israéliens doivent suivre. Dans le cas contraire, Benyamin Netanyahu promet de « finir le travail ».

Cette semaine, l’armée israélienne a coupé l’enclave gazaouie en deux à l’issue de son offensive sur Gaza-City. Durant la nuit de mercredi à jeudi, Tsahal a également intercepté (dans les eaux internationales) la quarantaine de bateaux de la flotte humanitaire, Global Sumud. Aux alentours de 6 heures ce jeudi, la coordination de la mission a perdu le contact avec sa ressortissante luxembourgeoise, Nora Fellens. Aux dernières nouvelles, les navires israéliens encerclaient son bateau, le Miamia (voir ci-contre). « Le Luxembourg est gravement préoccupé », communique le ministère des Affaires étrangères. Le gouvernement « appelle instamment les autorités israéliennes à garantir la sécurité de l’ensemble des participants (...) et à s’abstenir de l’utilisation de la force ». Les enjeux sont immenses alors qu’approche la date tragique et symbolique du 7 octobre.

Pierre Sorlut
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