Entretien avec Gilli Milligan de Torpid

«Kick some sweet ass!»

d'Lëtzebuerger Land du 12.01.2006

De : À : L'annonce que Torpid allait enregistrer son prochain album chez Steve Albini, tombée à l'automne dernier, a fait l'effet d'une bombe dans le milieu musical au Luxembourg... Comment as-tu eu ce contact et surtout, qu'est-ce que tu attendais de cet enregistrement?De : À : [lt] josée hansen[gt]Well, I didn't know bombs could do any harm! C'est peut-être vrai que la nouvelle fut un petit acte terroriste dans la scène au Luxembourg, mais cette étape n'est rien d'autre que le progrès de la scène au Grand-Duché et de ce que nous faisons... We just want to make music. (Check it out : across the pond: Mutiny on the Bounty viennent de faire leur tournée là-bas). Après avoir assisté en 2003 à Heidelberg à un concert de McLusky, j'avais discuté avec John, le chanteur, qui m'a en fait motivé de me mettre en contact avec les studios à Chicago. En effet, le contact avec personne d'autre que le gourou du rock underground, Mister Steve Albini, n'était pas si difficile que ça – so close and yet so far away... pick up the god damn phone and give him a call! De nos jours, Internet et le téléphone nous donnent la possibilité de faire presque l'impossible. Ce que moi j'attendais de cet enregistrement? Ben franchement, pas la même chose que Torpid, car personnellement, je trouvais que c'était une des meilleures expériences qui m'attendait. Déjà, le fait d'enregistrer un nouvel album me met un grand sourire dans la figure. Et en plus, c'était à Chicago! Too effin great to be true! Ce que j'attendais vraiment, c'était d'enregistrer un bon album avec Pol et notre nouveau batteur, Simon, qui reflète encore une fois de plus une progression dans ce que nous faisons. On a écrit cet album plus ou moins en quatre mois. Pour Torpid c'était un nouveau challenge dans notre histoire qui s'acheva à Chicago. En ce qui concerne les attentes de Torpid, je crois que là, on est tous du même avis: On veut jouer plus. Plus ou moins bien ensemble. On veut évoluer ensemble… Il est fort temps de dépasser ce premier stade, et avec ce nouvel enregistrement, on est confiant de trouver un label et un distributeur qui évoluera avec nous dans tous les sens. Torpid style!De : À : Vous veniez à peine de publier votre quatrième album, Bulkhaul, dont Backline dit qu'il représente l'espoir de bannir un jour les guitares acoustiques et les synthés des scènes. Votre rock puissant, basé sur la constellation indé de base guitare-basse-batterie-voix a quelque chose de particulièrement attractif sur scène. Pourtant, vos performances live se font rares, surtout au Luxembourg. Pourquoi? De : À : [lt] josée hansen[gt] Je ne pense pas que Bulkhaul représente l'espoir de bannir un jour les guitares acoustiques et les synthés des scènes; Bulkhaul est plutôt le résultat de ce que nous aimons faire musicalement. Et par pur hasard cela se déroule sans guitare acoustique et sans synthé. De l'autre côté, il faut dire que chacun dans le groupe apprécie énormément les guitares acoustiques et les synthés, mais ce n'est pas du tout ce qu'on recherche quand nous créons de la ‘zique. Nos ingrédients sont très simples: nous sommes à trois, pas de super schnick-schnack – back to the roots. En général, moi j'aime pas trop le fait d'avoir 666 effets pour ma gratte et en ce qui concerne la basse, c'est pratiquement la même chose. Electric guitar – bass – drums, the three fine ingredients to make a fine cake. Me yelling in the background would be the icing ! En ce qui concerne la quantité de nos concerts ces derniers temps, ben franchement, en 52 semaines, nous avons eu exactement 19 concerts un peu partout. Je trouve que c'est une bonne moyenne pour un groupe dont les membres ne vivent pas dans le même pays, il ne faut pas oublier que tout le monde travaille full-time. En plus, Torpid a sorti un nouvel album l'été dernier et les derniers mois de 2005, on a écrit un brand new album qui fut enregistré début novembre à Chicago avec Steve Albini. Cette préparation pour Chicago fut un autre facteur qui a pris du temps à organiser et à planifier! En tout cas, Torpid continuera à bosser tant que nous pouvons dans tous les sens. Je pense qu'en 2006, Torpid aura enfin la chance de jouer beaucoup plus car d'abord on a la sortie d'un single et puis la release du nouvel album qui sortira en cours d'année, c'est-à-dire, on est chaud pour jouer, on pourra commencer to kick some sweet ass! Si on joue le double en nombre de concerts de cette année, alors ce serait plus ou moins, en moyenne, un concert par semaine. If I could, I'd play two gigs a day! Productif, non?De : À : Je n'ai jamais voulu dire que vous n'étiez pas productifs, au contraire, je vous trouve extrêmement prolixes – sachant en plus que tu as des projets solos à côté. Mais ce que je regrette, c'est que la reconnaissance publique tarde encore un peu, non? Tout le monde de la scène rock vous cite toujours en exemple de «ceux qui ont osé le saut à l'étranger», mais il demeure que, malheureusement, vous ne pouvez pas encore vivre de votre musique. Ou, autrement dit: Sony n'a pas encore frappé à la porte... De : À : [lt] josée hansen[gt] C'est vrai que les trois membres de Torpid ont tous des projets à côté du groupe, que ce soient des projets solos ou d'autres groupes. C'est aussi vrai que la reconnaissance publique tarde un peu, mais ça franchement, je m'en fous. Si Torpid commençait à ne faire de la musique que pour le public, alors je commencerai à me poser des questions, car d'abord on fait la 'zique pour nous-même. Ça sonne peut-être un peu égocentrique, but that's the way the bunny hopps! Tu vois, au Luxembourg, ceux qui font de la bonne musique, à mes yeux, n'ont jamais eu la reconnaissance publique, tout simplement parce que les gens qui s'y intéressent sont une minorité dans le pays: we ain't talking mainstream – et nondidjeu le mainstream de Luxembourg (Eldoradio, RTL, etc…) n'ont jamais fait un pas vers les musiciens qui font de la bonne musique. C'est toujours l'inverse. Si tu veux faire diffuser tes créations, alors c'est à toi d'aller chez ces institutions. C'est grâce à cette évolution qu'il reste un peu impossible de vivre de notre musique au Luxembourg. Il faut tenir aussi en compte que le Luxembourg est petit et même si tu es important au Luxembourg, tu es un Nobody dans le reste du monde. À l'heure actuelle, il est impossible pour que Torpid puisse (sur)vivre de sa propre musique… We'd all starve of hunger. C'est peut-être vrai que Torpid a osé faire le saut à l'étranger, mais ça change pas grande chose. Les conditions sont pareilles et aussi pourries. Il a fallu de nouveau se battre pour ce qu'on est. Évidemment, dans notre cas, c'était un nouveau challenge de faire ça à l'étranger – même si je ne considère pas forcément la Belgique comme «l'étranger». Il existe des milliers, non, des millions de groupes, et le fait de s'installer à Bruxelles nous permet non seulement de découvrir un nouveau milieu musical, mais aussi de faire la connaissance de nouveaux gens et un nouveau public. Pour la suite, je ne pense pas qu'on va attendre jusqu'à ce que Sony viendra nous frapper à la porte. On reste indépendant. D.I.Y. (Do it yourself, ndlr.)De : À : Vous revenez tout juste des États-Unis, où vous avez enregistré fin novembre: Comment se sont passés les enregistrements? Comment était le contact avec Mister Albini? Et quelle sera la suite? Quand est-ce qu'on pourra enfin l'écouter, ce disque?De : À : [lt] josée hansen[gt] Les enregistrements se sont passés très smooth. Chicago, c'est la bonne société de consommation américaine: c'est la ville d'Al Bundy. Le studio lui-même est bien équipé, professionnel et même motivant. On habitait carrément dans les studios, ce qui était déjà assez pénard les jours de travail. Il nous a fallu huit jours pour enregistrer et mixer neuf morceaux. Le meilleur c'est tout simplement le fait que tu travailles avec les bandes analogiques de deux pouces. 2 inch kicks ass – and always will ! Pour nous, c'était presque la fin de notre aventure et ces jours étaient le moment de finaliser tout ce sur quoi on avait bossé les mois avant. C'était une année assez remplie, un nouveau batteur, plein de concerts, écrire tout un nouveau set et tout simplement organiser le voyage. Le contact avec Albini fut très professionnel. Il maîtrise son boulot au détail. Son français est assez bien aussi. Au début c'est clair: il veut savoir comment on veut faire, car le temps presse. Les premiers jours, tu bosses plus ou moins douze heures par jour. La tension est là, mais après le troisième jour on se détend car la majorité du travail est fait. La conversation avec l'équipe qui y travaille, aussi avec Albini lui-même, est alors devenue plus conviviale. D'ailleurs, pour Steve Albini, rencontrer des gens de Luxembourg était aussi une nouveauté. Ensuite, Big Ben était notre prochaine victime: Torpid vient de rentrer tout frais de Londres, où nous avons masterisé notre album aux Abbey Road Studios, par Steve Rooke. De nouveau un grand homme qui a déjà travaillé avec tout ce qui est légendaire. Nous sommes en train de planifier la suite: on a quelques concerts prévus, puis nous prévoyons une tournée un peu partout avec les Kitshickers, en avril. Je pense que l'album sortira au plus tôt en été, mais vu que cette période sera chaude pour la sortie, on pensait que le début de l'automne sera une bonne saison pour la sortie de l'album qui s'appelle… step by step. Ce mois-ci, nous jouons au Luxembourg et aux Pays-Bas; en février en Allemagne et en France, mars en Angleterre; en avril tournée en Allemagne et en Belgique. À part toutes ces dates, il faut maintenant nous concentrer sur la pochette, le pressage, la distribution et éventuellement un label. En tout cas, pour voir notre nouveau set et le disque il faudra attendre plus ou moins jusque septembre.Après avoir joué mercredi soir avant The Robocop Kraus à la Kulturfabrik à Esch, Torpid sera, ce soir, le participant luxembourgeois au festival Eurosonic à Groningen, choisi pour cela par la radio 100,7, qui diffusera le concert ultérieurement Pour plus d'informations sur le groupe: www.torpid.lu.

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