Logement subventionné

La chaise vide

d'Lëtzebuerger Land du 17.02.2011

L’effort public en faveur du logement sera de 520 millions d’euros au cours de cette législature. Le neuvième programme de construction de logements subventionnés porte sur un total de 8 438 unités, dont l’essentiel devrait être le fait des communes. La plupart des projets de constructions sont des reliquats du huitième programme que le gouvernement précédent n’a pas été en mesure de réaliser. Combien faudrait-il de millions d’euros supplémentaires pour contrer la flambée préoccupante des prix de l’immobilier ? Silence radio du gouvernement. Qui ne semble plus oser se prononcer sur le déficit de bâtiments à des prix abordables par rapport à l’évolution démographique du Luxembourg, qui ne fait venir que des expatriés haut de gamme, mais draine aussi des arrivées de ménages moins solvables, dont les revenus suffisent à peine à payer un loyer (le projet de loi donnant un coup de pouce public aux loyers a été déposé cette semaine seulement à la Chambre des députés).

Le neuvième programme de logements subventionnés, dont un des avenants a été publié début février au Mémorial A, est un leurre qui donne sans doute bonne conscience aux autorités, mais restera largement insuffisant pour faire face à la demande de logements sociaux et, accessoirement, influencer durablement à la baisse les prix de l’immobilier. Il ne faut sans doute pas se faire d’illusions sur ce point.

Plus de 180 projets sur les 262 du programme public ont été repris du huitième programme, qui avait été élaboré sous l’empire de l’ancien ministre du Logement Fernand Boden, dégommé en août 2009 du nouveau gouvernement CSV/LSAP. Cela représente près de 70 pour cent du total des projets et des unités de logements à construire.

Quant aux plus de 8 400 logements de ce plan, on peut espérer que 60 pour cent environ seront « habitables » pour la fin 2014, donc après les élections législatives qui donneront un nouveau gouvernement au grand-duché. Et encore, le chiffre serait optimiste. Il ne tient pas compte des aléas qui peuvent parfois retarder des projets de plusieurs mois, voire plusieurs années.Le fait donc qu’un projet soit inscrit dans le neuvième programme relève d’une obligation légale sans laquelle un projet immobilier subventionné par l’État, quel que soit d’ailleurs son calendrier de réalisation, ne pourrait pas exister. Les prévisions budgétaires obligent les autorités à mentionner des projets qui ont à peine atteint le stade d’une pré-étude. Si les terrains sont acquis (ce qui n’est pas toujours le cas), dans certaines hypothèses, le promoteur dispose de dix ans pour viabiliser ses terrains, au risque, s’il ne le fait pas, de devoir rembourser les aides publiques obtenues. Une petite question parlementaire au ministre du Logement pour savoir combien d’aides ont été remboursées ?

Le programme du ministère du Logement prévoit par exemple la construction de 90 logements (45 destinés à la vente et 45 à la location) à Steinfort à l’emplacement de l’actuel terrain de camping dont le bail va courir pendant encore deux ans. Il y a aussi quelques incongruités dans ce programme, comme la construction de plus de trente logements dans le quartier du Sauer-wiss à Luxembourg. Or, le programme du Sauerwiss est bouclé depuis des années. L’inscription de ces logements est un vieux reliquat d’aides qui n’ont toujours pas été remboursées, mais qui gonflent artificiellement les chiffres de logements subventionnés par le gouvernement. D’autres cas similaires émaillent le programme qui fait s’interroger sur la détermination du gouvernement à œuvrer contre la pénurie de logements bon marché et lutter contre la spéculation immobilière. À croire que la politique est impuissante face au pouvoir d’action des promoteurs.

Véronique Poujol
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