Stade national de football

De la com, sans plus

d'Lëtzebuerger Land du 04.10.2013

Bien sûr qu’il est agréable d’accueillir Michel Platini, un peu en voisin ; et rassurant d’entendre confirmer l’accord de l’État et de la Ville de Luxembourg dans le partage du coût. Fallait-il pour cela rameuter la presse ? Et comble d’effronterie, un document est sorti d’un cartable, agité aux yeux de l’assistance, mais vous n’en saurez pas plus, vous ne verrez rien. Une séance de (futile) com, sans plus. Il est vrai que le président de l’Uefa a bien joué son rôle, d’insister rudement sur le caractère pourri du stade Josy Barthel (ce que tout un chacun à Luxembourg sait depuis une dizaine d’années), et puis on est en période préélectorale.

Quel document, en fait ? C’est là que le bât commence à blesser, et déjà on n’avait pas pu se mettre d’accord sur sa nature autour de la table. Avant-projet, affirmait l’un, où Platini saluait d’ailleurs l’absence de grillage, étude de faisabilité, minimisait l’autre. Comme si c’était la même chose. C’est ce document, indéfinissable, qui sera présenté en novembre au conseil communal. La Fédération en avait chargé une architecte (pour éviter tout malentendu, sa personne n’est nullement en cause), il a été remis fin janvier au ministre, en mars au bourgmestre.

Question : sur quoi le conseil communal va-t-il se prononcer ? Sur la simple décision de refaire (reconstruire) le stade, pas de problème, le plus tôt ça se fait, le mieux c’est. Sur un avant-projet, et alors on est d’emblée en contradiction avec les directives européennes et la loi luxembourgeoise sur les marchés publics. Au-delà de cinq millions de coût, de 200 000 euros d’honoraires, il faut une publication préalable au moment de lancement d’une des trois procédures de présélection prévues : appel de candidatures sur dossier de références, concours, de quelque type qu’il soit, ou enfin consultation rémunérée (mais la loi et le règlement grand-ducal prévoient une négociation avec au moins trois candidats, et je n’ose envisager des candidatures bidons). Il ne peut être question qu’un utilisateur refile un (avant-)projet au maître d’ouvrage public.

Ce que cela signifie ? Tout simplement qu’on a pris les choses par le mauvais bout. Et que pour se conformer aux directives européennes et à la loi luxembourgeoise, on est maintenant resté planté sur la ligne de départ. Et que de temps perdu. Alors qu’il aurait été logique, à la fin de l’année passée, d’établir un programme, sachant de toute évidence que l’opération à la route d’Arlon était possible (finalement, on ne fait guère plus grand, et la piste d’athlétisme disparaît), connaissant parfaitement les normes de l’Uefa. Aux architectes et ingénieurs d’en tenir compte dans leurs projets. Un programme qui aurait permis au début 2013 de lancer la procédure juste (une des trois possibles au choix), et avec un peu de chance, nous nous trouverions aujourd’hui en présence d’un projet qui pourrait être proposé à qui de droit, réalisable de suite. En plus, comme on aime à dire, du choc des idées…

Des exemples de bonne (et rapide) conduite des opérations (jusqu’au dénouement) existent à l’étranger. Je ne vais plus ressortir celui de la transformation radicale du Letzigrund, à Zurich. Ceci quand même, en passant, pour féliciter les habitants du quartier : on leur a demandé leur avis, on est friand de référendum en Suisse, à 75 pour cent ils étaient favorables. J’ai peur qu’il n’en soit pas de même dans notre pays, à lire les internautes où l’on n’est même pas au niveau du café du commerce, ça vole très bas, à ras du comptoir.

On connaît la loi de Murphy qui suggère que tout ce qui peut mal tourner, va mal tourner. Il lui faut absolument adjoindre, ou plutôt placer avant même toute amorce réelle, une variante luxembourgeoise : tout ce qui peut être entrepris de travers, sera entrepris de travers, allégrement.

Lucien Kayser
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