La scène est noire, la structure métallique portant les spots est descendue sur scène, un homme aux cheveux longs entre, torse nu, trois bougies blanches allumées sur l'avant-bras, fait quelques pas, puis ressort. Revient, habillé, accompagné bientôt d'un singe. «Nous vivons un nouvel obscurantisme,» dit une voix off. Brume, musique, tout contribue à une vision pessimiste du monde. Mais heureusement IL est là. IL - c'était d'ailleurs le nom d'une de ses dernières chorégraphies en solo -, c'est Jean-Guillaume Weis. Dans un monde décrit comme inculte, qui sombre dans le noir, Jean-Guillaume Weis est dans la lumière, il est la lumière: tout de blanc vêtu, il est attiré par le soleil et ne cesse de s'en rapprocher - pour prendre, devant le spot, des poses entre le dieu antique et les dieux du stade de Leni Riefenstahl. «Wer ewig strebend sich bemüht, den können wir erlösen,» pour citer le Faust de Goethe? Le rôle que Jean-Guillaume Weis s'est inventé pour son dernier spectacle Principe d'incertitude, en ce moment à Esch, est tellement caricatural qu'il en devient pathétique. Principe d'incertitude est basé sur la thèse de l'indéterminisme de Werner Heisenberg que Jean-Guillaume Weis a lu par hasard dans un magazine scientifique il y a deux ans. «Principe d'incertitude met en évidence les changements de vitesse et de rythme et crée ainsi l'illusion de comprimer ou de dilater le temps et l'espace, promet le communiqué de presse. Et souligne ainsi la relativité de la notion de temps et de rythme.» Donc, la lecture que le chorégraphe fait de la science est extrêmement ouverte et en même temps réductrice, car se limitant sur tout ce qui est inhérent à son propre être. Qui suis-je, Que sais-je? Et pourquoi je danse? Pour cela, les autres êtres qui peuplent son univers doivent être moins beaux et plus bêtes que lui. L'un d'eux (David Russon) en est même réduit à être un singe - ce qui nous permet, en passant, une petite ballade avec Monsieur Darwin. À l'extrême opposé du précédent spectacle de Jean-Guillaume Weis à Esch, Noise, qui vivait de la poésie des petites choses, Principe d'incertitude pèche par prétention et tombe souvent dans le prétentieux et la mégalomanie - côté par lequel il devient carrément agaçant. Quand les baffles jouent le dernier mouvement plein de pathos des Tableaux d'une exposition de Modest Moussorgsky et que Jean-Guillaume Weis semble découvrir les possibilités de son corps sous nos yeux, joggant sur les vagues du beau décor de Trixi Weis, cela en devient risible. Pourtant, il y a des moments d'une fragilité touchante ou d'une simplicité poétique, notamment grâce à Dominique Thomas, qui n'est pas danseur, mais acteur. Ici, il se fait narrateur, dompteur de singe, sert du thé au public et, modestement, timidement, s'avance parfois à quelques mouvements de danse copiés sur Jean-Guillaume Weis et tout son corps pourtant imposant est sous tension. Ce sont ces moments exceptionnels qui sauvent Principe d'incertitude du désastre.
Principe d'incertitude des Guillaume Weis Dance People, chorégraphie : Jean Guillaume Weis ; avec Jean-Guillaume Weis, Dominique Thomas et David Russon sera encore dansé les 25 et 26 janvier ainsi que les 10 et 11 février au Théâtre d'Esch ; réservations par téléphone au 54 97 31 ou e-mail: reservation@villeesch.lu. Le 19 mars, le pièce sera reprise à la Tuchfabrik à Trèves.