Politique européenne en faveur des PME

Un instrument clé pour sortir de la crise

d'Lëtzebuerger Land du 23.12.2011

Les 23 millions de petites et moyennes entreprises (PME), représentant 99 pour cent des entreprises de l’Union européenne, sont à l’origine de 80 pour cent des emplois créés en Europe au cours des cinq dernières années. Vitales pour l’économie européenne, elles font l’objet de soins particuliers au travers des diverses politiques menées par la Commission européenne notamment pour soutenir la compétitivité des entreprises, la politique de recherche et d’innovation ou la politique régionale.

Dans toute politique de soutien aux PME, le cœur de l’action se trouve dans l’accès au financement. En effet, bien qu’agents économiques de premier plan, les PME ne sont pas toujours bien aimées des banques lorsqu’il s’agit de financer leur développement : 11 pour cent (p.c.) des demandes de prêts sont rejetées, 4 p.c. des demandes acceptées sont refusées par les PME en raison de leur coût trop élevé et 17 p.c. reçoivent moins qu’elles n’avaient sollicité. C’est ainsi au total une PME sur trois qui ne reçoit pas l’aide financière sollicitée auprès de sa banque.

La Commission européenne, prenant acte de cette situation, a donc récemment présenté un ensemble de mesures destinées à faciliter le financement des PME.

Dès 2007, la Commission a mis en place des instruments financiers dans le cadre du Programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité (PIC) et du Programme-cadre pour la recherche (PC7) pour pallier les défaillances du marché. Dotées d’un budget de 1,1 milliard d’euros, les facilités « garantie » et « capital-risque » du PIC sont conçues pour pallier le manque de financement disponible pour les PME. Il s’agit d’accorder des garanties aux prêts consentis à des PME par des intermédiaires financiers, en particulier les banques, ou d’apporter du capital à des fonds de capital-investissement qui prennent ensuite une participation dans des entreprises très innovantes. À mi-2011, les montants engagés sont significatifs : 5,6 milliards de garanties et 1,6 milliard de capital-risque ont été mobilisés pour les PME innovantes. Ces instruments financiers ont bénéficié à plus de 146 000 PME et permis de maintenir ou créer près de 175 000 emplois.

Au sein du PC7, le mécanisme de financement avec partage des risques (MFPR) a pour objectif de fournir des prêts bancaires à des activités de recherche et d’innovation par nature risquées. En mettant en commun un milliard d’euros chacun, l’objectif de la Commission et de la Banque européenne d’investissement (BEI) était de lever milliards milliards de prêts. À la fin 2011, cet objectif est déjà atteint avec 9,7 milliards de prêts approuvés.

Mais ces efforts se heurtent à la crise financière, qui a notamment pour conséquence la restriction de l’offre de crédit, et l’absence de financement adéquat reste aujourd’hui encore l’une des préoccupations majeures des PME. C’est pourquoi l’Europe poursuit ses efforts, notamment au travers du récent Plan d’action pour faciliter l’accès des PME au financement, qui énumère les nouvelles dispositions mises en œuvre par la Commission pour accroître le potentiel de croissance des PME.

Dans le Plan d’action pour l’accès des PME au financement, le capital-risque, qui constitue une alternative au financement bancaire, fait l’objet de plusieurs mesures réglementaires qui seront discutées par le Parlement européen et le Conseil dans le courant de l’année 2012.

Le plan d’action prévoit notamment l’instauration d’une appellation Fonds de capital-risque européen qui devrait faciliter la commercialisation des fonds, c’est-à-dire leur accès à des capitaux apportés par les investisseurs institutionnels (fonds de pension, assurances, fonds de fonds, banques …), et contrecarrer les effets d’un marché unique encore trop fragmenté, dans lequel la levée de capitaux dans plusieurs États-membres est onéreuse (évaluée entre 13 500 et 27 000 euros pour une levée de fonds dans tous les États-membres). Le nouveau régime sera simple et efficient fonctionnant sur le principe d’un agrément unique dans l’État-membre d’origine. Les résultats attendus sont l’accroissement de la taille des fonds de capital-risque, qui restent plus petits que les fonds américains (60 millions d’euros en moyenne en Europe, 130 millions aux États-Unis), et ainsi l’augmentation de l’offre de financement faite aux PME.

Dès début 2012, un nouveau mécanisme de garantie sera mis en place par la Commission et la BEI pour financer les projets de recherche et d’innovation des PME. Il s’agit d’encourager les banques à soutenir des activités qui, de par leur nature même, comportent un niveau élevé de risque. Ce mécanisme, intitulé « instrument de partage des risques », est le nouveau volet garantie du mécanisme de financement avec partage des risques (MFPR) du PC7.

L’instrument de partage des risques, qui sera géré par le Fonds européen d’investissement (FEI), filiale de la BEI, et de la Commission pour le financement des PME, devrait permettre de mettre à la disposition des PME des prêts et crédits-bails pour un montant total pouvant atteindre 1,2 milliard d’ici à la fin de 2013.

D’autre part, toujours en réaction à la crise de liquidité à laquelle les entreprises font face, la Commission a modifié les dispositions régissant l’utilisation des instruments d’ingénierie financière. Ces instruments permettent d’investir les fonds structurels de la politique de cohésion dans des fonds de garantie ou de capital-risque. À la fin de 2010, 7,4 milliards de fonds structurels combinés aux contributions nationales étaient investis dans des entreprises via des instruments d’ingénierie financière. L’investissement en fonds propres ou le prêt dans des PME seront désormais possibles à tous les stades de développement des entreprises et non plus seulement lors de leur création ou de leur développement. Désormais des entreprises en cours de transmission pourront donc être également financées.

Pour la prochaine période de programmation, la Commission propose de mettre en œuvre un programme pour stimuler la compétitivité des entreprises. Le Programme pour la compétitivité des entreprises et les PME (COSME) serait doté de 2,5 milliards d’euros, dont 1,4 milliard alloué à des instruments financiers qui s’inscrivent pour une large part dans la continuité de leurs prédécesseurs (instruments financiers du programme-cadre pour l’innovation et la compétitivité). Le programme COSME comprendrait une facilité « capital-risque » et une facilité « garantie de prêts ».

Toutefois, et c’est une nouveauté, les instruments financiers du programme COSME devraient être mis en œuvre en complémentarité avec les moyens de financement (3,5 milliards) nouvellement créés dans le cadre de Horizon 2020, le programme 2014-2020 pour la recherche et l’innovation. Ce programme annonce la création d’une « facilité dette », successeur du mécanisme de financement avec partage des risques, et d’une « facilité capital-risque », qui sera concentrée sur le financement des PME innovantes.

« Les facilités de soutien au financement du développement des activités des PME par les fonds propres ou par la dette des programmes COSME et Horizon 2020 seront non seulement complémentaires mais plus important encore mis en œuvre conjointement au travers d’instruments financiers uniques, » déclare Jean-David Malo, chef de l’unité Ingénierie financière de la direction générale Recherche et Innovation.

Complémentarité, par exemple, avec le montant des prêts qui seront garantis : jusqu’à 150 000 euros dans le cadre de COSME, à partir de 150 000 dans le cadre de Horizon 2020. Différence cependant, puisque COSME financera tous les types d’entreprises (sous le programme actuel, 88 p.c. des garanties sont mobilisées pour des entreprises non innovantes), alors que Horizon 2020 ciblera exclusivement les entreprises innovantes.

Au sein de l’UE, les PME contribuent pour une large part à la création de richesses en produisant plus de la moitié de la valeur ajoutée totale dans le secteur de l’économie marchande non financière. Il apparaît dès lors justifié que la Commission les place au cœur de sa stratégie pour la croissance et l’emploi.

Virginie Goupy
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