Main de fer sur disque de velours

d'Lëtzebuerger Land du 27.10.2017

S’il y’a quelques années, on avait dit à Hélène Marchon qu’elle ferait danser les belles et beaux de nuit dans la capitale luxembourgeoise, elle n’y aurait probablement pas cru un instant. Car si elle vient d’une famille de sérieux mélomanes, la jeune trentenaire a tout d’abord eu d’autres ambitions qui l’ont amenée à diriger aujourd’hui l’antenne grand-ducale d’une grosse société de conciergerie internationale... CEO le jour, elle sort ses meilleurs sons la nuit et s’est glissée discrètement en quelques mois au stade de figure incontournable auprès des noctambules toujours plus nombreux de l’axe Place de Paris – Bonnevoie.

Originaire d’Audun-le-Tiche, Hélène grandit auprès d’un papa musicien de la première heure et de deux frères qui partagent la passion familiale : « Il y avait toujours de la musique à la maison... Quand j’étais petite, j’étais même persuadée que tous les pères jouaient du piano ou de la guitare comme le nôtre ! ». Dès l’enfance, la fratrie s’amuse à trouver ce qui plaît le plus à leurs oreilles juvéniles, mais c’est bien à partir de l’université que la cadette – titre qu’elle partage avec son frère jumeau Charles – va affiner ses goûts d’adulte. Elle étudie alors l’administration et l’économie à Nancy, mais ne trouve aucune spécialisation qui la convainc au terme de sa licence. Elle passe donc un concours parallèle d’entrée aux écoles de commerce et intègre l’ICN dans la même ville où elle obtient son master, qu’elle célèbre avec un long voyage : Asie du sud-est, Nouvelle Zélande, Nouvelle Calédonie et Australie, où elle séjourne pendant plusieurs mois.

Le retour en Europe est difficile, mais Hélène Marchon n’est pas du style à se laisser aller... Agréablement surprise par le secteur du marketing et de la communication grâce à plusieurs stages, notamment chez PWC Luxembourg, elle envoie des CV à tout va et se fait vite repérer par Jérôme Grandidier, qui la recrute pour son service événementiel de location de voitures de luxe. Ils créent ensuite ensemble une société de conciergerie rachetée en 2014 par le groupe qui l’emploie aujourd’hui. Installée à Luxembourg et fermement décidée à y rester, la jeune femme aime sortir, mais ne trouve à l’époque pas souvent chaussure à son pied : « Il y a de nombreux endroits très chouettes à Luxembourg, mais je n’étais que rarement surprise par la qualité ou l’originalité de la sélection musicale ». Fan de rock indépendant mais aussi des ténors de l’électro comme Vitalic ou Digitalism, Hélène prend alors ses pénates au Gudde Wëllen et aux Rotondes.

C’est cependant au Paname qu’elle va passer pour la première fois derrière une table de mixage, suite à une discussion toute simple avec le manager de l’endroit : « Un soir, je lui ai dit que la musique n’était pas géniale, il m’a dit de faire mieux, j’ai dit d’accord », s’amuse-t-elle sans prétention aucune. D’abord derrière le bar entre la caisse et les cocktails, elle y officie depuis régulièrement avec une paire d’autres résidents. Puis c’est avec l’équipe du Strogoff, autre spot immanquable de la Place de Paris, qu’elle crée une petite programmation pointue pour l’afterwork du jeudi et le brunch du dimanche. À ces occasions, elle peut distiller librement tout ce qu’elle affectionne : tout d’abord l’électro parisienne, « surtout quand ça parle français, je trouve ça plutôt sexy », mais aussi les influences disco et hip hop de ses playlists.

Ses influences à elle, Hélène les trouve pendant ses voyages, lors desquels elle met un point d’honneur à aller danser dans le dernier bar en vue, dans ses recherches personnelles, mais également grâce à un joli projet dont son jumeau lui a fait la surprise : une page « Musique pour ma sœur » où Charles, lui aussi toujours adepte de découvertes musicales et habitant Paris, publie un morceau de son choix par jour pour elle et ceux qui la suivent... « C’est une attention géniale de sa part, une vraie continuité du lien musical qu’on a toujours eu ». Loin des égos parfois surdimensionnés des DJs professionnels, Hélène Marchon n’aspire qu’à partager, transmettre et danser tout en relevant les défis quotidiens de sa carrière, et pour celles et ceux qui voudraient voir de quel bois la demoiselle se chauffe, ça se passera le 23 novembre au Paname et le 2 décembre au Strogoff.

Fabien Rodrigues
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