Les dysfonctionnements au ministère de la Santé avaient amené le successeur du démissionnaire ministre de ressort Johny Lahure, Georges Wolfahrt, à faire voter à la va-vite la loi du 28 août 1998 sur les établissements hospitaliers, pour rendre impossible à l'avenir les abus qui avaient amené le scandale. La loi sur les établissements hospitaliers, pour définitivement clarifier la situation, devait être parachevée par la loi autorisant l'État à participer au financement de la modernisation, de l'aménagement ou de la construction de certains établissements hospitaliers. Cette loi devrait engager une enveloppe financière de 23 milliards de francs et le gouvernement compte faire voter le projet par les députés avant l'échéance électorale. Seulement, il y a plusieurs hic qui font en sorte que si la loi est votée à l'état actuel, l'on risque de se retrouver dans une situation analogue à celle qui avait amené les célèbres dysfonctionnements. Le point crucial en est que le texte s'inscrit dans la réorientation stratégique du paysage hospitalier. Cette réorientation stratégique est définie et par la loi sur les établissements hospitaliers et par le plan hospitalier national. Or, le plan hospitalier le plus récent, datant de 1994, a été abrogé en même temps que la loi modifiée du 29 août 1976 portant planification et organisation hospitalières qui lui servait de base légale. En d'autres termes, il n'existe plus à l'heure actuelle de plan hospitalier! Ajoutez à cela que des quinze projets hospitaliers à financer par ladite loi, près de la moitié se trouvent encore à l'état de conception, autant dire que les plans définitifs et les devis précis nécessaires à l'autorisation ministérielle des projets font défaut; que la Commission permanente pour le secteur hospitalier n'a pu aviser à ce jour que huit projets sur quinze, alors que la loi dispose que ces avis doivent être antérieurs à l'autorisation ministérielle; que l'Union des caisses de maladie qui intervient à hauteur de vingt pour cent dans les investissements ne possède pas de détails sur les dépenses éligibles; que le règlement grand-ducal déterminant les modalités et la procédure à suivre en cas d'autorisation n'existe pas encore et que la matière est régie pour l'instant par une instruction ministérielle contraire à la loi sur les établissements hospitaliers et contraire à la Constitution et - la liste étant loin d'être close - l'on se retrouve dans une situation carrément ubuesque. Les avis émanant des institutions et organismes concernés sont ainsi tout autre que positifs. Quant au Conseil d'État, il n'a pas pu ou voulu émettre d'opposition formelle (il le fait, pour la forme, dans un avis séparé) bien qu'il se soit fait un plaisir d'énumérer toutes les imperfections, contradictions voire illégalités du projet de loi. En ces conditions, un vote favorable de la Chambre des députés serait quasiment irresponsable. Mais le gouvernement semble mettre en jeu tout son poids pour que la loi passe avant les élections, question de parachever le partage du secteur hospitalier luxembourgeois et de définitivement imposer la clinique congréganiste du Kirchberg.
marc gerges
Catégories: Santé
Édition: 07.01.1999