Yvan vous doit, sinon des excuses, du moins des explications concernant son silence. Eh bien, après avoir croqué la politique, il a craqué pour elle, a franchi le Rubicon et se retrouve listé comme candidat1. Voilà un drôle de mot d’ailleurs qui nous vient, comme tant d’autres, du latin. Candere, nous dit le Gaffiot, veut dire « chauffer à blanc », voire « être d’une blancheur éclatante ». À Rome, le candidatus, le « vêtu de blanc », désignait celui qui briguait une fonction et revêtit pour cela la toge blanche, symbole de droiture et de morale.
C’était il y a 2 000 ans, me direz-vous, et il est vrai qu’aujourd’hui plus aucun candidat n’a la candeur de se réclamer du blanc, bien qu’un grand nombre d’entre eux soient des blanc-becs, c’est-à-dire qu’ils postulent pour la première fois. Non, de nos jours, les candidats sont bleus, verts, rouges, roses, oranges, voire bruns. Pour compliquer le tout, les oranges méritent le prix citron, les bleus sont loin d’être fleur bleue, les verts n’ont plus leur verdeur d’antan et les roses ont enfin retrouvé un peu de leur rouge et de leurs épines. Les trois derniers se verraient bien, paraît-il, dans une coalition arc-en-ciel ce qui redonnerait, vous en conviendrez, un peu de couleurs à une politique dominée ces dernières décennies par la grisaille plus encore que par le noir du soir.
Si Yvan franchit aujourd’hui le pas, c’est qu’il y va donc aussi de l’esthétique. Depuis l’Antiquité, nous savons que le beau, le bon et le vrai ont partie liée, bien que l’art moderne ait depuis longtemps battu en brèche cette apparente évidence. Mais comme la politique est un art fort ancien, le débat public aujourd’hui se doit d’être esthétique et vrai, et il doit redonner de la couleur à un pays qui communie depuis plus d’un quart de siècle dans le culte de Juncker et de son parti, dont il a accepté avec délectation cadeaux et caresses, tout en feignant d’oublier le fameux adage : « Timeo Danaos et dona ferentes. » Mais l’heure est peut-être enfin venue d’écouter Nietzsche, mais oui, qui écrivit dans Der Fall Wagner : « Wir kennen alle den unästhetischen Begriff des christlichen Junkers (…) dies gute Gewissen in der Lüge. »
Une fois n’est pas coutume, dans les semaines qui viennent nous pouvons donc allègrement discuter des goûts et des couleurs. Nouveau venu en paul-itique, Yvan vous invite donc à vous disputer autour des différents slogans en lice :
CSV : Mir wölle bleiwe wat mer waren !LSAP : Mir wölle bleiwe wat mer gin !Verts : Mir wölle bleiwe wat mer sin !DP : Mir wöllen hale wat mer hun !ADR : Si solle bleiwe wou se sin !