Où le cycliste est roi

d'Lëtzebuerger Land du 21.04.2023

Vous est-il arrivé d’être paumé en rase campagne en raison d’une panne de vélo ? Si oui, dommage que vous ne connaissiez pas encore The Happy Cyclist. L’entreprise, qui vient de fêter son premier anniversaire le 19 avril, est doté d’un atelier mobile qui se déplace là où se trouve le client cycliste. Emmanuel Plattard, son fondateur de 29 ans, a conclu, après une étude de marché, qu’un tel service de réparation flexible faisait défaut au Luxembourg et qu’il fallait y remédier. Le rythme auquel croît sa start-up en est confirmation : Avec un investissement qui a été rentabilisé après deux mois et demi, il a déjà effectué 2 000 interventions sur des vélos et, surtout, le carnet de ses abonnés ne cesse de croître. Pour l’hiver, Emmanuel avait anticipé une baisse de cinquante pour cent de ses interventions alors que cette diminution ne s’est chiffrée qu’autour de 25 pour cent. Preuve que la majorité de ses clients sont des aficionados qui prennent le vélo en toutes conditions météorologiques. Et c’est précisément que souhaite encourager The Happy Cyclist, société à impact sociétal (SIS) qui « vise la promotion de la mobilité douce et montre les bénéfices du cyclisme pour les individus, les entreprises et l’environnement ». En citant Eddy Merckx sur sa page web : « Ride as much or as little, as long or as short as you feel. But ride. »

Être abonné signifie, pour le client, qu’il peut choisir parmi différentes formules qui prévoient un certain nombre d’interventions gratuites en termes de coût du travail contre un paiement mensuel. Il suffit de contacter l’équipe par Whatsapp et l’intervention sera en principe effectuée dans les 45 minutes (jusqu’à 72 heures si cela nécessite une pièce compliquée) où que le client se trouve (ou bien sûr, chez lui). Dans 90 pour cent des cas, le vélo, électrique ou conventionnel et toutes marques confondues, est réparé sur place.

Comme le suggère le nom de la société, pour Emmanuel le client a le dernier mot. L’ancien employé dans l’aviation civile (il a dernièrement travaillé pour Cargolux où il s’est rendu tous les jours à vélo) est fier de s’être approprié une part de culture anglo-saxonne qui exige que le service soit au top et s’adapte aux besoins et exigences du consommateur. Arrivé au Luxembourg il y a quatre ans, il a vu l’opportunité de se rendre indépendant en transformant sa passion du vélo en métier. Huit mois se sont écoulés entre l’idée et sa réalisation, période pendant laquelle il peaufine le projet et noue de premiers partenariats (par exemple avec l’association ProVelo, mais aussi avec des entreprises privées pour les soutenir à établir un plan « mobilité douce » pour leurs employés). Outre un blocage qui le retarde de trois mois (l’entreprise tombe sous le registre « artisanat » qui exige une formation spécifique), la création de la structure a été rapide et sans couacs ; Emmanuel souligne l’excellent accompagnement de la Chambre des métiers. Son apprenti du moment, le jeune et souriant Yannick, est d’ailleurs envoyé par cette dernière, et Emmanuel tient à poursuivre cette coopération pour donner le goût du métier à la prochaine génération. L’équipe compte encore en un mécanicien indépendant qui prête main forte quand la charge de travail l’exige. Avec l’arrivée du printemps et l’augmentation structurelle du nombre d’abonnés, The Happy Cyclist est à la recherche d’un mécanicien à temps plein.

Au niveau stratégique, Emmanuel a l’intention d’étendre les opérations au-delà du Luxembourg dans un avenir proche, idéalement dans une ville allemande. Il n’a pas encore fait son choix entre Cologne, Bonn et Münster, ces villes « disposant de bonnes infrastructures pour la mobilité douce ». Peut-on dire la même chose de la capitale luxembourgeoise ? « Les infrastructures sont en voie de développement », sourit Emmanuel. « Les chiffres montrent qu’il y a une lente mais constante croissance des utilisateurs de bicyclette. À mon sens, trois choses doivent concourir pour convaincre les gens d’emprunter leur vélo en tant que moyen de transport au quotidien : l’avantage financier (qui apparaît clairement), les infrastructures (en cours…) et le service après-vente ». Emmanuel projette également de compléter l’intégration digitale de sa start-up avec une application, opérationnelle au cours de la saison, qui permettra au client de visualiser l’historique de ses vélos, les réparations faites, les factures. Il pense également à une « uberisation » du service, une fois que The Happy Cyclist opérera dans d’autres villes, en ayant recours à des mécaniciens freelance qui prendraient le relais en fonction des zones géographiques. Mais, souligne-t-il, « une chose à la fois ; qui veut aller loin, ménage sa monture ». Monture à pédales, en l’occurrence.

Béatrice Dissi
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