Alex Reding

Exploser les frontières

d'Lëtzebuerger Land du 18.11.2011

La récente newsletter de la galerie Nosbaum [&] Reding annonce la participation de plusieurs de ses artistes à la Foire internationale d’Istanbul (Yoshitika Amano, Stephan Balkenhol, Christian Frantzen, Sylvie Blocher, Tina Gillen, Damien Deroubaix, Jean-Luc Moerman, Manuel Ocampo, The Plug) et à la Biennale de Selestat (The Plug encore), d’autres au Tripostal à Lille (Karin Bisch, Nicolas Chardon, Damien Deroubaix) et la sélection d’œuvres de Deroubaix et Moerman dans deux expositions – une à Paris, l’autre à Berlin – curatées par Antoine de Galbert, collectionneur averti qui dirige la Maison Rouge, le lieu d’exposition parisien privé.

Cette activité internationale illustre le fait qu’Alex Reding a échappé au souci de ne pas avoir été invité cette année à la foire de Bâle et à la Fiac à Paris : ralentissement économique oblige, ces prestigieux marchés de l’art contemporain se sont en effet recentrés en invitant des galeries qui ne représentent que des valeurs sûres et quelques nouvelles venues qui seules pourraient surprendre… C’est qu’il connaît bien les deux côté de la barrière, car au départ, il avait lui-même choisi d’être artiste, plus exactement sculpteur. Mais il s’alarma très vite du risque de se trouver catalogué « local ». Une situation qui ne pouvait le contenter car il savait, de par ses études à l’étranger et son caractère inquiet, qu’il faut toujours être attentif aux lignes qui bougent.

Son parcours universitaire – études de sculpture aux Beaux-Arts de Paris et d’esthétique de l’art à la Sorbonne, puis à l’Akademie der Künste de Düsseldorf – lui a valu une bonne appréciation des contacts et des connexions à entretenir dans le contexte de l’évolution géo-politique artistique. Ainsi, suite à la chute du Mur de Berlin et de l’ouverture à l’Est, on se souvient de ses premiers choix de galeriste, à l’époque place de Strasbourg, où il exposa entre autres Jan Stieding ou Jens Wolf de la mouvance de l’école allemande du néo-réalisme. Ce sens très sûr pour la peinture figurative, combiné chez Alex Reding au goût pour l’abstraction géométrique issue des années 1920 – ce qui l’amène aussi à exposer l’artiste luxembourgeoise Tina Gillen et ses explorations architecturales –, l’éloignèrent de l’engouement général d’alors pour un autre médium : la photographie.

Après cet essai dans une ancienne épicerie du quartier de la gare, Alex Reding choisit celui, relooké, de la vieille ville au centre de Luxembourg en 2006. Un nouveau lieu plus « respectable » rassure assurément une clientèle de collectionneurs… Il n’hésite pourtant pas à y exposer Manuel Ocampo, le plus tras» des artistes de la galerie (actuellement à la Philara-Sammlung zeitgenössischer Kunst à Düsseldorf) ou l’inquiétant duo Bouvy/Gillis que l’on peut aussi voir en ce moment dans l’exposition collective Found in translation Chapter L au Casino – Forum d’art contemporain.

L’avantage du nouveau lieu rue Wiltheim est surtout pour lui de disposer de deux niveaux qui lui permettent d’exposer en parallèle des artistes reconnus. Et non des moindres, comme récemment David Lynch et Yoshitika Amano, le niveau bas au Scheiechlach étant plutôt dédié à l’exploration de la production de la génération montante, comme Hugo Canoilas qui a récemment fait le buzz grand public avec ses trois voitures simulant une sortie de route sur l’avenue Kennedy au Kirchberg. Parmi les jeunes, on compte aussi David Brugnon alias The Plug, dont la carrière internationale prend ces temps-ci de l’ampleur (participation à Paris à l’exposition Pearl of the North, acquisition par le Fnac français). Myriam Mechita, dont on se souvient des premières céramiques animalières rue Wiltheim, entre innocence et mort, est, elle, invitée à produire par la manufacture de Sèvres et les tableaux de Stephan Balkenhol habituellement visibles au Mudam, ne les cherchez pas. Ils sont sur les cimaises du château de Malbrouck qui lui consacre une exposition monographique (voir d’Land du 11 novembre 2011).

Alors Alex Reding aurait-il toujours peur de l’enfermement dans les frontières nationales ? Que nenni ! Ces jours-ci paraît en librairie sa publication Art Inc., qui répertorie quelque 800 œuvres de 24 collections d’entreprises du grand-duché.

Marianne Brausch
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