La technologie c’est un peu de la magie. Elle est difficile à cerner par les néophytes et reste assez opaque pour le grand public, mais elle a l’avantage de brûler les étapes et permet aux petits pays d’entrer dans la cour des grands. Tout le monde sait situer les États-Unis et la Chine sur une carte. Ces pays ne peuvent passer inaperçus, et dans un monde globalisé, l’évolution de leur économie a un impact sur chacun d’entre nous. On ne peut pas en dire autant d’un pays comme l’Estonie. Beaucoup de gens ont du mal à situer ce petit pays sur une carte, et l’évolution de l’économie estonienne n’a que peu d’impact sur nos vies.
C’est là que la technologie peut faire des merveilles qui permettent aux petits pays des quatre coins de monde de réduire le gouffre qui les sépare des grands pays. Quand on dit États-Unis, on pense au dollar et à la technologie, quand on dit Chine, on pense à « pas cher mais puissant et surprenant », quand on dit Arabie saoudite, on pense au pétrole, quand on dit Suisse on pense aux banques, quand on dit Roumanie, on pense à Dracula, quand on dit France on pense au vin et au fromage, mais quand on dit Estonie, Lituanie, Slovaquie ou Bulgarie, on ne pense à rien.
Pourtant, c’est l’Estonie qui peut nous dévoiler les merveilles de la technologie et de la blockchain qu’elle cultive avec acharnement.
Ce petit pays est devenu indépendant en 1991 après l’effondrement de l’Union soviétique. À l’époque, seulement la moitié des 1,4 million d’Estoniens avaient une ligne de téléphone fixe, mais à la fin des années 90, les écoles estoniennes étaient toutes connectées online. En 2002 le gouvernement finançait un réseau Wi-Fi gratuit et cinq ans plus tard, il instaurait le vote électronique.
Enfin, en 2014 l’Estonie mettait en place le programme « e-residency ». Vous voulez obtenir une pièce d’identité estonienne ou avoir une résidence dans cette nation digitale ? Vous pouvez le faire sur internet en payant une taxe de cent euros (https://e-resident.gov.ee). Selon une étude d’Index Venture rendue publique en décembre 2018, l’Estonie est en tête des pays qui soutiennent les start-up. « Nous n’avons ni beaucoup de richesses ni de grandes quantités de matières premières, nous sommes donc obligés d’être intelligents pour survivre, a déclaré Rene Tammist, ministre estonien des Entreprises et des Technologies de l’information. Nous pouvons survivre en cherchant de nouvelles niches sur le marché global. Pour l’Estonie, cela veut dire s’engager dans les nouvelles technologies. »
« Nous sommes obligés d’être intelligents pour survivre », est une phrase à retenir. D’autres pays s’accrochent aux nouvelles technologies et à la blockchain pour faire le grand saut vers un avenir plus prospère. Le 1er octobre 2018, devant l’Assemblée nationale de l’Onu, le Premier ministre maltais, Joseph Muscat, a présenté son pays comme « l’île de la blockchain » qui a adopté les nouvelles technologies et les crypto-monnaies. « Je crois passionnément à la technologie qui révolutionne et change les systèmes, a-t-il affirmé. La blockchain fait que l’avenir de l’argent est dans les crypto-monnaies. Malte est le premier pays au monde qui a réglementé cette nouvelle technologie qui est née dans un vacuum juridique. »
Les effets de l’ouverture maltaise à la blockchain et aux crypto-monnaies se sont rapidement fait sentir. En mars 2018, la plateforme d’échange chinoise Binance, la success story de l’univers crypto, déménageait à Malte, petite île peuplée de 400 000 habitants. « Malte sera le centre de l’écosystème de la blockchain en Europe, a déclaré le fondateur de Binance, Changpeng Zhao. Ce pays sera le berceau des entreprises qui innovent dans la blockchain. » Outre l’Estonie et Malte, d’autres pays européens commencent à profiter des opportunités créées par les nouvelles technologies : la Suisse où le canton de Zug a été baptisé « La Sillicon Valley de la crypto », le Luxembourg et le Liechtenstein en sont deux autres exemples.
C’est toujours grâce à la technologie que l’homme a construit son avenir. Cette règle d’or s’applique depuis que l’homme a soulevé la première pierre pour mieux chasser le gibier, jusqu’à la digitalisation de l’argent et l’intelligence artificielle. Selon les analyses de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), les start-up de la haute technologie vont créer jusqu’à cinquante pour cent des nouveaux emplois les mieux payés. Les start-up estoniennes paient cinq fois plus d’impôts et de taxes à l’État que les entreprises classiques. « Alors que la Chine veut devenir le leader mondial dans le secteur des nouvelles technologies d’ici 2025, l’Europe n’en est qu’au début de l’intelligence artificielle, des ordinateurs quantiques et des nouvelles technologies, a déclaré le ministre Rene Tammist. Grâce à une nouvelle politique des start-up, l’Europe devrait avoir l’ambition de changer son avenir. » C’est là la magie de la blockchain : elle permet aux petits pays d’avoir de grandes ambitions. Ce n’est pas rien dans un monde où ce sont les grandes puissances qui décident des règles du jeu.