CD Exonerate de Javies

Never judge a book by its cover

d'Lëtzebuerger Land du 24.04.2008

En ignorant ce fameux adage, vous risquez de passer à côté d’une formation locale qui pourrait en surprendre plus d’un ! En effet, l’hideuse pochette d’Exonerate de Javies pourrait faire fuir tout esthète qui se respecte et laisser se morfondre ce premier jet dans les bacs d’in­vendus, sort qu’il ne mérite pourtant pas. Un conseil, les gars : la prochaine fois, vous réviserez vos bases de marketing ! 

Pourtant, ce jeune sextet a su trouver les arguments nécessaires pour convaincre le label local Winged Skull de sortir cet Exonerate.Ce qui surprend d’emblée dans le chef de cette formation, c’est l’énergie qui se dégage de cet album. Une énergie communicative qui réussit à maintenir une certaine attention. D’emblée, dès que résonnent les premiers tintements de cloche à vache de Lethal dose, ça déboule sévère comme si les Artic Monkeys tapaient la bamboula avec Danko Jones. Il faut dire que Javies pos­sède un atout non négligeable : la voix de son chanteur dégage une puissance d’ogre pantagruélique. 

Mais ce n’est pas tout, le groupe derrière serre assez bien son jeu et sert de tremplin idéal à cette débauche d’énergie. Puis, Natural-born lover nous ressert le couvert, tout en énergie rock. On sent l’influence des groupes mentionnés ci-dessus, mais l’ombre des Foo Fighters et d’AC/DC plane également au-dessus de la marmite aux inspirations. Troisième morceau, Superstar, quelques notes de piano changent le ton et (r)appellent le Madness dernière période, mais dès le refrain, la distorsion des guitares s’insinue dans les arrangements pour aboutir sur la britpop sous testostérone. Plus mécanique, He calls himself… tormentor et ses cassures, montre la facette la plus personnelle du groupe malgré un chant qui aurait mérité plus d’attention (et moins d’aigus). Jusque-là, rien à redire, Javies convainc dans l’ensemble. C’est après que les choses vont se gâter petit à petit. 

Sur Between sunspots, malgré un refrain tonitruant et efficace à souhait, qui contraste avec le couplet dominé par un clavier mélancolique, le morceau sombre corps et âme par l’entremise d’un pont aussi inutile que pompier. Rebelote sur Far away, qui avait tout pour réussir (pour preuve sa belle carrière radiophonique locale), une mélodie digne de Coldplay, une voix sobrement émouvante et un piano rayonnant, mais l’arrivée des chœurs pompiers et surtout un solo de guitare dégoulinant enlise irrémédiablement l’affaire. Panic indie air refout la patate avec son optimisme sympathique, sympathie qui vire à l’enthousiasme par un refrain engageant avec orgue prédominant, mais à nouveau, le pont incongru fait son œuvre...

Insane, plus simple et limpide, remporte l’adhésion et remonte la barre. Why not, plus anecdotique laisse sa place à Oxtail, assez direct et efficace, qui aurait dû clore l’album. Mais c’est une scie innommable, façon feu de camp, qui s’en occupe et voit le chanteur, qui approchait pourtant le sans faute, pousser la bêlante comme les pires Nickelback et consorts…

Après analyse, on se rend compte que cet album, plutôt honnête, aurait fait un EP remarquable. Avec une moitié de titres irréprochable, un quart qui aurait nécessité plus de vista et le reste à jeter (deux morceaux), Javies s’en tire plutôt bien, et devrait, avec un peu plus de patine, faire vraiment mal. Affaire à suivre donc…

David André
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