Comme t'y es belle

Femmes, je vous aime… un peu!

d'Lëtzebuerger Land du 04.05.2006

Premier film solo de Lisa Azuelos (elle a, entre autres, cosigné le scénario de 15 août), Comme t’y es belle a été coproduit par Jani Thilges, de Samsa. Tourné en partie au Grand-Duché l’an dernier, le film a été présenté en avant première à Utopolis vendredi dernier, 28 avril, en présence de la réalisatrice et de ses actrices. Le film relate quelques jours dans la vie de quatre filles, sœurs, copines, cousines, de 25 à 40 ans, célibataires, mariées, séparées ou divorcées. Avec ces grands points communs d’être belles, aisées financièrement, larguées en amour, et surtout, toutes quatre issues d’une culture séfarade pur jus. Il y a là Isa (Michèle Laroque), qui jongle plus ou moins habilement entre son salon de beauté en re- dressement judiciaire, ses enfants et ses amants, sa sœur Alice (Valérie Benguigui), tiraillée entre son bel amant et son mari macho, leur cousine Isa (Aure Atika), obnubilée par son ex, et enfin Nina (Géraldine Nakache), l’amie de la famille, amoureuse de Simon (David Kammenos), le frère d’Isa et Alice. Les quatre femmes se retrouvent régulièrement pour mettre en commun leurs mésaventures amoureuses. Une impression de se retrouver devant la télé ? Oui. Ces quatre jeunes femmes ne sont pas sans rappeler les héroïnes de Sex and the city, la série américaine à succès, le milieu juif et parisien en plus. La scénariste-réalisatrice a choisi de placer son récit dans un contexte on ne peut plus contemporain: une galerie de personnages des plus modernes, confrontés à un milieu socioculturel traditionnel. Les femmes se retrouvent souvent en train d’argumenter face aux règles parfois rigides de leur religion, avec un garde-fou maternel interprété par Marthe Villalonga, définitivement abonnée à ce type de rôle. Elles passent de leurs rendez-vous professionnels ou privés à leurs enfants, sans arrêt pendues à leur téléphone, autant de rituels qui caractérise la femme actuelle. Le but ici est bien d’entraîner le spectateur, surtout la spectatrice, à l’identification, un but facilité par les nombreuses utilisations de péripéties faciles : les repas entre copines, les soirées familiales… Cette bande, si attachante soit-elle, apparaît inévitablement caricaturale. Un parti pris de la réalisatrice, familière de cet humour juif qui sait aller très loin dans l’autodérision (les mères ultra-possessives, l’importance de l’apparence). Lisa Azuelos avoue avoir voulu par ce film rendre hommage à ces mères juives qui en font « toujours un peu trop, mais si importantes dans la culture juive, » dit-elle. Des personnages féminins aux premières loges donc, mais qui relèguent les hommes, et les enfants, au rang de simples accessoires aux bras des femmes. On ne se préoccupe jamais de leur point de vue, sauf s’il sert les femmes (comme la fille de Léa, utilisée uniquement pour rendre compte du changement psychologique de sa mère). On assiste à une  prise de pouvoir très superficielle des femmes, dont la seule libération semble d’être le droit à être aimée…  Ainsi, malgré une fonction divertissante plutôt réussie, les règles imposantes et éculées de la comédie sentimentale ne permettent pas à Comme t’y es belle de se rendre inoubliable. La réalisatrice explique : « l’ambition n’était pas de faire dans la nouveauté, mais de transposer le genre dans un autre milieu ». Ce manque d’originalité assumé lui permet donc de plonger parfois ses personnages dans des situations clip, ce  les qui abêtit, comme cette scène où Alice se rend compte de l’amour qu’elle éprouve pour son amant alors qu’elle écoute L’envie d’aimer, cette chanson qu’ils fredonnaient ensemble, tube d’une comédie musicale aussi connue que fade. Ces difficultés d’être femme et mère ne trouvent donc pas ici un traitement audacieux, mais le jeu des quatre actrices et l’utilisation judicieuse de l’humour lui confère son bon point, celui du film à voir entre copines pour se vider la tête.

 

Marylène Andrin
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