Ticker du 6 janvier 2023

d'Lëtzebuerger Land du 06.01.2023

Le pneu en pin et huile de soja made in Colmar-Berg

Le groupe américain de pneumatiques Goodyear a dévoilé ce jeudi son pneu réalisé avec 90 pour cent de « matériaux durables ». Ce pneu conçu avec 17 ingrédients a été développé dans les deux centres de recherche de la multinationale, au siège d’Akron dans l’Ohio et dans le Luxembourg septentrional, à Colmar-Berg. Aux quatre types de noir de carbone (réalisés à partir de méthane, de dioxyde de carbone, d’huile végétale et d’huile de pyrolyse tirée de pneus en fin de vie), un matériau fondamental normalement fabriqué en brûlant des produits pétroliers, sont ajoutés de l’huile de soja (pour la souplesse), de la silice d’écorces de riz (pour l’adhérence), du polyester issu de bouteilles en plastique recyclées (pour le liant) ou encore des résines de pin bio-renouvelables. Ce pneu devrait être commercialisé d’ici 2030. Celui conçu pour 70 pour cent à partir de matériaux durables présenté en janvier 2022 sort en rayon cette année. Déjà une bonne année. pso

Transpirance

Le gouvernement a publié une mise à jour de son registre des entrevues juste avant la trêve hivernale. C’est la deuxième depuis la première édition, le 25 juillet, de cet outil utile à la transparence de la vie publique. La précédente mise à jour était intervenue le 6 octobre. Dans cet aggiornamento du 23 décembre, aucun nouveau rendez-vous avec des tiers ne figure à l’agenda du Premier ministre Xavier Bettel (DP) pour le deuxième semestre. Le dernier événement recensé en date est une réunion avec les représentants de l’Union commerciale de la ville de Luxembourg au restaurant gastronomique la Cristallerie, le 9 juin.

Interrogé à ce sujet, son chef de cabinet relate que l’objet des projets de loi et règlements élaborés par le Ministère d’État « n’ont presque jamais un impact commercial ou financier » : « La plupart des représentants d’intérêts sollicitent directement les ministères compétents dans la matière. Lorsque le Premier ministre rencontre des représentants d’intérêt tiers, les entrevues portent souvent sur des sujets transversaux et n’ont que rarement pour objet la recherche d’une prise d’influence sur une activité législative ou réglementaire du ministère », explique Luc Feller. Le conseiller de gouvernement souligne en outre que l’activité du Premier ministre au deuxième semestre a été occupée par de nombreux déplacements à l’étranger (conseils et sommets européens, ONU à New York, COP en Égypte, Japon, Canada ou encore Italie) et d’autres événements d’envergure au niveau national (tripartite, préparations et visites dans le cadre du discours sur l’état de la nation, sommet Benelux ou encore discussions sur le budget). « L’agenda du Premier ministre se remplit très rapidement, raison pour laquelle nous renvoyons de nombreuses demandes d’entrevue aux ministères compétents », informe l’hôtel Saint-Maximim.

Les autres ministres renseignent par conséquent davantage d’entrevues. Par exemple, Lex Delles (DP). Le ministre des Classes moyennes dit avoir rencontré le 7 décembre à son ministère des représentants de la Luxembourg Startups Association, Patrick Kersten et Eric Busch. Les représentants de la toute jeune association ont notamment demandé à « revoir substantiellement » certaines dispositions de la loi sur les droits d’établissement du 2 septembre 2011 dont le critère d’exclusion si les dettes dépassent les seuils « inadaptés aux startups ».

En contrepoint du registre publié par les membres du gouvernement et qui paraît avoir un intérêt démocratique, Reporter.lu a fustigé ce jeudi celui de la Chambre, « ein Gästebuch Ohne Nutzen ». Lors du débat préalable au vote du règlement instaurant la nouvelle procédure d’enregistrement des intérêts tiers côtoyant les députés, la langue du président de la Chambre Fernand Etgen avait fourché et il avait parlé de « registre de transpirance » (d’Land, 26.08.2022). pso

New kid in town

Cette semaine, le Conseil de la concurrence est devenu l’Autorité de la concurrence. L’institution, dorénavant un établissement public, est dotée de plus d’indépendance et de plus de pouvoir en vertu de la loi du 30 novembre 2022 transposant la directive européenne visant à harmoniser le réseau européen de la concurrence pour mieux veiller au bon fonctionnement du marché intérieur. « Au-delà de ses missions existantes liées à la mise en œuvre des règles de la concurrence, la nouvelle loi étend les pouvoirs de l’autorité à de nouveaux domaines pertinents pour les entreprises, notamment les pratiques déloyales dans le domaine agroalimentaire, les services dans le marché intérieur ou encore les relations entre les plateformes en ligne et leurs utilisateurs professionnels », avait communiqué son ministère de tutelle, celui de l’Économie, lors du vote de la loi. La nouvelle autorité aura pour principal chantier dans les prochains mois l’introduction du contrôle des concentrations des entreprises au niveau national. Un avant-projet de loi est attendu au printemps. Le 1er janvier, Pierre Barthelmé a été officiellement intronisé président du collège de l’autorité, pour une période de sept ans. Ce après une cérémonie officielle en présence du ministre Franz Fayot le 23 décembre dernier (photo : minéco). pso

Bettelism

Interrogé dans Le Quotidien paru lundi au sujet de la réforme fiscale avortée et sur les vœux de progressivité formulés ci-et-là dans la classe politique, le Premier ministre Xavier Bettel met en garde : « On a tendance à dénigrer la place financière, les fonds d’investissement ou encore l’industrie. D’importantes recettes fiscales sont générées par le secteur de la finance. On critique aussi que les gens ne paient pas assez d’impôts. Or des études sont venues démontrer que c’est une minorité qui paie la plus grande part des impôts. Il ne faut pas faire fuir ces gens. » Le chef du gouvernement se réfère aux analyses des données fiscales du Luxembourg 2021 et 2019 produites par le Conseil économique et social, notamment sous la houlette de ses membres Pascale Toussing (par ailleurs directrice de l’Administration des contributions directes) et de Jean-Jacques Rommes. On y lit entre autres que les sociétés de participations financières (Soparfis) lèvent 28 pour cent de l’impôt sur le revenu des collectivités. Face au Land (23.12.2022), François Mousel, futur managing partner de PWC Luxembourg et conseiller économique officieux du Premier ministre, soulignait justement l’importance de cette étude du CES pour calmer les ardeurs des partis de gauche pour redistribuer les richesses produites par la place financière, sous-entendant que ce serait prendre le risque que les soparfis quittent la juridiction et menacent l’équilibre du secteur financier. Dans cet entretien publié par le journal francophone, Xavier Bettel voit en la réduction du temps de travail proposée par les socialistes ou l’imposition sur les successions des « sujets délicats ». Il avance ainsi qu’il ne « fera pas » une réduction du temps de travail durant ce mandat ou un autre… puisqu’il affirme au passage qu’il ira au terme d’un troisième mandat le cas échéant. « On m’a déjà demandé de prendre la succession de Charles Michel comme président du conseil européen. La réponse est non. » pso

Léiwe Kleeschen

La veille de la Saint-Nicolas, les lobbies du secteur financier ont rendu visite à Yuriko Backes. À l’ordre du jour de cette entrevue avec la ministre des Finances libérale était une vieille rengaine de l’ABBL et de l’Alfi : le financement de la CSSF. Comme avant chaque élection, les lobbyistes ont renouvelé leur souhait d’un « financement partagé » (public-privé) de l’autorité de surveillance. La CSSF n’étant pas financée par le budget de l’État, elle doit couvrir ses frais via des taxes – et sanctions – collectées auprès des entités surveillées. Ce sont donc les banques, fonds d’investissement et réviseurs d’entreprises qui paient leur propre surveillance. Selon Catherine Bourin, membre de la direction de l’ABBL, ancienne membre du CA de la CSSF (qu’elle a quitté en octobre) et participante à l’entrevue du 5 décembre, la ministre des Finances n’aurait pas vraiment pris position par rapport aux doléances des lobbies financiers.

Le 1er janvier, la grille tarifaire de la CSSF a été adapté, de nouveau. La dernière hausse date d’il y a un an. Par le passé, les taxes furent haussées tous les trois ans pour suivre le rythme de croissance des effectifs de la CSSF, passés de 674 en 2016 à 953 en 2021. Il s’agit d’employés hautement spécialisés et rémunérés. Un tel accroissement a évidemment son prix. « La grille tarifaire a été modifiée en décembre 2021 surtout pour assurer le besoin de financement immédiat de la CSSF. Une nouvelle revue est nécessaire en 2022 pour couvrir les frais de fonctionnement futurs », lit-on dans l’exposé des motifs du règlement grand-ducal fixant les montants des nouvelles taxes. C’est que les frais de fonctionnement, se chiffrant à environ 144 millions d’euros fin 2022, augmenteront progressivement à 178,9 millions d’euros en 2023 puis à 187,3 millions d’euros en 2024. Une hausse continue qui devra surtout financer les besoins en nouveaux employés, mais également des investissements dans l’automatisation et l’informatisation qui, « à terme », devraient se traduire par une efficacité accrue, « permettant ainsi de répondre, dans la mesure du possible à effectif constant aux multiples attentes. »

Depuis le 1er janvier, une banque soumettant sa demande d’agrément devra payer 75 000 euros, un « forfait unique » déjà passé de 15 000 à 50 000 euros l’année dernière. La nouvelle fourchette des taxes annuelles se situe entre 116 500 et 520 000 euros (selon la somme des bilans) pour les succursales relevant d’un État tiers, et de 80 000 à 190 000 pour celles relevant d’un État membre. Quant aux coûts des visites « on-site », ils passent de 10 000 à 25 000 euros pour chaque contrôle effectué. Les firmes d’audit payeront mille euros la demande d’accès au stage (Ce forfait avait doublé l’année dernière). Étant donné la masse de stagiaires ingurgitée tous les ans par les Big Four, cela devrait donner une jolie somme. Les fonds d’investissements ne sont, eux, pas non plus épargnés par les hausses, même si celles-ci restent modiques. Les taxes d’instruction pour les OPC classiques montent ainsi de 4 400 à 4 650 euros, celle pour les OPC à compartiments multiples passent de 8 800 à 9 250 euros. bt

Pierre Sorlut, Bernard Thomas
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