Julien Becker et Gwenael François

Créatifs au pluriel

d'Lëtzebuerger Land du 13.01.2011

Ce n’est pas tous les jours qu’un photographe luxembourgeois voit une de ses photos publiées dans... Le Monde. C’est pourtant ce qui est arrivé à Julien Becker quand, en novembre dernier, Klaus Regling, le directeur général du Fonds européen de stabilisation financière, était de passage à Luxembourg. C’est bien la photo signée Skill Lab qui est parue dans le prestigieux quotidien français. « Un coup de chance qui, j’espère, pourra se réitérer de temps en temps, » commente l’intéressé. Né sous forme de collectif de créatifs dans le secteur de l’image en 2006, Skill Lab est devenu, depuis quelques mois, une véritable société, fondée par Julien Becker, photographe indépendant, et par Gwenael François, motion designer. Si Julien a étudié la photographie à Paris avant de rentrer au bercail luxembourgeois, Gwenael est passé par une fac de sciences et s’est formé au graphisme, à la photographie et à la vidéo de manière très pragmatique, sur le terrain de ses expérimentations. Ils se sont rencontrés chez Tango TV autour de 2003 et ont connu un parcours assez semblable, passant de Tango TV à Luxe TV, de caméraman à monteur puis à motion designer pour l’un ou à photographe pour MKE pour l’autre, avant de devenir tous les deux indépendants en 2009.

Le collectif Skill Lab, qui rassemblait d’autres membres au départ, s’étant fait repérer pour l’originalité et la qualité de ses créations, la demande s’est faite croissante et l’ambition commerciale a pu être concrétisée. Le studio de création Skill Lab est donc né avec, au centre de sa réflexion, l’image, l’image et l’image qu’elle soit fixe ou en mouvement. « Le nom évoque nos différentes compétences, ainsi que l’idée de laboratoire et d’expérimentation qui nous tient à cœur, » justifie Julien qui tient à une perpétuelle remise en question « indispensable pour nous autant que pour nos clients. »

Trois volets forment l’activité du studio. Le premier pilier est la photographie, tant de portraits, de reportage, de publicité ou de séries thématiques. On leur doit par exemple la campagne pour les 750 ans de Diekirch avec des portraits de professionnels emblématiques de la ville, une belle brochette de portraits éditoriaux, une impressionnante série sur les tatouages ou une autre sur les familles de restaurateurs italiens. La réalisation de films et clips est une autre activité du studio. Une fausse publicité pour la pétanque côtoie une vraie pour le site plaza.lu et, plus récemment, une réalisation pour le compte d’IP pour le site macommune.lu. On peut aussi se régaler d’un clip de la chanson Kaina pour le groupe RIC, mêlant ragga et flamenco. Le clip a été tourné en cinq jours, mais a nécessité trois semaines de postproduction. Mettant en scène les stéréotypes liés à la drogue – en montrant le groupe qui deale des carottes – il a été nommé « meilleur clip lorrain 2010 » par l’Autre Canal à Nancy. Dans un milieu où le « buzz » prend des allures de carte de visite, les créatifs se donnent à fond pour se faire connaître et n’hésitent pas à investir eux-mêmes dans la réalisation de projets : un résumé en images du Festival Offf (une grande messe de créatifs à Paris), la participation à un concours pour Nikon (« one day in 140 seconds », qui a terminé parmi les dix meilleurs) ou une fausse publicité insérée dans le film Babylon AD de Mathieu Kassovitz. En ligne de mire, la réalisation de court-métrage de fiction, avec le soutien espéré du Film Fund, n’est pas une utopie.

Enfin, le domaine du motion design est également riche de projets personnels et de commandes diverses : génériques de films et d’émissions, publicités, vœux en vidéo... Se revendiquant autant des grands anciens (Méliès ou Sander) que des figures actuelles (Kyle Cooper , qui signe les génériques les plus prestigieux du moment, ou le photographe Denis Rouvre), Skill Lab commence à avoir une « patte » reconnaissable faite de gros plans décalés, d’angles de vue rares, de musique électro légère et de l’intégration de graphisme à l’image. Le tout extrêmement soigné, contrasté dans les couleurs et léché dans la qualité de l’image. « Nous nous complétons très bien pour apporter des réponses créatives et innovantes à nos clients », précise Gwenael François, qui ne veut pas seulement exécuter des commandes, mais aussi incarner une force de proposition pour les idées, les concepts et les scénarii des ses clients. « La technique change, avec des appareils photo qui filment, des logiciels de montage et de création, une grande convergence des médias et des métiers, » ajoute son collègue pour souligner l’importance d’une nouvelle génération de créatifs et de techniciens de l’image dans laquelle Skill Lab creuse sa place.

Jade Fairbanks
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